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Feric s’interrompit à nouveau, en voyant l’éclat renaître dans les yeux de tous les auditeurs présents, techniciens et généralissimes. D’une vision de Jugement dernier, le peuple helder avait été transporté sur les ailes d’un rêve d’ultime gloire raciale. À présent, nul doute qu’il serait prêt à faire les sacrifices exigés par un tel dessein !

« Bien que les savants S.S. soient près de parfaire cette technique, de nouveaux efforts héroïques seront exigés des S.S. avant que la production d’une race supérieure de clones S.S. soit assurée. J’ai donc décidé, en tant que Commandeur Suprême, que chaque Helder devrait s’engager dans une action véritablement héroïque de nature à inspirer un fanatisme surhumain à ces savants, action dont l’échec entraînerait l’extinction totale de l’homo sapiens sur cette planète, et le succès, la création d’une race de Maîtres digne d’hériter à tout jamais de l’univers tout entier.

« Dans les trois mois qui viennent, tous les Helders seront dirigés vers les camps de sélection. Là, nous serons tous stérilisés et mis dans l’incapacité définitive de succomber à la vile tentation de propager par les moyens sexuels conventionnels nos gènes mutilés. Heldon produira une postérité de purs clones S.S., ou plus de postérité du tout ! Transcendance raciale ou mort raciale ! »

Le dos des généralissimes se raidit ostensiblement. Feric était convaincu que le peuple helder brûlait de la même résolution fanatique sur toute l’étendue du territoire car, et bien que les savants S.S. eussent en main la clef de la situation, il avait donné à chaque Helder survivant le moyen de contribuer héroïquement à la cause sacrée. La gloire du triomphe serait partagée entre tous !

« En gage de ma loyauté totale à la cause sacrée du Svastika et de la production d’une race supérieure S.S., je serai moi-même le premier à subir la stérilisation, suivi par mes généralissimes, les S.S. et le peuple de Heldon. Vive Heldon ! Vive la Victoire Finale ! Vive la Race Supérieure ! »

Les derniers mots s’éteignaient à peine sur les lèvres de Feric que Bogel, Remler, Waffing et Best claquèrent les talons avec une ardeur qui réussit à surprendre Feric, se figèrent au garde-à-vous avec une vigueur à se briser les reins, projetèrent leur bras en avant comme autant de pistons d’acier et crièrent « Vive Jaggar ! » avec une furie surhumaine, leurs yeux embrasés par la puissance transcendante de l’énergie raciale.

La ferveur du peuple helder se haussant à des sommets vertigineux de conscience raciale et de détermination inébranlable, le destin ne pouvait refuser à cette race de héros le succès et l’empire dus à une telle abnégation patriotique. Le peuple helder tout entier se rendit dans les camps de sélection sans même un murmure de protestation. En fait, le seul problème majeur qui surgit dans le processus de stérilisation résida dans la tendance du bon peuple helder à se battre et à se chamailler pour obtenir les meilleures places ; c’étaient d’ailleurs davantage des compétitions amicales de patriotisme que de véritables querelles, et les S.S. menèrent à bien leur tâche largement avant le terme de trois mois fixé par Feric.

Peu de temps après, Remler annonça en jubilant la production des premiers fœtus clones viables. Au bout de huit mois, ces spécimens expérimentaux arrivèrent à terme. Puis la première usine à clones fut terminée, et neuf mois plus tard, Feric, guidé par un Remler rayonnant, arrivait au Laboratoire de Reproduction Feric Jaggar pour assister en personne à la sortie de la première fournée de surhommes S.S. des bacs de clonage.

Cet édifice se réduisait à un immense cube d’un blanc immaculé orné de grands svastikas noirs sur chacune de ses faces. Passant devant la garde d’honneur S.S. figée au garde-à-vous, Remler conduisit Feric vers l’entrée principale et dans une longue et mystérieuse enfilade de salles, de chambres et de couloirs, uniformément recouverts de céramique blanche. Les murs aveuglants de blancheur reflétaient les élégants uniformes de cuir noir et les capes écarlates à croix gammée des grands techniciens S.S. blonds qui faisaient régner dans tous les recoins du laboratoire de reproduction une débauche d’activité, d’énergie et de détermination, tels de savants diacres dans le temple de la pureté raciale.

« On ne peut nier que cet endroit soit une ruche ! » s’exclama Feric, alors que Remler ouvrait une porte blanche et s’effaçait pour le laisser entrer dans l’une des salles à cuves. C’était une grande pièce rectangulaire aux murs blancs et au sol pavé de petits carreaux blancs, chacun frappé d’un svastika noir miniature. Elle était presque entièrement occupée par une succession de rangées de bacs de porcelaine, en tout deux cents. Devant chaque cuve, une console en porcelaine blanche abritait pompes, instruments divers et autres dispositifs médicaux ; dans chaque cuve, un géant blond de deux mètres flottait dans un liquide nutritif ambré, les yeux clos sur un sommeil béat.

Pour l’occasion, une caméra de télévision avait été installée face à la première rangée ; devant ces vingt matrices de porcelaine, vingt savants S.S. grands et blonds, en uniforme noir, cape écarlate à croix gammée et hautes bottes noires, observaient un garde-à-vous parfait.

Lorsque Feric pénétra dans la pièce, ces magnifiques spécimens exécutèrent avec ensemble le salut du Parti et crièrent « Vive Jaggar ! » avec vigueur. Feric rendit le salut puis se dirigea à grands pas vers le micro installé face aux cuves.

« Amis Helders, dit-il, le regard rivé aux vingt héros S.S., dont les yeux étincelaient comme des billes d’acier bleu, signe de leur triomphe, aujourd’hui, enfin, nous allons assister à l’apparition du premier représentant de la nouvelle race supérieure engendré par les cuves du premier laboratoire de reproduction à avoir une production ininterrompue et massive de pur-sang S.S. Ces magnifiques spécimens, cultivés uniquement à partir des tissus de la crème génétique S.S., vont surgir à la vie à l’état adulte, dotés d’un physique de dieu et d’esprits tranchants comme des rasoirs, et n’exigeront guère plus de six mois d’instruction intensive et d’endoctrinement pour prendre leur place de membres à part entière des S.S. et de Heldon. »

Les yeux des savants S.S. lancèrent des éclairs de fanatisme ; Feric les gratifia d’un regard aussi fanatisé avant de poursuivre.

« Dans six mois, dix autres laboratoires de reproduction seront devenus opérationnels ; à la fin de l’année prochaine, il y en aura vingt-quatre, produisant chaque année un million de pur-sang S.S… et dans cinq ans Heldon pourra produire le total stupéfiant de dix millions de surhommes S.S. ! Cela constitue une capacité de production suffisante pour repeupler en vingt ans toute la terre habitable. Aujourd’hui, nous entamons le repeuplement avec les surhommes génétiques dont l’humanité rêve depuis mille ans, et une race supérieure qui poursuivra son ascension vers de nouveaux sommets de pureté génétique et d’évolution éclatante, puisque sa reproduction s’opérera exclusivement selon les principes eugéniques les plus stricts, sous le contrôle rigoureux des laboratoires de reproduction, sans laisser aucune part aux divagations du hasard.