Выбрать главу

La grosse formation syndic passa trop vite pour que les sens de Geary eussent le temps d’enregistrer quelque chose, mais son écran afficha rapidement une réactualisation de la situation, à mesure que les senseurs de la flotte évaluaient les conséquences de la passe d’armes. Un marqueur « HS » signalait que tous les systèmes du croiseur de combat syndic étaient morts, et les vigies de l’Indomptable énuméraient déjà à haute voix les avaries causées par la piètre défense ennemie : « Une lance de l’enfer a frappé un bouclier de proue. Aucun dommage. Le Risque-tout rend compte de deux frappes. Aucun dommage. Idem pour le Victorieux.

— C’est trop facile, grommela Desjani.

— Vous aurez droit à un combat plus égal avec ces deux cuirassés, lui affirma Geary.

— C’est vrai. » Le visage de Desjani s’éclaira et elle se concentra sur les deux prochaines cibles de son vaisseau.

Quelque cinq minutes plus tard, la sixième division de croiseurs de combat fondait sur la Flottille sacrifiée. Il ne restait plus au capitaine Badaya que l’Illustre et l’Incroyable, mais ils suffirent amplement à balayer les deux croiseurs lourds ennemis blessés, seuls vaisseaux de guerre de la Flottille sacrifiée dont les armes étaient encore opérationnelles. Alors que les deux croiseurs de combat de l’Alliance faisaient voler ces deux bâtiments en éclats, les vaisseaux ennemis vomirent un ultime essaim de capsules de survie, indiquant que leurs derniers spatiaux les abandonnaient maintenant que tout espoir de résister était perdu.

« Ils ne font pas non plus exploser leurs réacteurs, fit remarquer Rione.

— Non, convint Geary. Même logique que pour leurs bâtiments de radoub. Les Syndics occupent ce système et savent qu’il nous faudra le quitter, si bien qu’ils espèrent récupérer ces vaisseaux après notre départ si nous n’avons pas eu l’occasion de les détruire. Nous allons devoir veiller à le leur interdire. »

Les croiseurs de combat de Duellos venaient d’abattre un autre croiseur lourd qui tentait de rejoindre le seul croiseur de combat syndic rescapé, en le lacérant d’un tir de barrage de leurs lances de l’enfer qui le coupa en deux. Un peu plus loin, le croiseur de combat blessé rampait frénétiquement vers les deux cuirassés syndics, à l’approche mais encore très éloignés. Ceux de la septième division arrivaient juste derrière les vaisseaux de Duellos ; en le doublant, ils arrosèrent les débris du croiseur lourd de leurs lances de l’enfer.

Le croiseur de combat syndic était en très mauvaise posture, mais, alors que Duellos arrivait sur lui avec le Courageux, le Formidable et le Risque-tout pour porter l’estocade, il pivota au bon moment et accéléra en piquant vers le bas et sur bâbord. Les croiseurs de combat de Duellos fondaient sur lui à une vitesse tellement supérieure à la sienne qu’ils ne purent que le cribler de quelques rafales de leurs lances de l’enfer à grande portée.

Mais le Brillant, l’Inspiré et l’Opportun arrivaient assez loin derrière pour réagir à cette manœuvre évasive, et, en même temps, se trouvaient assez près du Syndic pour lui interdire de la répéter avant qu’ils n’arrivent à sa portée.

Geary tenta de se représenter mentalement les commandants de ces croiseurs de combat et se rendit compte que, bizarrement, il n’y parvenait pas. Pourquoi diable ces commandants ne lui avaient-ils laissé aucune impression ? Cette soudaine révélation le turlupinait et il s’efforça d’inscrire un pense-bête dans sa mémoire : dès qu’il en aurait le loisir, il lui faudrait consulter les états de service de ces trois officiers.

Le croiseur de combat syndic tangua et roula légèrement sous la poussée de ses propulseurs de manœuvre. Son changement de position lui permettait de braquer ses lances de l’enfer survivantes, et des faisceaux de particules en jaillirent, visant le Brillant au moment où ce dernier, l’Opportun et l’Inspiré altéraient légèrement leur trajectoire pour le survoler par tribord. Les boucliers du Brillant flamboyèrent quand quelques frappes les touchèrent, mais les salves de ses lances de l’enfer et de celles de l’Inspiré pilonnaient déjà ceux, bien affaiblis, du vaisseau ennemi. Ils s’effondrèrent sous ce feu nourri, puis les armes de l’Alliance déchirèrent le bâtiment syndic, réduisant en lambeaux coque, cloisons, équipement et spatiaux assez malchanceux pour se trouver sur leur chemin.

Le temps que Léviathan, Dragon, Inébranlable et Vaillant l’atteignent, le croiseur de combat syndic fut incapable de manœuvrer et ne parvint à riposter que d’une seule de ses lances de l’enfer. Les bâtiments de Tulev le martelèrent puis, laissant sa carcasse dans leur sillage, poursuivirent leur route vers les cuirassés et les unités légères qui tentaient de les rejoindre.

« Ses armes et ses unités de propulsion sont toutes mortes, mais quelque chose fonctionne encore à son bord et l’équipage ne l’a pas abandonné », fit remarquer Desjani d’une voix presque suppliante, comme pour implorer qu’on lui donnât l’ordre de survoler le vaisseau syndic blessé pour lui porter le coup de grâce.

Geary opina sans quitter l’hologramme des yeux. « Le Risque-tout est en meilleure position pour l’achever. Laissons-le faire. » Desjani hocha la tête en cachant à peine son désappointement.

Le Risque-tout obliqua légèrement vers le haut pour survoler le croiseur de combat syndic dans un nouveau déchaînement de ses lances de l’enfer. Alors qu’il poursuivait son chemin, le bâtiment ennemi explosa comme suite à une surcharge de son réacteur. « Des capsules de survie ont-elles réussi à s’échapper ? » se demanda Geary à voix haute, se rendant subitement compte qu’il n’en avait vu aucune.

Une vigie secoua la tête. « Deux ont été larguées avant l’explosion du réacteur, mais elles n’en ont pas réchappé.

— Salaud, murmura Desjani, faisant manifestement allusion au commandant syndic qui avait permis trop tard à son équipage de s’échapper.

— La mort de Syndics vous attristerait-elle ? » s’enquit Geary, étonné de la voir s’en inquiéter. Non seulement Tanya Desjani considérait qu’il était de son devoir de détruire les vaisseaux ennemis et de tuer ses soldats, mais elle avait paru jusque-là y prendre un plaisir vindicatif.

La question la fit sourciller. « Ces gens ne seront plus une menace pour les nôtres et ce n’est pas dommage, expliqua-t-elle. Mais leur commandant n’en avait pas moins l’obligation de leur laisser une chance de se battre. Vous voyez très bien ce que je veux dire. »

C’était le cas, puisqu’un siècle plus tôt, à Grendel, alors que la bataille prenait une tournure de plus en plus désespérée, il avait précisément donné à son équipage l’ordre d’abandonner le vaisseau. « Ouais. Très bien. »

Sur leur lancée, les croiseurs de combat de l’Alliance, parfaitement dans leur élément maintenant que leur vélocité leur permettait de rattraper les unités légères syndics, pulvérisèrent une série d’avisos et de croiseurs légers ennemis et, comme distraitement, les deux croiseurs lourds encore opérationnels qui les flanquaient. À regarder ses croiseurs de combat charger à travers l’espace pour décimer les vaisseaux ennemis alors que les cuirassés de l’Alliance n’étaient plus qu’à deux doigts d’atteindre la Flottille sacrifiée, Geary comprit enfin pourquoi ses meilleurs officiers briguaient leur commandement. Cette charge n’était pas moins glorieuse que celle d’une cavalerie de jadis à la surface d’une planète. Mais, même aujourd’hui, il ne pouvait s’interdire de se demander combien de croiseurs de combat avaient été éventrés par des cuirassés plus lourdement blindés, et si le nombre des engagements où ils avaient réussi à charger victorieusement sur le champ de bataille n’était pas inférieur de très loin à celui des combats où ils avaient souffert de ce handicap.