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Je galège !… j'allais oublier nos gamelles !… elles allaient pas se réchauffer d'un quolibet l'autre !… sortir de nos réflexions !…

Passant devant les bibelforscher je vois encore une isba de plus… zut ! ceux-là, crédié, s'affairent vite et bien !… pas fainéants chômeurs ! et pas des petits appentis, des gros pavillons pour au moins quinze vingt familles… c'est ça qui manque à la France, pas des buées de postillons toniques ni des curés photogéniques… mais des « objecteurs » ! la qualité, rapidité, ils vous réédifieraient la France en pas trente-cinq jours, le laps de la folle colique, Bréda-Pyrénées… je dis !… j'affirme !… fort prétentieux !… « nous savons tous joliment tout, une fois l'événement survenu ! » l'événement là c'était notre dîne !… nous n'avions qu'à traverser le parc… notre péristyle… et notre tour… j'entends des voix… le ménage Kretzer… nous poussons la porte… oh, tout va bien !… bavards et bavardes… pas de drame du tout… les Kretzer et au moins dix secrétaires, demoiselles, rassemblés autour d'une gitane… gitane, ça je ne m'attendais pas… cette gitane venait d'où ?… les gitans devaient être supprimés d'après les décrets de Nuremberg ?… hautement contaminateurs !… crypto-asiates !… une tzigane libre et jacassante ? autant dire la guerre inutile !… l'Ordre d'Hitler, ne l'oublions pas, était tout aussi raciste que celui des noirs du Mali ou des jaunes de Hankéou… on allait voir ce qu'on allait voir !… on a rien vu, heureusement !… que Monnerville roi de France… et les Gaulois, la botte au cul, chassés de leur prétendu Empire !… pas raciste qui veut !

Là, celle-ci accroupie sur notre paillasse arrivait d'où ?… je demande à Lili, à l'oreille… je demande à Marie-Thérèse… et aux Kretzer… tout simplement elle vient de Hongrie… ils me chuchotent… elle est pas seule… ils sont cinq familles ensemble dans une roulotte là, dans le parc de l'autre côté des isbas… diseurs de « bonne aventure », vanniers très habiles, rempailleurs, violonistes, et pillards, bien entendu, presque sûr, espions… le plus bath, passeports très en règle, plus en règle que nous !… avec cachets à la cire, photos, empreintes, et permis pour tout Berlin, ausweis et ravitaillement pour leur gazogène… nous avons qu'à aller nous rendre compte, tout près, à côté des bibelforscher… ils devaient camper ici trois semaines le temps de nous donner cinq à six représentations, cinéma, chants, danses, et de rempailler toutes les chaises, rafistoler les paniers, remonter les ruches… ces artisans tombaient à pic… et les osiers ne manquaient pas… plein les fossés et les étangs… trois semaines c'était court ce qu'ils auraient à faire !… l'agréable du IVe Reich, si vous le jugez, l'Histoire déjà, les vociférations éteintes, c'est qu'ils pensaient aux moindres détails… tenez pour les Juifs, combien étaient appointés à la Chancellerie ?… et tout proches d'Adolf ?… des beaux et des belles !… un jour on fera un livre sur eux… comme les fusillés des cours de Justice, si épuratrices, combien de yites nazis, collaborateurs de choc ?… Sachs était pas une exception… du tout !… j'ai connu à Sigmaringen, des exemples bien plus magnifiques !… la terrible catastrophe des goyes c'est qu'ils sont si ahuris, cartésiens bêlants, que ce qu'est pas bien entendu, admis, bien conforme… existe tout simplement pas !… que ce qu'est bien entendu qui compte !… « par ici les petites Loyola !… par ici les salariés bourreaux d'Himmler !… » demandez davantage ? les détails ?… vous les voyez tourner net dingues, délirants anthropopithèques, tout fous d'alcool, titubants, hagards de publicité, et merde !… assassins comme cinquante films, cochons comme les « Courriers du Cœur », Mayol, Grand-Guignol, mélangés ! vous avez provoqué tant pis !…

Nous deux là, avec nos gamelles, hominiens ou non, nous arrivions pile… je voyais en pleine paille de ces grandes assiettes de butterbrot !… des piles de tartines et petits fours… nous avec nos deux gamelles, et à réchauffer, nous avions bonne mine !… le mieux, de les porter à Iago… il devait être rentré de son tour de vertu, à tirer le vieux, montrer sa maigreur… je le dis à Le Vigan, à l'oreille… dalle !… la gitane m'a entendu…

« Allez-y !… allez-y ! »

Elle crie… elle nous vire… elle savait qui nous étions… ces gens-là sont vite renseignés… leur roulotte arrivée ce matin !… en français qu'elle nous a virés !… « allez-y ! »… qu'on lui voie un peu sa tronche, cette agressive !… pas beaucoup de lumière, deux bougies… le tout se faire l'œil comme à la radio, s'accommoder… maintenant je la vois, elle est assise, accroupie, elle bat… la maladie dans le moment, grivetons, civils, prisonniers, tous, toutes, les brêmes !… la grande maladie où que vous alliez ils se font l'avenir !… ah, l'Harras qui cherche une « Apocalypse » ! terrible épidémie !

La gitane en est à Lili… mais que nous deux d'abord foutions le camp, moi, La Vigue !… rien en notre présence !

« Gehen sie, doch ! »

Si grave ces cartes qu'on me dirait que c'est pour la police !…

Harras est au Portugal, contacter les autres pansus, d'en face, ils se feraient tout simplement les brêmes, je serais pas surpris… mais que cette gitane est impatiente !…

« Los !… los !…  »

Et à voix rauque… presque d'homme… fardée elle est, juste le temps de voir, cils et sourcils passés au bleu… sûrement une perruque, pas ses cheveux… et perruque blonde !… je crois qu'elle aime pas qu'on la dévisage… oh certes, je ne veux rien compliquer… nous partons doucement, avec nos gamelles… que ces dames s'occupent de l'avenir !… en fait, qu'est-ce qu'il passe comme « forteresses »… pas dans l'avenir, tout de suite, là ! au-dessus !… escadres sur escadres, et pas des joujoux, pas aux cartes !… et qui se gênent pas, en formations plus bas que les nuages… à peut-être trois cents mètres… à peine !… et tous « feux » clignotants, qu'on sache bien qu'ils sont comme chez eux, que tout l'air allemand leur appartient, pas que la capitale et ses environs, qu'ils vont tout foutre en papillotes !… cratères et phosphore ! retourner tout sens dessus dessous, les ruines et la Spree, l'Adolf et sa Chancellerie, et ses Obersturm et bunker… les cimetières aussi !

Et nos tickets nous ?… j'y pense !… notre Landrat devait un peu s'en occuper, s'en faire des poignées de confetti !… très bien !

« Lâche pas la rampe ! »

Vers la cave maintenant, le couloir… Iago devait être là… le vieux était rentré, j'avais vu son vélo en bas, le guidon contre une colonne… il s'agissait que Iago morde pas… La Vigue me propose : « Il te connaît toi, vas-y ! »… je pose une gamelle sur la dalle… et je l'appelle « Iago ! »… il veut bien… trois coups de langue !… ça y est !… avalée !… je lui présente l'autre… encore trois coups de langue !… brave Iago !… on est potes ! facile !… on retournera aux « bibel »… ils ont de trop ! si vous faites pas le bon Dieu vous-même, une juste répartition des biens, vous mourrez sûrement enragé, d'indignation, de refoulement de trop de colères… je sais ce que je dis… je suis à la veille… je vous parlais de l'édition, l'arnaque que c'est !… et l'abominable goût du public !… moi qu'ai pourtant bien l'habitude des dissections et de sujets très avancés, le cœur me flanche quand je pense aux livres et commentaires… pas plus pires scolopendres velus, au fond des Sargasses, que les lecteurs très avertis… bâfreurs d'excréments dialectiques, pris dans les algues, et phrasibules formés polypes, formid « messages »… « sensa » bulles de vase… rien que d'entrevoir ces fonds de rien peut très bien vous éteindre la vue, le goût, l'odorat à jamais…