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On a vu une photo de lui au téléjournal.

On disait qu'il avait été assassiné. As­sommé avant d'être jeté à la mer.

Il était policier. Enquêtait sur le trafic de crack.

— J'avais raison! ai-je clamé. Il ne s'é­tait pas noyé!

— Ça ne change rien, a fait mon cousin. Il est mort...

— C'est dégueulasse! Mourir pour cette merde de crack!

— Et ça arrivera à bien des jeunes de votre âge, a fait grand-papa. Je suis content que vous n'y touchiez pas!

— Jamais! ai-je dit vivement. Pauvre Dan! Il faut arrêter son meurtrier.

Grand-papa et grand-maman ont échangé un regard inquiet:

— Ça ne te concerne pas, Natasha... C'est le travail des policiers. Ils feront l'im­possible pour découvrir qui a tué leur col­lègue.

J'ai approuvé de la tête, mais j'étais dé­cidée à poursuivre mon enquête. En obser­vant John, puisqu'il nous avait proposé du crack. En filant Flash-Fluo.

Et en questionnant Jeremy.

Jeremy. Qui était recherché par la police! Oh non! Ça ne pouvait pas être lui, le cou­pable! Il avait dit qu'il était un ami de Dan. M'avait-il menti? Il fallait absolument que je lui parle. Sans témoin. Mais, pour ma sé­curité, dans un endroit public! Même si je le trouvais beau, je n'oubliais pas quelques règles élémentaires de prudence. Plus facile à dire qu'à faire.

Tandis que je retournais toutes ces ques­tions dans ma tête, mon cousin organisait la soirée du lendemain: nos grands-parents nous mèneraient à l'hôtel, d'où nous revien­drions le lendemain, après avoir fêté toute la nuit.

— Vous serez peut-être fatigués?

— Non, non, nous sommes habitués... a commencé Pierre.

— Vraiment? a dit grand-maman.

— C'est-à-dire qu'on veille toujours le soir du réveillon, ai-je ajouté aussitôt.

Inutile de leur apprendre que nous nous couchions toujours très tard quand Pierre et moi étions ensemble; nous bavardions sou­vent jusqu'aux petites heures du matin!

— Nous avons quelques achats à faire pour demain, a dit grand-papa. Je suppose que vous passerez l'après-midi sur la plage?

— Oui, s'est empressé de répondre Pierre. Il fait si chaud!

Et même s'il avait fait très froid, il y se­rait sûrement allé, puisqu'il devait y retrou­ver Maia.

En nous rendant à la plage, j'ai demandé à mon cousin de se renseigner auprès de Maia au sujet du crack. Elle avait l'air de s'y intéresser et de bien connaître John, qui, lui, en savait sûrement long...

— Justement, j'aimerais mieux pas, a dit Pierre.

— Mais...

— Je n'ai pas envie de parler de ça avec Maia, car je voudrais qu'elle oublie la pro­position de John.

— Mais John, lui? Tu pourrais peut-être lui parler?

— Non! Je ne veux pas me mêler de ça, Nat.

— On t'a proposé une nouvelle fois d'en prendre?

— Oui.

— Et?

— J'ai refusé. Mais Maia en avait envie. Elle dit qu'elle connaît des tas de gens qui en prennent, et que ce n'est pas si dange­reux.

— Ça l'a été pour Dan, en tout cas. Mais si tu t'en fiches...

— Ça ne le ressuscitera pas que je discu­te avec John! Je suis certain que Dan préfé­rerait qu'on reste en dehors de cette histoire. Et puis, réfléchis un peu. T'imagines-tu que John va me dire avec un grand sourire: «Qu'est-ce que tu veux savoir? Je suis prêt à répondre à toutes tes questions.»

— Il pourrait te dire comment il se pro­cure le crack!

— Et sous quel prétexte je lui en parle­rais, alors que je refuse d'en consommer? Non, oublie tout ça...

Tandis qu'il retrouvait sa précieuse Maia, je me promenais sur la plage. Je l'ai arpen­tée tout l'après-midi en pure perte; Jeremy était invisible.

J'avais envie de pleurer, car sa disparition accentuait mes soupçons à son égard. S'il n'avait rien fait de vraiment grave, pour­quoi se cachait-il donc? Avait-il deviné que je devinerais tout? John était aussi absent, pourquoi? Pourquoi? Pour nuire à Jeremy? Mon coeur s'affolait: et s'il était en danger? J'errais sur la grève comme une âme en peine à me torturer l'esprit inutilement, mais je ne pouvais m'en empêcher.

Et Flash-Fluo? Où était-il donc passé, celui-là? Dès que j'avais décidé de l'es­pionner, il m'avait échappé. J'avais honte, j'étais vraiment minable comme détective!

Et pas tellement mieux comme nageuse: je m'étais étouffée deux fois en me baignant; c'est à croire que je savais à peine barboter! De ce côté, il valait mieux que Jeremy soit absent et ne me voie pas me ridiculiser.

Je suis sortie de l'eau aussi dignement que je le pouvais, mais j'avais l'impression qu'avec une méduse sur le crâne, je ne me serais pas fait moins dévisager. Je devais être aussi rouge que les filles du Lac-Saint-Jean qui s'étaient trop fait bronzer la veille. Des crevettes, voilà à quoi on ressemblait! Question séduction, Maia nous battait am­plement.

Evidemment, je n'avais pas revu mon cousin de l'après-midi. Les amoureux s'é­taient isolés au bout de la plage, espérant y être plus tranquilles. Ce n'est pas moi qui irais les déranger. Même si je m'embêtais un peu. J'aurais souhaité un peu plus d'action.

Mon voeu allait se réaliser!

Pas plus tard qu'à la fin de l'après-midi. Au moment où j'allais m'acheter de la crème glacée au chocolat, ma préférée. Je quittais le bar laitier, après avoir fait la queue pendant au moins dix minutes telle­ment il y avait du monde, en tenant mon cornet au-dessus de ma tête pour être cer­taine que personne ne l'écraserait. Tout à coup, j'ai senti une secousse très nette contre mon épaule.

Je n'ai même pas eu le temps de com­prendre qu'on me volait, qu'un type en pa­tins à roulettes s'éloignait à toute vitesse avec mon appareil photo!

Et ce n'est que beaucoup trop tard que j'ai crié: «Au voleur!»

Je n'ai même pas essayé de le rattraper. Je suis restée sur place, avec la glace au chocolat qui dégoulinait sur ma main droite. Des gens me parlaient tous en même temps:

— Call the policeman!

— Ifs not thefirst timel

Je répondais «y es, y es», mais je ne bou­geais pas davantage, interdite. Comment avait-on osé me voler mon appareil photo? C'était trop injuste! C'était la pire journée de mon existence: d'abord la mort de Dan, puis la trahison de Jeremy, la défection de mon cousin et puis ce vol! J'aurais mieux fait de rester à Montréal!

— Veux-tu porter plainte? a dit quel­qu'un à côté de moi en français.

— Quoi?

— Tu te souviens de moi? On s'est vus ce matin avec les policiers.

Flash-Fluo! Qui s'offrait encore à parler aux flics pour moi. Décidément, il était toujours présent quand je devais discuter avec les représentants de la justice... Alors qu'il avait disparu toute la journée.

— Alors?

— Ça ne servira à rien. Le voleur est déjà bien loin. C'est un champion en patins à roulettes!

— Tu l'as reconnu?

— Mais non! Si je l'avais reconnu, je saurais qui c'est et je pourrais le dénoncer!

Flash-Fluo s'est gratté la tête d'un air in­décis:

— Tu devrais tout de même porter plain­te. On peut y aller ensemble, si tu veux.

Ce type était vraiment très serviable. Trop! Je n'avais pas oublié comment je m'étais fait piéger par un certain Ralph*, quand j'avais fugué. Il était comme Flash-Fluo: hyper gentil, secourable, protecteur. Et c'était pour mieux m'emberlificoter! Une fois suffisait!

— Merci, je préfère laisser tomber.

— On pourrait peut-être retrouver ton appareil? Si tu ne déposes pas de plainte, les policiers ne pourront jamais te le rendre.

— Mais pourquoi l'aurait-on volé pour s'en débarrasser ensuite? Le voleur reven­dra l'appareil ou l'utilisera lui-même. C'est logique.

Flash-Fluo admit que j'avais raison. Mais moi, je savais que le voleur pouvait avoir une autre raison de me piquer mon appareiclass="underline" le film l'intéressait peut-être.