Выбрать главу

— Précision n’est pas force, remarqua Feric. Le nom du Parti doit crier nos volontés avec la voix d’un sergent-major. »

Parmerob s’indigna plus encore, « J’ai moi-même inventé le nom et formulé le programme du Parti, déclara-t-il. Nous défendons la pureté du véritable génotype humain, le renforcement et l’application rigoureuse des lois sur la pureté génétique, l’annihilation complète des Dominateurs anti-humains, l’exclusion définitive de tous les mutants du sol sacré de Heldon, l’adjonction au territoire de Heldon de nouvelles terres et la purification des ensembles génétiques partout où ce sera possible. Telle est la formule pour une renaissance de l’humanité pure – d’où le nom de Parti de la Renaissance Humaine. »

Feric se dressa lentement, posant avec désinvolture sa main droite sur la poignée de la Grande Massue de Held ; tous les regards se tournèrent instantanément vers lui. Allaient-ils véritablement assister à l’élévation du Commandeur d’Acier ? Il y eut un moment de silence durant lequel on n’entendit plus que le ronflement sourd du feu dans l’âtre de pierre. La voix de Feric rompit le silence : « Y a-t-il un seul des éléments de votre argumentation qui ne soit pas inclus dans le symbole du Svastika ? »

Soudain, le visage de Parmerob s’éclaira d’un sourire. « Vous avez raison, bien sûr. Le nom que vous avez choisi pour le Parti est bien supérieur au mien. Fils du Svastika, c’est effectivement ce que nous sommes. »

Feric se rassit sans avoir soulevé la Grande Massue, mais la main toujours posée sur elle. « Très bien, dit-il, il en est donc ainsi décidé. J’ai dessiné le drapeau du Parti, un brassard et divers emblèmes utilisant le motif du svastika. J’ai également dessiné un uniforme pour les Chevaliers du Svastika, notre groupe d’assaut. Ceux que vous voyez ici constituent le noyau de cette force ; actuellement, les Chevaliers du Svastika comptent deux douzaines d’hommes, mais je prévois une troupe d’au moins cinq mille hommes.

— Les généraux du Haut-Commandement ne verront pas d’un bon œil une milice de ce genre. Ils n’y resteront pas indifférents », remarqua Dugel.

Feric sourit. « Je ne doute pas un instant du fanatisme des officiers carrière. Nous faisons cause commune avec l’armée, et devrons trouver les moyens d’en convaincre le Haut-Commandement. Nul doute que votre expérience et votre compétence se révèlent inappréciables dans ce domaine. »

L’inquiétude de Dugel parut s’apaiser, en dépit d’un certain scepticisme subsistant sur ses traits. Quant aux autres, Haulman ne s’était pas du tout manifesté, tandis que les deux orateurs du Parti, Bluth et Decker, montraient quelques signes d’hostilité ; Parmerob et Marker manifestaient zèle et enthousiasme. Bogel, bien sûr, avait été le premier champion de Feric et sur le visage de Stopa, totalement dévoué à sa personne, se lisait une ferveur puérile. En l’état actuel des choses, Feric pouvait facilement réduire à sa merci tous les éléments hostiles à l’intérieur du Parti s’il en décidait ainsi ; il était cependant plus politique d’obtenir de tous, dès le début, l’assurance d’une loyauté inconditionnelle.

« Il ne reste plus qu’à organiser notre première démonstration de masse », reprit tranquillement Feric.

À cet instant, Heermark Bluth l’interrompit rudement, avec quelque agressivité. « Et comment résoudre la question du commandement ? s’enquit-il. Nous n’avons pas émis de vote à cet égard. Bogel est actuellement notre secrétaire général et notre chef officiel ; vous, Purhomme Jaggar, n’avez aucun titre.

— Je suis tout disposé à me démettre des fonctions de secrétaire général en faveur de Feric, avança Bogel. Je me contenterai du titre de président de l’Exécutif, sous ses ordres.

— Nous n’avons pas encore élu Feric comme chef, insista Bluth. Je demande un vote. »

Feric évalua la situation. Bogel, Parmerob et Marker voteraient sans aucun doute pour lui, Bluth et Decker probablement contre. Les positions de Haulman et Dugel restaient incertaines, bien que, en le poussant un peu, il eût probablement pu compter sur le général de brigade en retraite. En outre, il pouvait à bon droit s’attribuer une voix, plus une à Stopa. Si le vote avait lieu, il ne serait pas vaincu.

Mais il perdrait cependant une certaine dose d’autorité absolue s’il permettait aux officiels du Parti de lui accorder par vote le pouvoir suprême, et il serait véritablement désastreux qu’un tel vote fût autre chose qu’unanime. Son commandement devait s’appuyer sur un droit indiscutable, et non sur l’accord d’une quelconque assemblée de notables.

« Vous conserverez le titre de secrétaire général, Bogel. Cela vous convient mieux qu’à moi. Il me suffira d’être appelé simplement Commandeur. »

Le défi était clair : Feric revendiquait le titre de Commandeur des Chevaliers du Svastika avec tout ce que cela impliquait, de droit et non par vote. L’agitation de Bluth s’amplifia, et Decker également sembla sur le point d’écumer. Bogel, Marker, Parmerob et Stopa comprenaient et approuvaient ; Haulman ne se manifestait toujours pas, et Sigmark Dugel marquait sa satisfaction des sonorités martiales du nouveau titre de pouvoir absolu.

Decker posa finalement la question que Feric espérait entendre : « De quel droit prétendez-vous diriger le Parti sans le bénéfice d’un vote ? »

À nouveau, Feric se leva posément, sa main droite toujours posée avec douceur sur la Grande Massue de Held. Une rafale de vent s’engouffra dans la salle par les portes ouvertes, faisant follement danser les flammes des torches. Derrière Feric, le ciel de fin d’après-midi était d’un bleu profond sillonné de stries orange, et la grande plaine de Heldon s’étalait au pied de la montagne au-delà du bastion de la forêt. Encadré par ce panorama splendide, dans l’éclat vacillant des torches, la main sur le sceptre de la nation Heldon, Feric semblait l’incarnation même de tous les héros légendaires du lointain passé, et Bluth et Decker eux-mêmes ne purent s’empêcher de frissonner.

« Celui qui tient cette Massue est le véritable chef de tout Heldon par droit génétique, un droit bien plus ancien que toutes les lois de parti ou de conseil. Y a-t-il ici un seul homme qui prétende soulever la Grande Massue de Held ? »

Tous se turent, domptés.

Lentement, posément, Feric referma sa main sur la poignée du Commandeur d’Acier. D’un mouvement aérien, il éleva la Grande Massue au-dessus de sa tête.

Puis il abattit le Commandeur d’Acier sur la lourde table de chêne, la réduisant en miettes.

Ce fut Bluth lui-même qui, sautant le premier sur ses pieds, salua sportivement cet exploit au cri de « À Jaggar ! »

VI

À travers la plaine grondait, en direction de la banlieue de Walder, un imposant convoi ; l’allure, le vacarme et les couleurs étaient à couper le souffle, à soulever les cœurs d’enthousiasme. Deux longues colonnes de motos vrombissaient sur la route à quatre-vingts kilomètres/heure derrière une étincelante voiture noire à essence. Aux guenilles barbares des Vengeurs s’était substitué l’élégant uniforme de cuir brun des Chevaliers du Svastika, accompagné d’une casquette de forestier de même couleur à longue visière, ornée des nouvelles armoiries du Parti : un aigle portant un bouclier à croix gammée. Dans le dos de chaque motocycliste flottait une cape rouge frappée d’un simple svastika noir dans un cercle blanc immaculé ; ce motif se répétait sur le brassard rouge que chaque homme arborait à la manche droite. Capes et brassards reproduisaient en miniature les quatre grands drapeaux rouge, noir et blanc déployés par les motos en tête et en queue des deux colonnes. Ces bannières, fixées à de robustes hampes d’airain surmontées de l’écusson du Parti, battaient dans le vent de la course, étalant les svastikas noirs et blancs dessinés en leur centre. Les motos arboraient des couleurs et des ornements identiques : cadres rouge brique, réservoirs rouge, noir et blanc, avec le même insigne que celui des drapeaux du Parti, sacoches sans ornement superflu, recouvertes de chrome brillant, et enfin ailerons de queue chromés et découpés en forme de grands éclairs. Feric avait minutieusement calculé l’effet d’ensemble afin de frapper l’esprit et d’attirer le regard de tout véritable Helder.