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ah! que vous êtes bien dans le beau cimetière

Vous mendiants morts saouls de bière

Vous les aveugles comme le destin

Et vous petits enfants morts en prière

Ah! que vous êtes bien dans le beau cimetière

Vous bourgmestres vous bateliers

Et vous conseillers de régence

Vous aussi tziganes sans papiers

La vie vous pourrit dans la panse

La croix vous pousse entre les pieds

Le vent du Rhin ulule avec tous les hiboux

Il éteint les cierges que toujours les enfants rallument

Et les feuilles mortes

Viennent couvrir les morts

Des enfants morts parlent parfois avec leur mère

Et des mortes parfois voudraient bien revenir

Oh! je ne veux pas que tu sortes

L'automne est plein de mains coupées

Non non ce sont des feuilles mortes

Ce sont les mains des chères mortes

Ce sont tes mains coupées

Nous avons tant pleuré aujourd'hui

Avec ces morts leurs enfants et les vieilles femmes

Sous le ciel sans soleil

Au cimetière plein de flammes

Puis dans le vent nous nous en retournâmes

A nos pieds roulaient des châtaignes

Dont les bogues étaient

Comme le cœur blessé de la madone

Dont on doute si elle eut la peau

Couleur des châtaignes d'automne

Les sapins

Les sapins en bonnets pointus

De longues robes revêtu

Comme des astrologues

Saluent leurs frères abattus

Les bateaux qui sur le Rhin voguent

Dans les sept arts endoctrinés

Par les vieux sapins leurs aînés

Qui sont de grands poètes

Ils se savent prédestinés

A briller plus que des planètes

A briller doucement changés

En étoiles et enneigés

Aux Noëls bienheureuses

Fêtes des sapins ensongés

Aux longues branches langoureuses

Les sapins beaux musiciens

Chantent des noëls anciens

Au vent des soirs d'automne

Ou bien graves magiciens

Incantent le ciel quand il tonne

Des rangées de blancs chérubins

Remplacent l'hiver les sapins

Et balancent leurs ailes

L'été ce sont de grands rabbins

Ou bien de vieilles demoiselles

Sapins médecins divagants

Ils vont offrant leurs bons onguents

Quand la montagne accouche

De temps en temps sous l'ouragan

Un vieux sapin geint et se couche

Les femmes

Dans la maison du vigneron les femmes cousent

Lenchen remplis le poêle et mets l'eau du café

Dessus – Le chat s'étire après s'être chauffé

– Gertrude et son voisin Martin enfin s'épousent

Le rossignol aveugle essaya de chanter

Mais l'effraie ululant il trembla dans sa cage

Ce cyprès là-bas a l'air du pape en voyage

Sous la neige – Le facteur vient de s'arrêter

Pour causer avec le nouveau maître d'école

– Cet hiver est très froid le vin sera très bon

– Le sacristain sourd et boiteux est moribond

– La fille du vieux bourgmestre brode une étole

Pour la fête du curé La forêt là-bas

Grâce au vent chantait à voix grave de grand orgue

Le songe Herr Traum survint avec sa sœur Frau Sorge

Kaethi tu n'as bien raccommodé ces bas

– Apporte le café le beurre et les tartines

La marmelade le saindoux un pot de lait

– Encore un peu de café Lenchen s'il te plaît

– On dirait que le vent dit des phrases latines

– Encore un peu de café Lenchen s'il te plaît

– Lotte es-tu triste O petit cœur – Je crois qu'elle aime

– Dieu garde – Pour ma part je n'aime que moi-même

– Chut A présent grand-mère dit son chapelet

– Il me faut du sucre candi Leni je tousse

– Pierre mène son furet chasser les lapins

Le vent faisait danser en rond tous les sapins

Lotte l'amour rend triste – Ilse la vie est douce

La nuit tombait Les vignobles aux ceps tordus

Devenaient dans l'obscurité des ossuaires

En neige et repliés gisaient là des suaires

Et des chiens aboyaient aux passants morfondus

Il est mort écoutez La cloche de l'église

Sonnait tout doucement la mort du sacristain

Lise il faut attiser le poêle qui s'éteint

Les femmes se signaient dans la nuit indécise

Septembre 1901 – mai 1902

Signe

Je suis soumis au Chef du Signe de l'Automne

Partant j'aime les fruits je déteste les fleurs

Je regrette chacun des baisers que je donne

Tel un noyer gaulé dit au vent ses douleurs

Mon Automne éternelle ô ma saison mentale

Les mains des amantes d'antan jonchent ton sol

Une épouse me suit c'est mon ombre fatale

Les colombes ce soir prennent leur dernier vol

Un soir

Un aigle descendit de ce ciel blanc d'archanges

Et vous soutenez-moi

Laisserez-vous trembler longtemps toutes ces lampes

Priez priez pour moi

La ville est métallique et c'est la seule étoile

Noyée dans tes yeux bleus

Quand les tramways roulaient jaillissaient des feux pâles

Sur des oiseaux galeux

Et tout ce qui tremblait dans tes yeux de mes songes

Qu'un seul homme buvait

Sous les feux de gaz roux comme la fausse oronge

O vêtue ton bras se lovait

Vois l'histrion tire la langue aux attentives

Un fantôme s'est suicidé

L'apôtre au figuier pend et lentement salive

Jouons donc cet amour aux dés

Des cloches aux sons clairs annonçaient ta naissance

Vois

Les chemins sont fleuris et les palmes s'avancent

Vers toi

La dame

Toc toc Il a fermé sa porte

Les lys du jardin sont flétris

Quel est donc ce mort qu'on emporte

Tu viens de toquer à sa porte

Et trotte trotte

Trotte la petite souris

Les fiançailles

A Picasso

Le printemps laisse errer les fiancés parjures

Et laisse feuilloler longtemps les plumes bleues

Que secoue le cyprès où niche l'oiseau bleu

Une Madone à l'aube a pris les églantines

Elle viendra demain cueillir les giroflées

Pour mettre aux nids des colombes qu'elle destine

Au pigeon qui ce soir semblait le Paraclet

Au petit bois de citronniers s'énamourèrent

D'amour que nous aimons les dernières venues

Les villages lointains sont comme les paupières

Et parmi les citrons leurs cœurs sont suspendus

Mes amis m'ont enfin avoué leur mépris

Mes amis m'ont enfin avoué leur mépris

Je buvais à pleins verres les étoiles

Un ange a exterminé pendant que je dormais

Les agneaux les pasteurs des tristes bergeries

De faux centurions emportaient le vinaigre

Et les gueux mal blessés par l'épurge dansaient

Étoiles de l'éveil je n'en connais aucune

Les becs de gaz pissaient leur flamme au clair de lune

Des croque-morts avec des bocks tintaient des glas

A la clarté des bougies tombaient vaille que vaille