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Il ne rirait plus, en ce moment.

Jon avait perdu assez de temps ici. « Je suis désolé de vous avoir dérangée, Votre Grâce. La Garde de Nuit va s’occuper de cette affaire. »

Les narines de la reine se dilatèrent. « Vous avez l’intention de chevaucher quand même vers Durlieu. Je le lis sur votre visage. Qu’ils meurent, ai-je dit, et vous persistez dans cette grande folie. Ne le niez pas.

— Je dois agir comme il me paraît préférable. Avec tout le respect que je vous dois, Votre Grâce, le Mur m’appartient, et, de même, cette décision.

— C’est exact, admit Selyse, et vous en répondrez au retour du roi. Ainsi que d’autres décisions que vous avez prises, je le crains. Mais je vois que vous êtes sourd au bon sens. Faites ce que devez. »

Ser Malegorn éleva la voix. « Lord Snow, qui mènera cette patrouille ?

— Vous proposeriez-vous, ser ?

— Ai-je l’air si sot ? »

Bariol se leva d’un bond. « Moi, je mènerai ! » Ses grelots tintèrent joyeusement. « Nous marcherons dans la mer et en ressortirons. Sous les vagues, nous chevaucherons les hippocampes, et des sirènes souffleront dans des conques pour annoncer notre arrivée, oh, oh, oh. »

Tout le monde éclata de rire. Même la reine Selyse se permit un mince sourire. Jon s’en amusa moins. « Je ne demanderai jamais à mes hommes d’accomplir ce que je ne pourrais faire moi-même. J’ai l’intention de prendre la tête de la patrouille.

— Quelle hardiesse, commenta la reine. Nous vous approuvons. Ensuite, un barde composera sans doute sur vous une exaltante ballade, et nous aurons un lord Commandant plus circonspect. » Elle but une gorgée de vin. « Passons à d’autres sujets. Axell, ayez donc l’amabilité de faire entrer le roi sauvageon.

— À l’instant, Votre Grâce. » Ser Axell franchit une porte et revint un instant plus tard avec Gerrick Sangderoi. « Gerrick de la maison Barberouge, annonça-t-il. Roi des Sauvageons. »

Gerrick Sangderoi était un homme de grande taille, long de cuisse et large d’épaule. La reine l’avait habillé de vieux vêtements du roi, apparemment. Nettoyé et peigné, accoutré de velours verts et d’une aumusse en hermine, ses longs cheveux roux lavés de frais et sa barbe ardente taillée et raccourcie, le sauvageon avait toutes les apparences d’un roi sudier. Il pourrait entrer dans la salle du trône à Port-Réal, sans que nul sourcille, jugea Jon.

« Gerrick est le roi véritable et légitime des sauvageons, déclara la reine, descendant par les mâles en ligne ininterrompue de leur grand roi Raymun Barberouge, alors que l’usurpateur Mance Rayder était né d’une roturière, et engendré par un de vos frères noirs. »

Non, aurait pu corriger Jon, Gerrick est né d’un frère cadet de Raymun Barberouge. Pour le peuple libre, cela comptait à peu près autant que de descendre du cheval de Raymun. Ils n’y connaissent rien, Ygrid. Et, ce qui est pire, ils n’apprendront jamais.

« Gerrick a eu la bonté d’accorder la main de sa fille aînée à mon bien-aimé Axell, afin qu’ils soient unis par le Maître de la Lumière en noces sacrées, annonça la reine Selyse. Ses autres filles se marieront en même temps – sa cadette avec ser Brus Buckler, et la benjamine avec ser Malegorn de Pourprétang.

— Sers. » Jon inclina la tête en direction des chevaliers en question. « Puissiez-vous trouver le bonheur avec vos promises.

— Sous la mer, les hommes épousent les poissons. » Bariol exécuta un petit pas de danse, en agitant ses clochettes. « Que oui, que oui, que oui. »

La reine Selyse renifla de nouveau. « On célèbre quatre mariages aussi aisément que trois. Il est grand temps que cette Val s’établisse, lord Snow. J’ai décidé qu’elle épouserait mon brave et féal chevalier, ser Patrek du Mont-Réal.

— A-t-on prévenu Val, Votre Grâce ? s’enquit Jon. Chez le peuple libre, quand un homme désire une femme, il l’enlève et prouve de cette manière sa force, sa ruse et son courage. Le prétendant court le risque d’une féroce rossée si la famille de la femme le surprend, et de pire que cela, si elle-même ne le juge pas digne.

— Coutume de sauvages », jugea Axell Florent.

Ser Patrek se borna à glousser. « Aucun homme n’a jamais eu motif de douter de mon courage. Aucune femme ne le fera jamais. »

La reine Selyse avança les lèvres en cul de poule. « Lord Snow, puisque lady Val est étrangère à nos coutumes, veuillez me l’envoyer, que je puisse l’instruire des devoirs d’une noble dame envers le seigneur son époux. »

Voilà qui va donner des merveilles, je le sens. Jon se demanda si la reine serait toujours aussi impatiente de voir Val épouser un de ses propres chevaliers si elle connaissait les sentiments de Val vis-à-vis de Shôren. « Comme vous le désirez, répondit-il, bien que, si je puis parler librement…

— Non, je ne crois pas. Vous pouvez nous laisser. »

Jon Snow plia le genou, inclina la tête et se retira.

Il descendit les marches deux par deux, saluant en route d’un signe de tête les gardes de la reine. Sa Grâce avait posté des hommes sur chaque palier pour la préserver des sauvageons meurtriers. À la moitié de l’escalier, une voix l’appela d’en haut. « Jon Snow. »

Jon se retourna. « Lady Mélisandre.

— Nous devons parler.

— Vraiment ? » Je ne crois pas. « Madame, mes devoirs m’appellent.

— C’est de ces devoirs que je voudrais vous parler. » Elle entama la descente, le bord de ses robes écarlates se balançant par-dessus les marches. On aurait dit qu’elle flottait. « Où est votre loup géant ?

— Il dort dans mes appartements. Sa Grâce n’autorise pas Fantôme en sa présence. Elle affirme qu’il effraie la princesse. Tant que Borroq et son sanglier sont dans les parages, je ne puis le laisser divaguer. » Le change-peau devait accompagner Soren Fend-l’Écu à La Roque une fois que les chariots transportant à Verposte le clan Écorchephoque seraient revenus. En attendant, Borroq avait établi sa résidence dans une des anciennes tombes jouxtant le cimetière du château. La compagnie d’hommes depuis longtemps morts semblait lui convenir davantage que celle des vivants, et son sanglier paraissait fort aise de fouir entre les tombeaux, bien à l’écart des autres bêtes. « Cette créature a une taille de taureau et des défenses aussi longues que des épées. Fantôme s’en prendrait à lui s’il était libre, et l’un ou les deux ne survivraient pas à la rencontre.

— Borroq est le moindre de vos soucis. Cette patrouille…

— Un mot de vous aurait pu convaincre la reine.

— Selyse a raison sur ce point, lord Snow. Qu’ils meurent. Vous ne pouvez les sauver. Vos vaisseaux sont perdus…

— Il en demeure six. Plus de la moitié de la flotte.

— Vos vaisseaux sont perdus. Tous. Pas un homme ne reviendra. J’ai vu cela dans mes feux.

— Vos feux ont déjà pu mentir.

— J’ai commis des erreurs, je l’ai reconnu, mais…

— Une fille grise sur un cheval agonisant. Des poignards dans le noir. Un prince promis, né de la fumée et du sel. Vous ne commettez que des erreurs, ce me semble, madame. Où est Stannis ? Qu’en est-il de Clinquefrac et de ses piqueuses ? Où est ma sœur ?