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— Voulez-vous que je lui administre un calmant ?

— Non, c'est inutile, merci beaucoup. Je vais rester avec lui jusqu'à ce qu'il retrouve son calme. Je dois bien ça à son père…

— N'hésitez pas en cas de besoin.

— Vous êtes adorable, encore toutes nos excuses pour le dérangement. Ne vous en faites pas, je vais le gérer. Et si vous trouvez une vache dans le couloir, merci de nous la ramener !

L'infirmière pouffe. Victor la raccompagne jusqu'à la porte qu'il referme derrière elle.

La vache réapparaît, mais cette fois tout près de lui. Martial est terrifié.

— Ne me tuez pas ! supplie-t-il.

Victor s'approche.

— Les vaches ne tuent pas, tête de nœud, sauf si tu es une appétissante petite fleur. Es-tu une appétissante petite fleur ?

— Non, non, je ne suis pas une appétissante petite fleur !

Martial secoue la tête avec frénésie. Il est en sueur, mûr pour l'estocade.

— Es-tu décidé à payer ?

— D'accord, je vais casquer.

— 30 000 ?

— Pas de problème.

— Dès ta sortie ?

— Dès demain. Mais après, vous me foutez la paix.

— Tu sais ce que tu risques si tu essaies de nous doubler ?

La vache joue avec sa seringue, sans doute par pure méchanceté. Les vaches ont aussi un côté sombre. Martial ne la quitte pas des yeux.

— Vous aurez votre blé, juré.

Il ose enfin regarder Victor.

— Vous me laisserez vraiment le reste ?

— Parole d'herbivore.

La vache danse en se frottant la panse. Ça en fait du foin…

76

Nouvelle pièce, nouvelle coiffure. Maximilien ne sait rien du spectacle ni du rôle qu'il y tiendra, mais cela ne l'empêche pas de se chercher déjà une nouvelle tête. Devant le miroir de sa loge, Annie l'aide de bonne grâce dans ses multiples tentatives. Ils ont déjà vidé un pot complet de gel à force d'essais en tous genres. Malheureusement, rien ne le satisfait. Il s'agace :

— Non, pas comme ça ! Il faut plus de mouvement.

— Il faudrait surtout plus de cheveux ! rétorque la coiffeuse, qui a pratiquement épuisé toutes ses possibilités.

Maximilien se décoiffe vigoureusement.

— On recommence à zéro.

— Pourquoi ne pas tenter une couleur ? Je te parie qu'en blond platine, tu serais très bien.

Juliette entre dans la loge, aussitôt suivie de Céline. Annie les salue et ne semble pas surprise de leur arrivée. Au contraire, sa réaction contenue laisse supposer qu'elle les attendait. Les trois femmes échangent un regard entendu, et la coiffeuse complice récite alors le prétexte qu'elle s'est inventé pour leur laisser le champ libre.

— Excuse-moi, Max ! J'ai complètement oublié que j'avais un coup de fil important à passer. Je vous abandonne quelques minutes et je reviens.

Mimant des applaudissements silencieux, les deux amies la félicitent discrètement pour son talent de comédienne. Annie disparaît, prenant soin de tirer la porte derrière elle.

En séducteur patenté, il ne faut à Maximilien que deux mouvements de la main pour retrouver une coiffure impeccable.

— Hello les filles ! Alors, quoi de neuf ? Vous qui êtes dans le secret de l'Olympe, l'écriture avance bien ?

Céline confirme :

— L'ensemble prend tournure.

— Un petit scoop concernant mon rôle ? Est-ce que je chante ? M'a-t-on prévu un numéro spécial ?

— Eugénie t'en parlera le moment venu, répond Juliette.

— Quelle femme extraordinaire. Ce n'est plus une gardienne, c'est un ange gardien ! Je la découvre chaque jour davantage et je n'en finis pas de fondre devant tant de charme.

Les deux visiteuses encadrent le comédien qu'elles regardent dans le miroir. L'homme se lisse les tempes, perdu dans sa propre contemplation.

— C'est justement d'Eugénie que nous sommes venues te parler, précise Céline.

— Avec plaisir !

— Enfin, plutôt de vous deux…, renchérit Juliette.

— Encore mieux ! Elle vous envoie planifier des séances de travail privées ?

— Pas exactement, rectifie la couturière. En fait, ce serait même l'inverse.

La chorégraphe attaque :

— Tu es un très bon acteur, Max, et tout le monde t'apprécie. Ceci étant précisé, nous savons également à quel point ton besoin de séduire est compulsif.

Max se renfrogne :

— « Compulsif », quel vilain mot. Gardons cela pour les maladies. Je suis simplement amateur des plaisirs de la vie et des jolies créatures…

— Appelle ça comme tu veux, il ne s'agit pas de te vexer mais de pointer une réalité. Nous avons toutes, à des degrés divers, fait l'expérience de tes assiduités. Ce théâtre est un peu comme une basse-cour dont tu serais le coq…

Maximilien, déstabilisé par la tournure du propos, tente de se défendre :

— Je m'insurge, vous me caricaturez. Je vous respecte toutes, et prétendre le contraire est une contrevérité !

Juliette s'adresse à Céline comme s'il n'était pas là :

— Tu ne trouves pas que pour les scènes d'indignation, Natacha est bien meilleure ?

— Indéniablement.

Maximilien est outré. Céline reprend :

— Nous ne venons pas pour faire des histoires, Max, mais pour en éviter. Ton côté « macho tombeur » fait partie de ton charme et nous nous en accommodons. Vis-à-vis d'Eugénie, c'est un peu différent. Il n'a échappé à personne que tu lui tournes autour. Elle est dans ta ligne de mire depuis un bon moment.

— C'est complètement…

Céline le coupe :

— Max, pour une fois, tais-toi et écoute. C'est sérieux. Si nous sommes ici, c'est parce que nous pensons nécessaire de t'ouvrir les yeux avant qu'une catastrophe ne survienne. Eugénie t'apprécie et t'admire…

— C'est vrai ? Elle m'admire ?

— Attends la suite. Comme nous toutes, elle est parfaitement consciente du petit numéro que tu joues à chacune de nous. Tu es une vedette et cela fait partie de ton jeu. Mais exceptionnellement, on va te demander de te tenir à bonne distance d'Eugénie. Parce qu'elle n'est pas armée face à toi. Elle n'a pas l'expérience. Elle n'a finalement fréquenté qu'un seul homme et, par chance pour elle, ce n'est pas une crapule. Elle ne connaît pas l'étendue de vos talents lorsqu'il s'agit d'accumuler les conquêtes… De plus, elle est actuellement sous une pression qui la fragilise. Elle traverse une période cernée de tellement de doutes qu'elle pourrait, par faiblesse, céder à ta bien séduisante tentation…

Juliette souligne :

— Eugénie a la chance de vivre une histoire qui dure. Si un jour, elle veut y mettre un terme, ce sera son choix mais pour le moment, elle n'en a pas manifesté l'intention. Elle n'est pas libre, Max. De plus, Victor est un type remarquable qui ne s'en remettrait pas. Si elle se concrétisait, ta petite aventure de pacotille ferait d'énormes dégâts. Pas question de foutre en l'air ce que ces deux-là partagent pour une passade.

Devant des arguments aussi directs, Maximilien chancelle.

— Comment pouvez-vous me prêter de pareilles intentions ?

Juliette lui fait face.

— Ne joue pas les innocents, Max. Tu sais très bien de quoi il est question. Tu viens d'interpréter une histoire d'adultère pendant des mois…

— Le lien particulier qui existe entre Eugénie et moi ne vous regarde pas.

— Mauvaise réponse ! tranche Céline. On est tous sur le même bateau. Si tu déséquilibres celle qui tient le cap, on coule. Elle a autre chose à faire que de jouer à bisou-bisou pour enrichir ton tableau de chasse.