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Donc, Sultan Hafiz Mahmood se dirigeait vers le zoo et ils allaient surgir derrière lui. La chance était avec eux. Ses deux gardes du corps courant derrière lui, il ne s’apercevrait pas immédiatement de leur disparition. Malko passa devant la 17e Rue.

— Attention, les voilà ! lança Chris Jones à l’avant.

À une centaine de mètres devant eux, trois hommes, décalés en triangle, couraient dans le sous-bois clairsemé longeant Siachin Road.

Malko sentit un léger picotement sur le dessus de ses mains. La distance diminuait entre les coureurs et la Volvo. Les mains crispées sur leurs armes, Chris et Milton, respiration bloquée, se préparaient à sauter de la voiture. Encore cinquante mètres… Machinalement, Malko jeta un coup d’œil dans le rétroviseur et son pouls bondit à 200.

Une voiture bleue, équipée d’un gyrophare sur le toit, venait d’émerger de la 17e Rue et roulait derrière eux !

— Abort ! Abort[41] ! lança-t-il aux deux gorilles qui n’avaient rien vu.

La mort dans l’âme, ils dépassèrent Sultan Hafiz Mahmood et ses deux gardes qui trottinaient sous la futaie. De nouveau, Malko regarda le rétroviseur. La voiture de police avait ralenti et roulait désormais à la hauteur des coureurs… Ce n’était pas après eux qu’elle en avait… Malko, la chemise collée à la peau par la sueur, prit le portable et enclencha la communication.

— Bill ! annonça-t-il, cas non conforme, on démonte. À ce soir, au club. Je ramène nos amis à la maison. Envoyez-nous quelqu’un.

— Déposez-nous à l’ambassade, demandèrent en chœur les deux gorilles.

Cinq minutes plus tard, Malko stoppait devant la barrière rouge et blanc interdisant l’entrée de l’enclave diplomatique, gardée par des soldats pakistanais à l’air farouche, coiffés de grands bérets noirs.

Quand la Volvo s’arrêta non loin de la barrière, ils braquèrent aussitôt leurs armes dans sa direction. Chris Jones descendit et la vue d’un Blanc les rassura un peu. Il fallut pourtant attendre l’arrivée d’un jeune agent de la CIA pour franchir la barrière.

*

*   *

Le colonel Hussein Hakim était perplexe. Le rapport de filature de Malko Linge indiquait que, la veille, en compagnie d’un chauffeur non identifié, il avait eu des activités bizarres. D’abord, il avait traîné dans Siachin Road, la parcourant dans les deux sens. Ensuite, il s’était rendu aux ruines de Taxila…

On ne lui connaissait pourtant aucun goût pour l’archéologie… Son premier parcours avait davantage inquiété le colonel de l’ISI. Après une étude rapide des gens habitant ce quartier très chic, il avait repéré le nom de Sultan Hafiz Mahmood, le spécialiste nucléaire lié à Oussama Bin Laden, que les Américains leur avaient réclamé à plusieurs reprises… Est-ce que ce Malko Linge, connu pour ses qualités professionnelles, était là pour essayer d’entrer en contact avec lui ?

Tout était possible.

Prudent, le colonel Hakim avait immédiatement demandé à l’équipe chargée de la protection du scientifique de renforcer la surveillance autour de lui, ce qui avait été aussitôt fait. Deux précautions valent mieux qu’une.

William Hancock était effondré, après s’être fait raconter dix fois l’incident…

— C’est peut-être une coïncidence, conclut-il. Ils ne vous ont pas repérés ?

— Je n’en sais rien, avoua Malko. Ils ont pu relever le numéro de la voiture.

Le chef de station leva la tête.

— Êtes-vous d’accord pour faire un nouvel essai demain matin ?

Un silence de mort lui répondit, brisé par Malko.

— William, dit-il, dans notre métier, il ne faut jamais croire aux coïncidences. C’est le premier jour où la surveillance de Sultan Hafiz Mahmood est renforcée. Ce n’est pas par hasard. J’ai dû être suivi, ils ont vu où j’allais et ils en ont tiré des conclusions. Je crois que l’Agence s’est déjà intéressée à lui, avec Gwyneth Robertson.

— C’est exact, reconnut l’Américain, mais…

— L’hélico est reparti ? demanda Chris Jones.

— Oui. Comme prévu. Il a attendu un quart d’heure et a signalé aux Pakistanais que, suite à une avarie, il faisait demi-tour vers Spin Bolak…

— On ne peut pas recommencer, conclut Malko. Si, demain, un autre hélico demande une autorisation de survol, si les Pakistanais ne sont pas mongoliens, ils vont se douter de quelque chose. Et enfermer Sultan Hafiz Mahmood à double tour.

— Well, reconnut le chef de station, je crois que vous avez raison. On démonte.

— J’ai un vol pour Londres ce soir, dit Malko, je pense le prendre. Inutile de faire de vieux os ici.

— Et nous ? firent les deux gorilles.

— Vous avez le temps de visiter ce beau pays, proposa Malko, mais n’allez pas à Peshawar. Là-bas, les Américains ne sont pas très populaires.

Décidément, ils avaient sabré le champagne trop tôt. Chris Jones jeta un coup d’œil attristé aux deux carabines posées sur le canapé.

— C’est dommage ! J’aurais bien voulu voir comment fonctionnait ce truc-là.

*

*   *

Cette fois, Malko avait pris la British Airways pour profiter des sièges lits, et dormi comme un enfant. Adieu le Pakistan. L’ISI ne saurait jamais la raison de sa visite éclair à Islamabad et cela valait mieux.

Richard Spicer avait été prévenu de l’annulation du kidnapping par la station d’Islamabad et allait sûrement réagir. Malko regarda le léger brouillard qui flottait sur la campagne anglaise et pensa à Aisha Mokhtar. Du coup, elle reprenait de l’importance, mais il n’allait pas être évident de la recontacter…

Les roues du 747 touchèrent le sol et il bâilla. Heureusement qu’il avait dormi.

Sa housse Vuitton accrochée à l’épaule, il franchit l’Immigration et la douane en un temps record. À peine dans le hall du terminal 4, il repéra un jeune homme brandissant un panneau à son nom. Il s’approcha et l’inconnu s’empara aussitôt de sa housse.

— Mister Spicer m’a demandé de vous accompagner à votre hôtel, puis de vous emmener immédiatement à son bureau, annonça-t-il. Vous avez fait bon voyage ?

— Excellent, affirma Malko.

La CIA ne perdait pas de temps pour son debriefing…

Après un bref arrêt au Lanesborough, ils prirent la route de Grosvenor Square. En dépit de l’heure matinale, Richard Spicer, toujours aussi élégant, semblait frais comme un gardon. Il accueillit chaleureusement Malko.

— Je suis au courant de tout ! lança-t-il. C’est dommage. Mais il aurait fallu avoir plus de temps pour préparer cette opération.

— Nous ne sommes pas près de parler à Sultan Hafiz Mahmood, soupira Malko. Donc, nous revoilà au point mort.

— J’ai convoqué le représentant de l’ISI à Londres, aujourd’hui à onze heures, annonça le chef de station. Nous l’emmènerons au « 6 » pour lui projeter le film. Et après, il a intérêt à se montrer coopératif. Sinon, nous avons de sérieux moyens de rétorsion. Le Pakistan attend une livraison de F-16 et d’avions ravitailleurs. Cela m’étonnerait que le président Bush les livre à un pays qui aide Bin Laden à se procurer une arme nucléaire.

Malko étouffa un bâillement.

— Parfait. Et moi ? Pourquoi m’avoir convoqué si tôt ?

— Nous avons retrouvé la trace du caméscope qui a servi à filmer Bin Laden et Sultan Hafiz Mahmood. Il a été acheté à Dubaï, en 2002, par Aisha Mokhtar.

CHAPITRE XII

Le Salinthip Naree, vraquier de 22 000 tonnes, filait à peine douze nœuds, gêné par la forte houle. La mousson d’été sud-ouest, qui soufflait sur l’océan Indien de mai à septembre, générait un vent de force 7, le forçant à diminuer sa vitesse. Il passait au sud du Sri Lanka, avant d’infléchir sa course vers le nord-ouest en direction du détroit de Bab El-Mandeb, afin de contourner la Corne de l’Afrique pour entrer dans la mer Rouge.

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On annule ! On annule !