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Geary lut les données relatives à l’impact. « Et peut-être aussi le sol trembler. Chaque fois que nous avons eu l’impression que tout était paisible dans ce système, les Syndics nous préparaient un mauvais coup. Que négligeons-nous cette fois ? »

Desjani eut une moue pensive. « Les fusiliers vérifient que les prisonniers n’ont pas été exposés à des agents biologiques avec effet retard. Normalement, les détenus auraient dû repérer toute chose enterrée dans le camp. En dehors de quelques cargos, les seuls vaisseaux du Syndic présents dans ce système sont les trois groupes d’avisos que nous avons traqués après notre arrivée, tous à plus d’une heure-lumière. Je leur aurais prêté volontiers l’intention de faire sauter cette planète dans l’espoir de nous massacrer avec, mais ils ne disposent pas des armes qui le leur permettraient. »

Une fenêtre s’ouvrit brusquement sous les yeux de Geary et l’image de Carabali le salua. « J’envoie la principale force de débarquement, capitaine Geary. Aucune menace détectée. » Sur son écran, il vit l’essaim de navettes atterrir, dont un grand nombre juste à la lisière du camp pour disposer d’une place suffisante. Des fusiliers s’en déversaient, donnant, dans leur cuirasse de combat, une rassurante impression d’efficacité et de dangerosité.

Pourtant, Geary trouvait ce spectacle inquiétant. Presque tous les fusiliers de la flotte étaient à terre. S’il leur arrivait quelque chose, il perdrait une bonne partie de son aptitude au combat, ainsi que les éléments les plus fiables et disciplinés de la flotte. Une seconde plus tard, il se fustigeait lui-même d’avoir envisagé leur perte en ces termes au lieu d’y voir la mort d’un grand nombre de braves soldats.

La coprésidente Rione avait l’air de partager ses inquiétudes. « Ça me paraît un peu trop facile après toutes les vacheries que nous avaient préparées les Syndics dans ce système. »

Il hocha la tête. « Mais il n’y a rien dans le camp. Les prisonniers affirment l’avoir fouillé et, s’il avait recelé quelque chose d’anormal, ils l’auraient vu. »

Le colonel Carabali rendit de nouveau compte. « Nous avons investi le bâtiment de la banque de données et nous inspectons les dossiers. Tous les prisonniers sont équipés d’un implant relié à un système de repérage et à un mur virtuel du camp qui prohibe toute incursion dans ses zones interdites. Nous nous employons actuellement à désactiver ces implants et ce barrage.

— Parfait. » Les yeux de Geary se reportèrent sur l’hologramme. « Une fois ce mur virtuel abattu, ils pourront quitter l’enceinte du camp et monter à bord des navettes, fit-il observer à Desjani.

— Malédiction ! »

Choqué par cet éclat intempestif et bien peu typique de Rione, Geary pivota sur son siège. Elle montrait les écrans. « Hors du camp, capitaine Geary. Vous cherchez tous une menace à l’intérieur, mais la plupart de vos navettes sont dehors ! »

En comprenant ce qu’elle voulait dire, il sentit ses tripes se nouer. Il pressa quelques touches pour rappeler Carabali. « Hors du périmètre du camp, colonel ! Les prisonniers n’ont pas pu fouiller là-bas puisqu’ils ne pouvaient s’y rendre. Nous-mêmes avons concentré nos recherches sur le camp. Mais de nombreuses navettes ont atterri derrière et l’on y ramènera des détenus libérés. »

Carabali grinça des dents. « Compris. » Geary vit s’allumer la diode du réseau de commandement, tandis que fusaient les ordres du colonel Carabali à ses fusiliers. Les unités qu’on avait envoyées sécuriser un large périmètre entreprirent de se replier puis se redéployèrent pour se partager des secteurs de recherches, tandis que quelques-unes de celles qui étaient entrées dans le camp en sortaient pour fouiller le voisinage.

« Nous aurions sûrement détecté des engins nucléaires, déclara Desjani d’une voix courroucée.

— Ouais, convint Geary. Mais on a pu y enterrer autre chose.

— Nous avons trouvé des mines à retardement, leur apprit Carabali d’une voix glacée. Un mélange de chandelles à fragmentation et d’engins chimiques. Ce sont d’anciens modèles, néanmoins difficilement détectables, au point que nous ne les aurions jamais repérées si nous n’avions pas effectué un balayage de cette zone. Mes experts en explosifs affirment qu’elles sont sans doute réglées pour exploser dès qu’elles détectent une présence humaine à proximité. Nous nous servons d’impulsions électromagnétiques pour griller leurs mécanismes de déclenchement et les neutraliser.

— Et plus loin ? s’enquit Geary.

— On est en train de scanner. » Le calme professionnalisme de Carabali était empreint d’une infime touche de fureur. « Je vous fournirai un rapport circonstancié sur mon échec à prévoir et identifier la menace, afin de vous permettre de prendre toutes les mesures disciplinaires à mon encontre qui vous paraîtront appropriées, capitaine. »

Geary ne put retenir un soupir, tout en surprenant fugacement, du coin de l’œil, le visage désormais impavide de la coprésidente Rione. « Merci, colonel, mais nous sommes passés à côté, nous aussi, et nous partageons les mêmes torts. Vous pouvez être reconnaissante à la coprésidente Rione d’avoir deviné à temps.

— Présentez-lui mes respects, s’il vous plaît, et remerciez-la de ma part, capitaine. » Cette fois, le ton de Carabali n’était pas exempt d’une certaine ironie.

Geary se tourna vers Rione. « Vous avez entendu ? »

Elle se contenta d’incliner affirmativement la tête. « J’ai l’habitude de peser les mots. L’esprit tordu d’un politique trouve parfois son utilité, n’est-ce pas, capitaine ?

— Effectivement », convint-il. Il constata que Desjani souriait aussi et comprit que son opinion de Rione, ou plutôt de sa valeur, avait grimpé d’un bon cran.

« Nous avons pu comparer le nombre des prisonniers aux données du Syndic, annonça Carabali. Mes hommes filtrent à présent les ex-prisonniers et ils commenceront à les embarquer à bord des navettes dès que la zone sera déclarée sûre. » Geary tapa sur une commande et une projection de toute la surface de Sutrah Cinq apparut. Les cibles identifiées émaillaient toute la carte. Il zooma sur le plus gros amas : la vue se modifia instantanément, montrant les images réelles du site. Au cours des dernières décennies, la population de la capitale de la planète s’était considérablement amoindrie. La plupart des sites industriels ciblés étaient froids et désaffectés depuis beau temps. Le spatioport était déglingué et décrépit. Lorsqu’il inspecta d’autres cibles, la raison pour laquelle les Syndics avaient pris le risque d’un bombardement de représailles sur cette planète lui sauta aux yeux. Elle correspondait exactement à ce que les dirigeants des Mondes syndiqués appelleraient sans doute un « surplus de liquidation », privé de ressources et de toute valeur industrielle ou militaire digne de ce nom. Sauf que cent mille êtres humains au bas mot s’efforcent encore d’en tirer leur subsistance. « Capitaine Desjani, avons-nous des données tactiques sur Sutrah Quatre ? »

Desjani ne parvint pas à réprimer parfaitement un sourire féroce lorsqu’elle les lui fournit. Il les étudia et constata que la quatrième planète du système semblait bien mieux se tirer d’affaire que sa sœur. D’accord. Nous ne pouvons pas permettre aux Syndics de s’imaginer qu’ils vont s’en sortir sans dommages. Mais je ne tiens pas à massacrer des civils, ce qu’ils espèrent sans nul doute, car ça leur ferait de l’excellente propagande. Il marqua les grands spatioports de Sutrah Quatre, sa vaste base militaire, le centre du complexe gouvernemental de la capitale et, pour faire bonne mesure, toutes les installations orbitales. Puis il revint à l’hologramme de Sutrah Cinq et marqua le plus important de ses spatioports ainsi que les zones industrielles encore en activité.