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Puis, il cria : « Qu’est-ce que c’était que cette histoire de ce vaisseau qui consommait mes gaz ?

— Je savais bien que vous soulèveriez ce lièvre, répondit Brennan. Je vous l’expliquerai en détail mais, d’abord, commentons la bataille.

— Au diable la bataille !

— Vous vous êtes bien comporté, dit Brennan. Il ne reste pas grand-chose de votre capsule d’armes, mais ce sera bien si vous ne rencontrez plus d’autres éclaireurs. Vous n’avez pas de carburant de réserve pour vous mettre en orbite autour de Wunderland ; vous en avez trop utilisé. Mais vous pourrez abandonner Protecteur et atterrir avec le vaisseau-cargo.

— Charmant. Et très rassurant. Dites-moi à présent comment un vaisseau de reconnaissance Pak peut consommer ma propre éjection et venir se frotter à ma tuyère arrière !

— C’est une disposition possible. En réalité, c’est celle que je vais me mettre à rechercher, parce qu’elle est facile à trouver. Je vous le montrerai mieux avec des diagrammes. »

Roy s’était un peu calmé quand ils arrivèrent à la salle de commande du Hollandais Volant. Mais il tremblait. Trois jours sur le siège de pilotage de Protecteur l’avaient épuisé.

Brennan le regarda. « Voulez-vous que nous remettions cela à plus tard ?

— Non.

— Bien. Je serai bref. Considérons ce que fait votre champ de compression. Il prend de l’hydrogène interstellaire sur une route de cinq mille kilomètres de large. Il l’engouffre par l’intermédiaire des champs magnétiques, le serre et le comprime assez fort et assez longtemps pour produire une fusion. Ce qui en sort est de l’hélium, un petit peu d’hydrogène en excédent, et des produits de fusion d’un ordre élevé.

— D’accord.

— C’est aussi un courant chaud, assez compact, qui finira par se disperser dans le vide, comme les gaz d’éjection d’une fusée. Mais supposez qu’un vaisseau vous suive, ici… » Brennan projeta des images sur l’écran : deux petits vaisseaux, le second à cent cinquante kilomètres derrière le premier. Il étendit un large cône devant le vaisseau de tête, le faisant presque converger en un point derrière lui. Une aiguille avec le vaisseau en sa pointe – le bouclier de protection – introduisait l’hydrogène survenant dans une constriction en forme d’anneau.

« Vous êtes en train d’amasser du carburant pour lui. Son champ de compression n’est large que de cent cinquante kilomètres… » Brennan dessina un cône plus étroit. « … ce qui lui procure un meilleur contrôle sur son flux de carburant. Il est déjà chaud et dense. Il brûle mieux, en fusion d’un ordre plus élevé. Les gaz d’éjection doivent être riches en béryllium.

— C’est justement l’une des choses qu’ont pu essayer les Pak qui sont restés les derniers. Le vaisseau de tête ne serait rien d’autre qu’un compresseur : pas de carburant à bord, pas de moteur incorporé, pas de fret. Il faudrait le remorquer jusqu’à la vitesse de statoréaction. Le vaisseau qui suit est plus lourd, mais a une poussée plus grande.

— Vous pensez que c’est ce qui nous attend ?

— C’est possible. Il y a d’autres hypothèses. Deux vaisseaux autonomes, maintenus ensemble par un générateur de pesanteur et qui, au moment décisif, pourraient se séparer. Ou bien le vaisseau de tête étant le vaisseau proprement dit, le vaisseau arrière qu’un simple dispositif de postcombustion. De toute façon, je pourrai les trouver. Ils produiront des fréquences de béryllium comme une enseigne au néon dans le ciel. Tout ce qui me reste à faire est de construire le détecteur.

— Besoin d’aide ?

— Peut-être. Allez dormir. Dans un mois, nous procéderons à un nouvel exercice de tir simulé. »

Roy s’immobilisa sur le seuil. « Aussi long ?

— Rien que pour vous maintenir en forme. Vous êtes parfaitement prêt. Mais faites davantage attention à ce projecteur électromagnétique. Lorsque vous vous réveillerez, je vous montrerai ce que les éclaireurs Pak lui ont fait.

— Ce que vous lui avez fait.

— Ce qu’ils auraient fait. Allez dormir. »

Brennan ne bougea pas de l’atelier de mécanique pendant trois jours. S’il dormit, il dormit là. Et ce fut là qu’il avala ses repas. Comme il y faisait un bruit infernal, une vibration bourdonnante ébranlait le rocher du Hollandais Volant.

Roy lut deux vieux romans mémorisés dans l’ordinateur. Flottant dans les cavernes et les couloirs de roche nue, il était oppressé par la sensation d’être devenu un troglodyte. Aussi s’entraîna-t-il jusqu’à épuisement dans la salle de culture physique. La chute libre lui avait coûté un peu de tonicité musculaire. Il fallait remédier à cela.

Après des recherches sur Wunderland, il trouva à peu près les renseignements qu’il prévoyait.

G : 61 p. cent.

Population : 1024 000 habitants.

Zone colonisée : 7 500 000 kilomètres carrés.

Ville principale : Munchen, avec 600 habitants.

Adieu, vie citadine ! Mais en y réfléchissant, Munchen ressemblerait probablement à New York quand il y arriverait.

Le quatrième jour, il s’aperçut que l’atelier était silencieux ; il y découvrit Brennan apparemment endormi. Il allait repartir quand Brennan ouvrit les yeux et se mit à parler.

« Vous comptez trop sur ces longs virages lents, dit-il. Pour esquiver les armes Pak, le bon moyen est de faire varier votre poussée. Ne cessez pas d’ouvrir et de fermer la constriction dans le champ de compression. Lorsqu’ils lancent quelque chose comme une impulsion de laser dans la constriction, ouvrez-la. Rien ne risque de provoquer une fusion si vous ne comprimez pas assez le plasma. »

Roy ne s’énerva pas. Il commençait à s’habituer au fait que Brennan revenait souvent sur des sujets qui avaient paru épuisés lors de discussions précédentes. Il se borna à dire : « Ce dernier vaisseau aurait pu le faire lorsque je lui ai lancé du radon.

— Naturellement, à condition qu’il l’ait fait assez vite. À de bonnes vitesses de statoréaction, le vilain devrait se trouver dans la constriction avant de savoir qu’il a atteint le champ de compression, surtout si vous n’y avez pas mis de poussée de fusée. C’était bien raisonné, Roy. Une chose à vous rappeler toujours : ne suivez jamais un vaisseau en chasse. Il peut lancer trop de choses dans votre champ de compression. Espérons que, dans une bataille, ce sera nous qui ferons la chasse. »

Roy se souvint du motif de sa visite. « Il y a deux jours que vous n’avez pas déjeuné. J’ai pensé que…

— Je n’ai pas faim. Mon prisme est au four, et il faut que j’attende qu’il refroidisse.

— Je pourrais vous apporter…

— Non, merci.

— Qu’est-ce que cela signifie ?

— Ne vous ai-je pas dit que mes réactions étaient prévisibles ? S’il n’y a pas d’éclaireurs Pak dans le voisinage, vous pourriez aussi bien aller tout seul à Wunderland. Presque tout ce que je sais sur les Pak est mémorisé dans l’ordinateur. Lorsqu’un protecteur sent qu’on n’a pas besoin de lui, il ne mange pas.

— En somme, vous espérez que nous trouverons des Pak en reconnaissance ? »

Brennan rit. Un semblant de petit rire, sans que sa bouche remuât. Sa face n’était pas dure, au sens exact du terme : elle ressemblait à du cuir ridé. C’était sa bouche qui faisait penser à une carapace dure. La bouche recèle trop d’expressions humaines.

Au soir du même jour, il sortit en remorquant cent cinquante kilos d’appareils qui comprenaient notamment un gros prisme de cristal solide. Il ne voulut pas que Roy l’aidât à le tirer, mais ils montèrent le tout ensemble au foyer du télescope du Hollandais Volant. Roy lui apporta un sandwich et l’obligea à le manger. Ce rôle de mère juive l’irritait, mais pas plus que l’idée d’aller seul à Wunderland.