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Vite, je repousse la lourde.

— Tu faisais dodo, chérie ?

— Oui, je rêvais de you.

— Eh bien ! Tes rêves vont prendre de la consistance, si j’ose ainsi m’exprimer !

Nous passons dans la chambre où le lit défait, tout chaud, tout parfumé, me tend pour ainsi dire les draps.

— Ecoute, souris jolie, accepterais-tu de me cacher ici pendant quarante-huit heures ? Je me suis mis Maresco à dos et ça va barder pour mon matricule dans un futur tout ce qu’il y a d’immédiat.

— Qu’est-il arrivate ?

— Ce serait trop long, je t’expliquerai cela plus tard. Puis-je compter sur toi, oui ou non ? That is the question ! Comme disait Breffort.

— Mais, bien sûr, tu le peux, mon grand fou !

— Vrai, tu me cacheras ?

— Je te cacherai !

— Même…

— Même ?

— Même de la police ? Figure-toi que j’ai eu une explication orageuse avec un des tueurs de Maresco. Elle s’est mal terminée… pour lui !

— Je te cacherais du diable, s’il le fallait !

— Je ne t’en demande pas tant !

Elle envoie promener sa robe de chambre arachnéenne. S’il me restait un centimètre cube d’air dans les éponges, je sifflerais d’admiration.

Un corps comme le sien, vous n’en avez jamais vu. A côté d’elle, notre B.B. est juste bonne à écosser des petits pois.

Ah ! Mes enfants !

Des jambes longues, fines, bien proportionnées, nerveuses, racées comme celles d’une pouliche de course. Un ventre plat sur lequel vous avez envie de battre la charge. Des seins qui regardent orgueilleusement en l’air… Bref, un digest de Folies-Bergère à faire damner un saint.

Elle me regarde en souriant.

Elle s’avance sur moi. Ses cheveux courts, ébouriffés par le dodo, lui font une coiffure d’archange. J’allonge les bras… Je la cueille comme une brassée de bonheur.

Je la renverse sur le pucier.

Et alors, en moins de temps qu’il n’en faut à un huissier pour mettre une saisie-arrêt sur les appointements d’un prolo qui n’a pas fini de cigler les traites de sa télé, j’oublie ma situation critique, j’oublie Chicago, Maresco, ses boy-scouts.

J’oublie tout ce qui n’est pas ce corps affolant !

Ne comptez pas que je vous donne davantage de détails, vos bourgeoises ne sauraient plus ce qui leur arrive !

CHAPITRE XVII

« Enquête au téléphone »

Je suis soûl d’amour lorsque j’ouvre un store languissant. Il fait bon… il fait jour.

C’est bath d’être zoné dans la chaleur lorsqu’on a un gros coup de fatigue, lorsqu’il fait jour et qu’on n’a pas besoin de se lever.

J’entends un petit air de radio, suave comme une patte de chat. J’ouvre mes châsses en grand. La pièce est toute blonde de soleil.

Ah ! Ce qu’il fait bon vivre ! Au milieu de la lumière, Cecilia évolue, gracieuse comme une fée. Elle porte une jupe de flanelle grise, un chemisier ocre et son maquillage est neuf.

Elle tient à la main un plateau supportant un bol de café fumant, des toasts beurrés et un pot de confiture.

Justement, j’ai la dent.

— Vous êtes bien reposé ? demande-t-elle.

— C’est rien de le dire, mon âme…

Je la chope par la taille. Je suis tout prêt à remettre le couvert, mais elle me repousse.

— Il faut que j’aille à mon bureau.

— Eh bien, soyez sage. S’il y a du nouveau, vous me téléphonez ?

— Oui.

— Écoutez, je ne répondrai au téléphone que si je suis certain que c’est vous. Pour cela, appelez-moi deux fois. Une première, vous raccrocherez dès que vous entendrez votre sonnerie d’ici, vous compterez dix secondes et vous referez le numéro. Compris ?

— Compris !

Un beau patin pour mariage pauvre et me voilà seulâbre dans la strasse.

Je baisse l’amplificateur du poste jusqu’à n’avoir qu’un murmure imperceptible du dehors. Je chope un paquet de gitanes et je commence à le réduire en cendres en me laissant bercer par l’orchestre de chambre.

Après tout, je ne peux rien faire d’autre. Il y a des moments dans cette garce de vie où il faut savoir faire abstraction de tout ce qui vous entoure.

Tout à coup, je repense à mon petit copain, le Belge errant : Robert Dauwel.

Le pauvre môme doit se cailler le raisin à m’attendre. Comme il me paraît dégourdoche, il voudra retrouver ma trace, il se lancera dans l’aventure avec la fougue d’un jeune clébard et ça bardera pour sa praline si jamais il tombe dans l’espace vital de Maresco.

Il faut absolument que je le prévienne.

Je me rappelle que l’hôtel où nous étions descendus s’appelait The Spanish. Et qu’il y avait des tableaux espagnols plein les murs du hall.

Je fouinasse dans l’appartement de ma cocotte pour dégauchir un annuaire. Je finis par en engourdir un qui lui sert de petit banc sans doute, car il est posé par terre à la cuisine. Elle doit mettre ses pinceaux dessus lorsqu’elle tourne une mayonnaise. Je le feuillette. The Spanish Hôtel, c’est écrit en caractère gras, ce qui est normal pour un établissement qui se veut espagnol.

Je compose le numéro sur le cadran et un portier polyglotte répond à mon coup de grelot.

— Je voudrais parler à M. Robert Dauwel ! Dis-je.

— Tout dé souité !

Un crachotement prometteur. La voix traînante, éveillée pourtant, du petit globe-trotter me parvient.

— C’est toi, Christophe Colomb ? Fais-je.

— Enfin ! s’écrie-t-il. Commissaire !

— Chut ! Ecoute, bonhomme, les choses ont mal tourné cette nuit. Je suis obligé de me déguiser en homme invisible ! Justement, j’ai trouvé une panoplie complète chez un costumier de mes aminches, alors je te le dis pour que tu ne te tracasses pas pour ma cerise. Si j’ai un conseil à te donner, c’est de continuer ton voyage sans perdre une minute. Je ne t’ai pas refilé les mille dollars, mais, heureusement, je t’ai versé des arrhes substantielles. Tu devras t’en contenter, mon pauvre gros, car ces vaches m’ont sucré tout ce qui me restait.

— Vous tracassez pas pour ça, dit-il vivement. Vous m’avez donné six cents dollars, c’est beaucoup trop. Voulez-vous que je vous les rende ?

— Tu débloques, môme !

— Mais si vous n’en avez plus !

— J’en trouverai, t’occupe pas !

— Vrai, vous n’avez plus besoin de moi ?

— Mais non…

— Vous n’êtes pas en danger, au moins ?

— Mais non, mon gars.

— Voulez-vous un coup de main ?

— Pas besoin.

— Vrai ?

— Tu es obstiné comme une mouche à miel !

— C’est que je sens que ça ne va pas pour vous. Je ne voudrais pas vous laisser comme ça. On ne peut pas au moins se dire au revoir ?

— Non.

— Où êtes-vous ?

— T’occupe pas.

— Dites donc, vous avez lu les journaux ?

— Non, fais-je, intéressé. Pourquoi, il est question de moi ?

— Pas de vous, du tueur. Il a bousillé une nouvelle fille.

Je croasse :

— Quoi ?

— Vous n’avez pas vu le journal ?

— Et même, si j’en avais un, tout ce que je pourrais faire, c’est envelopper des œufs avec, tu sais bien que…

— C’est vrai, vous ne savez pas lire.

— Pas lire l’anglais, rectifié-je, car je n’aime pas qu’on défigure trop mon standing… Eh bien ! Qu’est-ce qu’il dit, le baveux ?