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– Ô Paradis!

La mémoire

Souvent, lorsque la main sur les yeux, je médite, Elle m’apparaît, svelte et la tête petite, Avec ses blonds cheveux coupés courts sur le front. Trouverai-je jamais des mots qui la peindront, La chère vision que malgré moi j’ai fuie? Qu’est auprès de son teint la rose après la pluie? Peut-on comparer même au chant du bengali Son exotique accent, si clair et si joli? Est-il une grenade entr’ouverte qui rende L’incarnat de sa bouche adorablement grande? Oui, les astres sont purs, mais aucun dans les cieux, Aucun n’est éclatant et pur comme ses yeux; Et l’antilope errant sous le taillis humide N’a pas ce long regard lumineux et timide. Ah! devant tant de grâce et de charme innocent, Le poète qui veut décrire est impuissant; Mais l’amant peut du moins s’écrier: «Sois bénie, Ô faculté sublime à l’égal du génie, Mémoire, qui me rends son sourire et sa voix, Et qui fais qu’exilé loin d’elle, je la vois!»

Réponse

«Mais je l’ai vu si peu!» disiez-vous l’autre jour. – Et moi, vous ai-je vue en effet davantage? En un moment mon cœur s’est donné sans partage. Ne pouvez-vous ainsi m’aimer à votre tour?
Pour monter d’un coup d’aile au sommet de la tour, Pour emplir de clartés l’horizon noir d’orage, Et pour nous enchanter de son puissant mirage, Quel temps faut-il à l’aigle, à l’éclair, à l’amour?
Je vous ai vue à peine, et vous m’êtes ravie! Mais à vous mériter je consacre ma vie Et du sombre avenir j’accepte le défi.
Pour s’aimer faut-il donc tellement se connaître, Puisque, pour allumer le feu qui me pénètre, Chère âme, un seul regard de vos yeux a suffi?

À un ange gardien

Mon rêve, par l’amour redevenu chrétien, T’évoque à ses côtés, ô doux ange gardien, Divin et pur esprit, compagnon invisible Qui veilles sur cette âme innocente et paisible! N’est-ce pas, beau soldat des phalanges de Dieu, Qui, pour la protéger, fais toujours, en tout lieu, Sur l’adorable enfant planer ton ombre ailée, Que ta chaste personne est moins immaculée, Que ton regard, reflet des immenses azurs, Et que le feu qui brille à ton front, sont moins purs, Dans leur sublime essence au paradis conquise, Que le cœur virginal de cette enfant exquise? Ô toi qui de la voir as toujours la douceur, Bel ange, n’est-ce pas qu’elle est comme ta sœur? Ô céleste témoin qui sais que sa pensée Par une humble prière au matin commencée Dans ses rêves du soir est plus naïve encor, N’est-ce pas qu’en voyant s’abaisser ses cils d’or Sur ses yeux ingénus comme ceux des gazelles, Tu t’étonnes parfois qu’elle n’ait pas des ailes? Mon rêve, par l’amour redevenu chrétien, T’évoque à ses côtés, ô doux ange gardien, Divin et pur esprit, compagnon invisible Qui veilles sur cette âme innocente et paisible! N’est-ce pas, beau soldat des phalanges de Dieu, Qui, pour la protéger, fais toujours, en tout lieu, Sur l’adorable enfant planer ton ombre ailée, Que ta chaste personne est moins immaculée, Que ton regard, reflet des immenses azurs, Et que le feu qui brille à ton front, sont moins purs, Dans leur sublime essence au paradis conquise, Que le cœur virginal de cette enfant exquise? Ô toi qui de la voir as toujours la douceur, Bel ange, n’est-ce pas qu’elle est comme ta sœur? Ô céleste témoin qui sais que sa pensée Par une humble prière au matin commencée Dans ses rêves du soir est plus naïve encor, N’est-ce pas qu’en voyant s’abaisser ses cils d’or Sur ses yeux ingénus comme ceux des gazelles, Tu t’étonnes parfois qu’elle n’ait pas des ailes?

Romance

Quand vous me montrez une rose Qui s’épanouit sous l’azur, Pourquoi suis-je alors plus morose? Quand vous me montrez une rose, C’est que je pense à son front pur.
Quand vous me montrez une étoile, Pourquoi les pleurs, comme un brouillard, Sur mes yeux jettent-ils leur voile? Quand vous me montrez une étoile, C’est que je pense à son regard.
Quand vous me montrez l’hirondelle Qui part jusqu’au prochain avril, Pourquoi mon âme se meurt-elle Quand vous me montrez l’hirondelle, C’est que je pense à mon exil.

Lettre

Non, ce n’est pas en vous «un idéal» que j’aime, C’est vous tout simplement, mon enfant, c’est vous-même. Telle Dieu vous a faite, et telle je vous veux. Et rien ne m’éblouit, ni l’or de vos cheveux, Ni le feu sombre et doux de vos larges prunelles, Bien que ma passion ait pris sa source en elles. Comme moi, vous devez avoir plus d’un défaut; Pourtant c’est vous que j’aime et c’est vous qu’il me faut. Je ne poursuis pas là de chimère impossible; Non, non! Mais seulement, si vous êtes sensible Au sentiment profond, pur, fidèle et sacré, Que j’ai conçu pour vous et que je garderai, Et si nous triomphons de ce qui nous sépare, Le rêve, chère enfant, où mon esprit s’égare, C’est d’avoir à toujours chérir et protéger Vous comme vous voilà, vous sans y rien changer. Je vous sais le cœur bon, vous n’êtes point coquette; Mais je ne voudrais pas que vous fussiez parfaite, Et le chagrin qu’un jour vous me pourrez donner, J’y tiens pour la douceur de vous le pardonner. Je veux joindre, si j’ai le bonheur que j’espère, À l’ardeur de l’amant l’indulgence du père Et devenir plus doux quand vous me ferez mal. Voyez, je ne mets pas en vous «un idéal», Et de l’humanité je connais la faiblesse; Mais je vous crois assez de cœur et de noblesse Pour espérer que, grâce à mon effort constant, Vous m’aimerez un peu, moi qui vous aime tant!

Février

Hélas! dis-tu, la froide neige Recouvre le sol et les eaux; Si le bon Dieu ne les protège, Le printemps n’aura plus d’oiseaux!
Rassure-toi, tendre peureuse; Les doux chanteurs n’ont point péri. Sous plus d’une racine creuse Ils ont un chaud et sûr abri.
Là, se serrant l’un contre l’autre Et blottis dans l’asile obscur, Pleins d’un espoir pareil au nôtre, Ils attendent l’Avril futur;