P.S. Donnez-moi des nouvelles de votre frère et de sa charmante petite femme.
The princess pondered, smiled pensively (at which her face, lit up by her luminous eyes, was completely transformed) and, suddenly getting up, went with her heavy step to the desk. She took out some paper, and her hand quickly began moving across it. This is what she wrote in reply:
Chère et excellente amie.*150 Votre lettre du 13 m’a causé une grande joie. Vous m’aimez donc toujours, ma poétique Julie. L’absence, dont vous dites tant de mal, n’a donc pas eu son influence habituelle sur vous. Vous vous plaignez de l’absence—que devrai-je dire moi si j’osais me plaindre, privée de tous ceux qui me sont chers? Ah! si nous n’avions pas la religion pour nous consoler, la vie serait bien triste. Pourquoi me supposez-vous un regard sévère, quand vous me parlez de votre affection pour le jeune homme? Sous ce rapport je ne suis rigide que pour moi. Je comprends ces sentiments chez les autres et si je ne puis approuver ne les ayant jamais ressentis, je ne les condamne pas. Il me parait seulement que l’amour Chrétien, l’amour du prochain, l’amour pour ses ennemis est plus méritoire, plus doux et plus beau, que ne le sont les sentiments que peuvent inspirer les beaux yeux d’un jeune homme à une jeune fille poétique et aimante comme vous.
La nouvelle de la mort du comte Bezukhov nous est parvenue avant votre lettre, et mon père en a été très affecté. Il dit que c’était l’avant-dernier représentant du grand siècle, et qu’a présent c’est son tour; mais qu’il fera son possible pour que son tour vienne le plus tard possible. Que Dieu nous garde de ce terrible malheur! Je ne puis partager votre opinion sur Pierre que j’ai connu enfant. Il me paraissait toujours avoir un coeur excellent, et c’est la qualité que j’estime le plus dans les gens. Quant à son héritage et au rôle qu’y a joué le prince Basile, c’est bien triste pour tous les deux. Ah! chère amie, la parole de notre divin Sauveur qu’il est plus aisé à un chameau de passer par le trou d’une aiguille, qu’il ne l’est à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu, cette parole est terriblement vraie; je plains le prince Basile et je regrette encore davantage Pierre. Si jeune et accablé de cette richesse, que de tentations n’aura-t-il pas a subir! Si on me demandait ce que je désirerais le plus au monde, ce serait d’être plus pauvre que le plus pauvre des mendiants. Mille grâces, chère amie, pour l’ouvrage que vous m’envoyez, et qui fait si grande fureur chez vous. Cependant, puisque vous me dites qu’au milieu de plusieurs bonnes choses il y en a d’autres que la faible conception humaine ne peut atteindre, il me paraît assez inutile de s’occuper d’une lecture inintelligible; qui par là même, ne pourrait être d’aucun fruit. Je n’ai jamais pu comprendre la passion qu’ont certaines personnes de s’embrouiller l’entendement, en s’attachant à des livres mystiques, qui n’élèvent que des doutes dans leurs esprits, exaltent leur imagination et leur donnent un charactère d’exagération tout-à-fait contraire à la simplicité Chrétienne. Lisons les Apôtres et l’Évangile. Ne cherchons pas à pénétrer ce que ceux-là renferment de mystérieux, car, comment oserions-nous, misérable pécheurs que nous sommes, prétendre à nous initier dans les secrets terribles et sacrés de la Providence, tant que nous portons cette dépouille charnelle, qui élève entre nous et l’éternel un voile impénétrable? Bornons-nous donc à étudier les principes sublimes que notre divin Sauveur nous a laissé pour notre conduite ici-bas; cherchons à nous y conformer et à les suivre, persuadons-nous que moins nous donnons d’essor à notre faible esprit humain et plus il est agréable à Dieu, qui rejette toute science ne venant pas de lui; que moins nous cherchons à approfondir ce qu’il lui a plu de dérober à notre connaissance, et plutôt il nous en accordera la découverte par son divin esprit.
Mon père ne m’a pas parlé du prétendant, mais il m’a dit seulement qu’il a reçu une lettre et attendait une visite du prince Basile. Pour ce qui est du projet de mariage qui me regarde, je vous dirai, chère et excellente amie, que le mariage, selon moi, est une institution divine à laquelle il faut se conformer. Quelque pénible que cela soit pour moi, si le Tout-puissant m’impose jamais les devoirs d’épouse et de mère, je tâcherai de les remplir aussi fidèlement que je le pourrai, sans m’inquieter de l’examen de mes sentiments à l’égard de celui qu’il me donnera pour époux.
J’ai reçu une lettre de mon frère, qui m’annonce son arrivée à Bald Hills avec sa femme. Ce sera une joie de courte durée, puisqu’il nous quitte pour prendre part à cette malheureuse guerre, à laquelle nous sommes entraînés Dieu sait comment et pourquoi. Non seulement chez vous au centre des affaires et du monde on ne parle que de guerre, mais ici, au milieu de ces travaux champêtres et de ce calme de la nature que les citadins se représentent ordinairement à la campagne, les bruits de la guerre se font entendre et sentir péniblement. Mon père ne parle que marche et contremarche, choses auxquelles je ne comprends rien; et avant hier en faisant ma promenade habituelle dans la rue du village, je fus témoin d’une scène déchirante…C’était un convoi des recrues enrôlées chez nous et expédiées pour l’armée…Il fallait voir l’état dans lequel se trouvaient les mères, les femmes, les enfants des hommes qui partaient et entendre les sanglots des uns et des autres! On dirait que l’humanité a oublié les lois de son divin Sauveur, qui prêchait l’amour et le pardon des offenses, et qu’elle fait consister son plus grand mérite dans l’art de s’entretuer.
Adieu, chère et bonne amie, que notre divin Sauveur et sa très sainte Mère vous aient en leur sainte et puissante garde.
Marie.
“Ah, vous expédiez le courrier, princesse, moi j’ai déjà expedié le mien. J’ai écris à ma pauvre mère,”*151 the smiling Mlle Bourienne spoke in a quick, pleasant, juicy little voice, swallowing her r’s and bringing with her into the concentrated, sad, and dreary atmosphere of Princess Marya a completely different, frivolously gay and self-contented world.
“Princesse, il faut que je vous prévienne,” she added, lowering her voice, “le prince a eu une altercation,” she said, deliberately swallowing her r’s and listening to herself with pleasure, “une altercation avec Michel Ivanoff. Il est de très mauvaise humeur, très morose. Soyez prévenue, vous savez…”†152
“Ah, chère amie,” answered Princess Marya, “je vous ai priée de ne jamais me prévenir de l’humeur dans laquelle se trouve mon père. Je ne me permets pas de le juger, et je ne voudrais pas que les autres le fassent.”‡153
The princess glanced at her watch and noticing that she was already five minutes late for playing the clavichord, went with a frightened face to the sitting room. According to the established order of the day, between noon and two o’clock the prince rested and the princess played the clavichord.
XXIII
The gray-haired valet sat dozing and listening to the prince’s snoring in the immense study. From the far side of the house, from behind a closed door, came the sounds of a Dusek sonata,45 the difficult passages repeated twenty times.
Just then a carriage and a britzka drove up to the porch, and from the carriage stepped Prince Andrei, who helped his little wife out and allowed her to go ahead. Gray-haired Tikhon, in a wig, stuck himself out the door of the waiting room, said in a whisper that the prince was sleeping, and hastily closed the door. Tikhon knew that neither the son’s arrival nor any sort of extraordinary event was to interrupt the order of the day. Prince Andrei evidently knew it as well as Tikhon; he looked at his watch, as if to check whether his father’s habits had changed during the time he had not seen him, and, verifying that they had not, turned to his wife.