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Feric écrasa les freins, et, dans un long crissement et un geyser de poussière, la moto s’arrêta à moins de vingt mètres de la chose ; à cette distance, l’odeur de poisson pourri était presque insoutenable. À peine Feric eut-il calé sa moto que l’amas amiboïdal de protoplasme se mit en mouvement vers lui. Il n’était pas étonnant que les Wolacks eussent fui cet endroit !

Mais les lâches Wolacks étaient une chose et les vrais humains une autre. Feric arracha sa mitraillette de son étui et la braqua sur la créature. Il appuya sur la détente, la maintenant pressée pour un feu nourri, et son arme cracha une grêle de balles hurlantes dans la chose pustuleuse ; une deuxième volée de balles surgie de l’arrière lui apprit que le rapide Best suivait son exemple.

Les balles frappaient la chair palpitante de l’amibe en une succession de petites explosions qui projetèrent dans l’air des gouttes de bave translucide. Une horrible série de hurlements prolongés jaillit de dizaines de suçoirs énormes criant leur agonie bestiale. Un liquide vert et visqueux gicla en gros bouillons des blessures. La créature gémit follement tandis que Feric et Best continuaient de poivrer sa surface glaireuse de balles de mitraillette.

Puis les chars, qui s’étaient arrêtés au niveau de la moto de Feric ouvrirent le feu. Quatre obus sifflèrent au-dessus de sa tête, se plantèrent dans la créature presque à bout portant, et explosèrent dans un puissant rugissement, provoquant une titanesque explosion de fumée et de bave.

Lorsque la fumée se fut dissipée, rien n’empêchait plus l’avance de la colonne. Seules quelques flaques de liquide vert fumaient sur le sol.

Feric et Best rayonnèrent de triomphe. « Et voilà pour les trolls du bas Roul ! hurla Feric.

— Médiocre cible d’entraînement pour l’armement moderne de Heldon, dit Best. J’espère que la véritable action est pour bientôt, Commandeur !

— Ne vous inquiétez pas, Best, nous rencontrerons bien assez tôt la horde zind. » Sur ces mots, Feric dégaina le Commandeur d’Acier, l’agita au-dessus de sa tête et entreprit de piloter la colonne en avant à travers la jungle jusqu’au pont, suspendu à de grands câbles d’acier fixés aux tours de pierre, elles-mêmes ancrées fort loin des eaux boueuses du Roul.

À mi-chemin, Feric perçut le feu des mitrailleuses et le grondement des canons. Jetant un coup d’œil en arrière, il vit d’autres horreurs putrides émerger de la jungle pour assaillir la colonne. Les canons des chars et les mitrailleuses des S.S. firent un carnage de ces monstres.

Lorsque l’arrière de la colonne eut atteint sans dommage la berge orientale de la rivière, Feric ordonna une courte halte et disposa ses chars en batterie. Sur son ordre, les chars tirèrent des obus à haut pouvoir explosif sur les tours de l’ancien pont, les réduisant en miettes et envoyant par le fond, dans les eaux répugnantes du Roul, le centre du tablier.

Puis, après réflexion, Feric ordonna de recharger les canons d’obus incendiaires, et de tirer une salve dans la jungle ; ainsi, lorsque la colonne reprit la route, fonçant vers le sud et vers son rendez-vous avec les arrières de la horde zind, elle laissait derrière elle un pilier de feu orange illuminant l’horizon là où se trouvait autrefois la poche d’irradiation et sa frayère obscène.

Les manifestations d’un important engagement se dévoilèrent à plus de quatre-vingts kilomètres de Lumb. Un flot de réfugiés s’écoulait vers le nord et l’ouest, telle une colonie d’insectes fuyant l’écrasement de leur nid, alors que la colonne piquait au sud vers la capitale, à trente kilomètres à l’est du Roul, à peu près parallèlement à son cours. Métis et mutants défiant toute description fourmillaient sur la route de Lumb, bloquant l’avance des troupes de choc de Heldon. Il eût été possible de se frayer par force un chemin dans cette masse malsaine, mais c’eût été retarder la marche, alors qu’à l’horizon, vers le nord, s’élevait un rideau de fumée déchiré çà et là d’éclairs de feu, et que l’artillerie grondait dans le lointain, témoignant que les forces de Waffing étaient entrées en contact avec l’ennemi ; en effet, les Wolacks ne disposaient pas d’une telle puissance de feu, et Zind n’aurait certainement pas employé le canon sur une telle échelle contre un ennemi aussi inexistant.

Feric dirigea donc la colonne S.S. à travers les champs insalubres, laissant la route engorgée de populace à trois kilomètres à l’est, car il fallait absolument arriver sur les lieux avant que le gros de la horde de Zind ait franchi la rivière ; sans quoi l’avantage serait perdu, l’armée de Waffing submergée et la colonne S.S. bloquée loin derrière les lignes sur un territoire conquis par Zind.

Le roulement lointain devint rapidement tonnerre : des éclairs rapprochés embrasaient distinctement le Sud, sur la rive ouest du Roul ; de surcroît, un incroyable crépitement de mitrailleuses faisait contrepoint au duel d’artillerie. Les troupes de Waffing combattaient les Guerriers de Zind à l’ouest de Lumb ; le seul problème était à présent d’évaluer l’effectif de la horde demeurée sur la berge orientale de la rivière. De cela dépendait l’Histoire du monde et la survivance du pur génotype humain.

Alors que la colonne s’approchait des faubourgs de Lumb, la marée de réfugiés se résorba entièrement, et toute cette zone apparut laminée par un piétinement géant ; preuve que la horde de Zind était passée par là, et depuis fort peu de temps, à en juger par ce que l’on voyait.

Feric disposa donc ses troupes en ordre de bataille. Lui-même et Best occupaient, bien entendu, le centre de la formation, soutenus par les cent motards d’élite S.S. à l’intérieur d’un carré de quatre chars. Derrière ce fer de lance, une ligne solide de tanks servait de bouclier à la formation principale de troupes de choc S.S. motorisées. D’autres tanks protégeaient les flancs de cette masse compacte d’hommes de fer et de machines d’acier. L’ordure zind ne pourrait pas détruire l’intégrité d’une force à ce point impénétrable !

Feric dégaina sa mitraillette et l’arma. Après un coup d’œil à Best, qui avait également mis son arme en batterie, il lui cria : « Vous allez avoir de l’action à revendre, Best ! » Ouvrant les gaz à fond, celui-ci répondit par un sourire et un puissant « Vive Jaggar ! » déclenchant un salut massif et spontané dans les rangs des troupes S.S., qui bondirent en avant pour plonger dans la bataille à cent kilomètres/heure.

Feric conduisit ses troupes par monts et par vaux, jonchés de cadavres de Wolacks dépecés ou à moitié dévorés par les nécrophages nauséeux de Zind. La puissante troupe de choc escalada une dernière pente, et Feric déboucha enfin dans la vallée qui menait à Lumb, et qui grouillait des armées de Zind.

Ludolf Best s’écria d’horreur en apercevant pour la première fois les Guerriers de Zind. Tout le fond de la vallée disparaissait sous les vastes formations de ces monstres hideux, dont la seule vue eût découragé le héros le plus résolu. Toutes ces machines à tuer protoplasmiques étaient de hideuses caricatures des formes humaines : plus de trois mètres de haut, avec des poitrines, des bras et des cuisses incroyablement massifs, alors que leurs têtes minuscules parvenaient tout juste à contenir leurs petits yeux rouges, leurs oreilles atrophiées et leurs bouches bavantes et sans lèvres. Ces créatures à têtes d’épingle se dressaient, entièrement nues, à l’exception de ceintures en cuir grossier où pendaient d’énormes massues libéralement enduites de fiente, d’ordures et de toutes sortes d’excréments. Détail horrible, chaque formation, forte de près de cinq cents de ces monstres, marchait en parfaite synchronisation avec les autres, et cela jusqu’au balancement de leurs bras gros comme des troncs, tenant des fusils dans leurs mains, à croire qu’ils étaient les rouages interchangeables d’une vaste machinerie de chair.