Voyant la terreur de Best, Feric le héla : « Des robots stupides, voilà ce qu’ils sont ! Beaucoup de muscles mais absolument pas de cervelles ! »
Feric, quant à lui, était loin d’être découragé à cette vision, car elle pouvait signifier que la moitié de la horde se trouvait de ce côté du Roul – son plan de détresse fonctionnait ! De surcroît, il n’ignorait pas que cette assemblée de Guerriers dépendait entièrement des Dominateurs qui la contrôlaient ; chaque formation synchronisée était en fait le groupe de dominance d’un seul Dom. Au combat, les Guerriers ne possédaient que de rudimentaires capacités de décision. Répartis dans la horde à intervalles plus ou moins réguliers avançaient d’immenses fourgons de guerre, des chariots à fond plat poussés par des équipes de mutants géants, qui n’étaient que cuisses et fesses énormes, surmontées de torses atrophiés pratiquement démunis de bras et de tête. Les plateaux de ces fourgons de guerre grouillaient de mutants ordinaires qui servaient mortiers et mitrailleuses ; pourtant, il y avait gros à parier que les contrôleurs doms s’y trouvaient cachés. De plus, il était fort probable que les huit lourds et encombrants cuirassés à vapeur, à l’arrière de la horde, abritaient les maîtres dominateurs de la horde entière – on pouvait faire confiance à un Dom pour cacher sa carcasse de lâche dans l’endroit le plus sûr ! Si l’on parvenait à les abattre, la horde tout entière se verrait jetée dans une confusion noire, sans chef et sans contrôle.
Avec un féroce cri de guerre, Feric entraîna la troupe S.S. au bas de la pente, en direction de la plus proche formation de Guerriers à plus de soixante kilomètres/heure. Il pressa la détente de sa mitraillette, envoyant une grande rafale de plomb meurtrier dans les rangs de l’ennemi ; à ce signal, chaque canon de char cracha ses obus à haute puissance ; ainsi la horde n’eut-elle pour toute sommation qu’une rapide série d’explosions qui projeta en l’air un millier de Guerriers en une pluie de fragments sanglants et fumants.
Un instant plus tard, Feric guidait son fer de lance de tanks et de motos vers cette trouée sanglante faite au flanc de l’ennemi. Les chars de Heldon tirèrent une nouvelle salve, cette fois à bout portant, et le mur de chair nue, velue et puante devant Feric explosa en une gerbe qui l’éclaboussa au passage de sang et de sanie. Alors seulement les canons de cuirassés à vapeur de Zind entrèrent en action, ouvrant un feu désordonné sur les arrières de la colonne helder. Des dizaines de machines furent volatilisées par les explosions, mais la précision des formations S.S. n’en fut pas troublée pour autant.
Quant aux esclaves de Zind, la surprise, la vitesse infernale et la puissance de feu foudroyante de l’attaque helder les avaient jetés dans la confusion, et la panique. Les cuirassés continuaient à bombarder les rangs helders, et, à cette distance, même les crapules qui servaient les pièces des Dominateurs ne pouvaient manquer leurs cibles, infligeant des pertes sensibles aux troupes helders. Mais alors que les formations de Guerriers poursuivaient stupidement leur marche vers Lumb, n’ayant pas encore opposé de défense cohérente au feu roulant des canons helders, les troupes de choc S.S. maintenaient leur discipline de fer face au bref barrage de feu de Zind.
Feric pénétra à toute vitesse dans la trouée effectuée dans les rangs ennemis par son artillerie, entraînant ses hommes droit sur les cuirassés de commandement.
Enfin, les Dominateurs contrôlant cette fraction de la horde parvinrent apparemment à se remettre du choc initial, car soudain, avec une précision effroyable et inhumaine, des milliers de Guerriers géants exécutèrent un demi-tour gauche parfait et s’ébranlèrent au pas de course droit sur le barrage de tanks helders, brandissant leurs énormes massues comme de gigantesques faux. Vague après vague, les Guerriers nus furent taillés en pièces ; mais si vaste était la horde, si infinies les réserves de chair à canon, que des milliers et des milliers de ces créatures déboulèrent de tous côtés sur les forces de Heldon, au travers du barrage des canons et des mitrailleuses, passant par la seule vertu de leur nombre.
Feric se trouva soudain bloqué par une ligne solide de monstres de trois mètres de hauteur, aux muscles massifs couverts de vermine, frappant au hasard l’air de leurs énormes massues, leurs yeux rouges vides et enflammés, la bave coulant sur leur menton, et qui couraient sur lui, portés par des jambes épaisses comme des colonnes de marbre. Feric brandit la Grande Massue de Held et se jeta en avant, faisant tournoyer l’arme mystique en moulinets meurtriers.
Une fantastique poussée d’énergie irradia son bras droit et emplit son corps d’une puissance infatigable et d’une force surhumaine. Le Commandeur d’Acier ne pesait guère plus qu’une plume dans sa main, et pourtant le premier coup qu’il assena frappa avec la puissance d’une avalanche, réduisant en miettes sanglantes les petites têtes de six Guerriers et précipitant dans la poussière leurs corps pantelants, dans un geyser de sang.
Une énorme ovation s’éleva derrière lui ; enflammée d’une ardeur héroïque par cet incroyable fait d’armes, l’élite des motards S.S., sous le commandement de Ludolf Best, plongea dans la mêlée aux côtés de son Commandeur Suprême. Bien que très nettement inférieurs en nombre, et opposés à des créatures bien plus grandes qu’eux, les fanatiques S.S. engagèrent le combat avec une rapidité et une fougue surhumaines, tombant sur les Guerriers à coups de massue, écrasant les jambes sous les roues de leurs engins, suivant de près Feric qui se frayait un chemin au cœur de la horde de Zind, l’irrésistible Commandeur d’Acier au poing.
Feric continuait à faucher les géants velus et trempés de sueur en grandes gerbes, frappant dans une forêt de jambes et abandonnant ensuite les créatures hurlantes et estropiées aux mains de ses troupes qui le suivaient, puis faisant volte-face pour broyer sous le poing de fer de la Grande Massue une dizaine de faces vidées de toute expression.
Même au corps à corps, les guerriers de Zind montraient une infime – pour ne pas dire nulle – initiative personnelle. Ils s’avançaient simplement, rang après rang, abattant leurs massues sur tout ce qui bougeait ; leurs gestes relevaient peut-être davantage de réflexes conditionnés que de tactiques individuelles. Pour chaque Guerrier abattu, un autre surgissait de la formation serrée, pièce de rechange de la grande machine à tuer protoplasmique qu’était la horde zind. Aussi la bataille prit-elle rapidement un tour irréversible. Conduite par Feric, la colonne helder plongeait dans la horde à toute vitesse, anéantissant tout sur son chemin, subissant cependant certaines pertes dues à la fatigue pure. Pour leur part, les Dominateurs envoyaient simplement, vague après vague, les Guerriers sur les assaillants helders ; leurs réserves semblaient infinies. Le massacre de Guerriers devint si épouvantable que l’avance de la force helder se trouva ralentie par le barrage de cadavres géants qui s’entassaient sur son chemin.
Bientôt, Feric se fraya un chemin à moins de cent mètres des cuirassés à vapeur, qui s’étaient formés en cercle défensif à l’intérieur d’une masse de Guerriers. Derrière lui venaient Best, puis les quatre tanks de tête et le corps d’élite S.S., leurs cuirs noirs rougis du sang des Guerriers. À l’arrière, la grande force de choc S.S. progressait au cœur de la horde en laissant dans son sillage une traînée sanglante de Guerriers morts.