Voilà pourquoi la joie chrétienne ne réside pas dans les plaisirs de l'inconscience, mais dans la sublime certitude que toutes les douleurs sont des chemins qui mènent à des joies immortelles.
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En nous sauvant
« Sauve-toi toi-même en descendant de la croix!»- (Marc 15- 30)
Ce cri d'ironie poussé par des hommes malveillants ne cesse de vibrer à travers les siècles.
La créature humaine ne pouvait comprendre le sacrifice du Sauveur. La terre ne connaissait que des vainqueurs qui arrivaient en brandissant des armes, couverts de gloires sanglantes, des héros de la destruction et de la mort à qui on dressait des autels et des monuments en pierre.
Mais ce Messie était loin du modèle courant. Pour conquérir, il donna de sa personne ; afin de posséder, il ne demanda rien aux autres pour lui ; pour enrichir la vie, il se livra à la mort.
Par conséquent, à l'heure extrême, cherchant à interpeller le divin Triomphateur avec des expressions corrosives, les sarcasmes ne manquèrent pas.
À ce témoignage, le Maître nous enseigne que même en nous préservant de la méchanceté et de l'ignorance, nous entendrons le cri de la malice générale.
Par conséquent, lorsque nous nous attardons et restons attachés à l'illusion de la proéminence, quand nous travaillons exclusivement intéressés par notre grandissement temporaire dans la sphère charnelle et que nous oublions les besoins d'autrui, nous sommes toujours considérés par un grand nombre comme privilégiés et victorieux. Mais si nous faisons le choix de réfléchir à nos graves responsabilités dans le monde, on nous traite de fous et, quand on nous surprend à réaliser des expériences élevées, enduites de la douleur sacrée qui nous transporte vers des sphères sublimes, ceux qui nous ont ridiculisés passent près de nous en faisant des gestes ironiques et nous rappellent les hauts principes que nous avons épousés dans notre vie tout en s'exclamant avec dédain : - « Sauve-toi toi-même en descendant de la croix ! »
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L'ami occulte
« Mais leurs yeux étaient retenus, afin qu 'ils ne pussent le reconnaître. » — (Luc 24. 16)
En route vers Emmaus, amers, les disciples commentaient les terribles événements du Calvaire.
Ils étaient plongés dans la tourmente de l'angoisse. Le doute pénétrait leur âme, les poussant à l'abattement, à des sentiments négatifs.
À ce moment-là, un homme inconnu vint se joindre à eux sur la route. Il ressemblait à un misérable voyageur. Sans s'identifier, il évoqua les vérités des Ecritures, et exalta la croix et la souffrance.
Les deux compagnons, qui s'étaient empêtrés dans des Contradictions ingrates, éprouvèrent une sensation agréable de bien-être en entendant ces propos réconfortants.
Ce ne fut qu'à la fin du voyage, à présent fortifiés dans la douce atmosphère de l'auberge, qu'ils perçurent que l'inconnu était le Maître.
Tous les jours apparaissent des apprentis sur la « route symbolique d'Emmaus ». Touchés par l'Evangile, ils s'étonnent des sacrifices nécessaires à l'illumination spirituelle éternelle. Ils ne comprennent pas le contenu divin de la croix et cherchent de lointains « paysages mentaux »... Néanmoins, il se présente toujours un inconnu pour marcher au côté de ceux qui titubent et s'enfuient. Il prend la forme d'un promeneur incompris, d'un compagnon inattendu, d'un vieillard généreux, d'un enfant timide. Sa voix est différente des autres, ses élucidations plus fermes, ses appels plus doux.
Celui qui, pendant un temps, partage le banquet de la croix ne pourra jamais l'oublier. Très souvent, il s'attardera dans le monde en s'aventurant sur de sombres chemins ; pourtant, l'heure arrivera où, de manière imprévisible, Jésus viendra chercher ces voyageurs égarés et ne les abandonnera pas tant qu'il ne les verra pas dans un climat de confiance, libres et sûrs d'eux.
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La couronne
« Ils le revêtent de pourpre, puis, ayant tressé une couronne d'épines, ils la lui mettent. » - (Marc 15. 17)
De nos jours, le degré d'inadvertance de la majorité des disciples de l'Evangile, obnubilés par la couronne des triomphes mondains, est presque incroyable. Depuis longtemps, les églises chrétiennes corrompues se complaisent à réaliser de grands spec tacles à travers d'immenses démonstrations de force politique. Il faut reconnaître qu'un grand nombre de clubs spirites chrétiens, encore si récents dans le monde, tendent aux mêmes inclinations.
Individuellement, les prosélytes exigent de la part d'inconnus le bien-être, un chemin sans obstacle, les considérations honorables du monde, de respect de tous ou la reconnaissance fidèle des principes élevés qu'ils ont épousés dans la vie. Quand toutes ces facilités ne les incitent pas au service édifiant, ils se sentent persécutés, contrariés, malheureux.
Mais... et le Christ ? Le tableau de la couronne d'épines ne serait-il donc pas suffisant pour atténuer notre inquiétude ?
Naturellement, le Maître portait en lui la couronne de la vie ; mais il ne voulut pas perdre l'occasion de révéler que la couronne de la terre est encore celle des épines, de la souffrance et du travail incessant pour ceux qui désirent escalader la montagne de la résurrection divine. À l'heure où le Seigneur inaugurait la Bonne Nouvelle parmi les hommes, les Romains se couronnaient de rosés ; mais en nous léguant sa sublime leçon, Jésus nous laissait comprendre que ses fidèles disciples devraient porter des distinctions d'une autre nature.
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Aimes-tu suffisamment ?
« Il lui dit pour la troisième fois : « Simon, fils de Jean, m'aimes-tu ? » — (Jean 21. 17)
Pour les apprentis moins avisés, il semble étrange que Jésus ait demandé par trois fois à l'apôtre s'il était bien sûr de son amour. En l'entendant répéter cette question, Simon Pierre en fut attristé, et supposât que le Maître doutait de ses sentiments les plus intimes.
Néanmoins, l'enseignement est plus profond.
A cet instant, Jésus lui confiait le ministère de la coopération dans le cadre des services rédempteurs. Le pêcheur de Capharnaum allait contribuer à l'élévation de ses protégés du monde, il allait devenir apôtre en se pénétrant de nouvelles valeurs pour la vie éternelle.
Par conséquent, la question du Seigneur dans ce cas est très significative. Jésus ne demande pas d'informations au disciple relatives aux raisonnements qui étaient les siens, il ne délire pas s'informer des connaissances de son collaborateur à Son égard, il ne demande pas un engagement formel. Il prétend seulement savoir si Pierre l'aime et laisse percevoir qu'avec l'amour, les autres difficultés se résolvent. Si le disciple a suffisamment de réserve de cette essence divine, la tâche la plus âpre se convertit en apostolat de bénédictions prometteuses.
De la sorte, il est impératif de reconnaître que tes conquêtes intellectuelles valent beaucoup, que tes recherches sont louables, mais en vérité tu ne seras effectivement un coopérateur efficace du Christ que si tu as de l'amour en toi.