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« Là, é part au trip' galop maint'nant, la mère ! Tout juste qu'é va pas m'trouver trop mignard du groume ! Oh ! dis donc, é craint plus la surchauffe ! Vacca ! Ell' va m'faire couler une bielle à c't'allure ! Là, é d'vient téméraire, Marguerite ! Où qu'é veut en v'nir d'forcener ainsi, j'm'demande ? J'vas m'enflammer l'gland si é baisse pas d'régime ! Doucement, Guiguite ! J'ai pas envie d'êt' mutilé du chibre ! J'ai encore des projets l'concernant. Faut qui va resservir, j'en sais qu'attendent su' l'paillasson. Pouce ! J'd'mande un temps mort pour m'vas'liner le manche ! On court à la cata, môme ! Arrête, bourrique ! Arrête qu'j'te dis ! Mais bordel, c'est mon paf, non ? Charogne, j'te fais l'saut d' l'ange ! Rran ! Ouf ! Putain, je fume du panais ! »

S'étant reculé, il m'avise.

— Ah ! t'étais là, halète l'homme au gros moignon. Y m'semb' qu' j'voulais te dire quéqu'chose.

— Moi aussi, je veux te dire quelque chose, pesté-je.

Sa Seigneurie échauffée me refoule dans le couloir. Elle murmure :

— J'sais : c'est pas pour une bourrée qu'tu m'as dit d'embarquer la grognasse ; s'lement, y s'est produit un fait qui l'a mise hors d'eau, mec.

— Je t'écoute.

— L'tube de rouge n'est pas à elle.

— Ah, non ? Pourtant elle l'a griffé et fourré dans son sac sans barguigner, non ?

— D'ac. Mais ça plaide en sa faveur. Elle en avait déjà un tout pareil dans son sac, grand. Quand j'Ies ai sortis, les deux, elle a esclamé « Ah ! ben alors, celui que le commissaire a trouvé n'est pas à moi, j'avais cru, mais comme je n'en ai qu'un »… Elle était sincère, crois-moi !

Cette fausse manœuvre me déçoit.

— Tu m'escuseras, fait Alexandre-Benoît, faut qu'j'vais terminer madame. Ell' comprendrait pas qu'j'la laisse en rideau, av'c la salle des fêtes grande ouverte.

II retourne au labeur, la membrane battant la mesure.

— R'v'nons à nos moutons, jolie médème, qu'il roucoule. N'a défaut d'vas'line, je m'y mets un brin d'savon. Pour faciliter les transports en commun. Me r'v'là tout à vous, Marguerite, ma jolie pâqu'rette. Te vais vous effeuiller l'trésor en y mettant tout' la galantine que vous souhaitereriez. Y a des moments, voiliez-vous, quand j'bouillave av'c une personne d'vot' classe, je donne dans la poétrie. J'voudrais vous faire reluire en vers, bien vous esprimer l'combien vos jambons m'inspirent, ma jolie. Et qu'j'trouve vot' cul bioutifoule en plein. Un vrai clair d'lune ! Une lanterne japonouille ! Je plonge du paf à pieds joints dans c'potiron très superbe. Et vos nich'mars qui pendent à l'avant, y m'font penser à la louve de Rome qu'à élevé Rému et Rommel. J'cause pas d'vot' cressionnière qui ressemb' à un coussin d'crin éventré ! J'adore le velouré d'vot' peau, malgré les vergetures.

« Voilà, c'est r'parti. Pas la peine d'emballer l'attelage, mémé : qui va piano va sono. On se biche un pied princier. Maint'nant, si vous s'riez fatiguée d'vous faire pilonner l'postère, on peut passer par la grande porte d'devant ? Moui ? Vous préféreriez ? C'est parti, tournez vos meules du côté d'Montmartre et on s'paye la visite d'la cathédrale. Là, on risque plus rien, c'est tout bon ! L'autoroute d'l'Ouest ! On dira ce qu'on veut d'la pose papa, mais on n'a rien trouvé d'mieux pour s'faire étinceler l'chinois. Visez c'confort ! La baise pullman ! La façon qu'on prélasse. J'ai les claouis qui font d'la chaise longue ! Souquer une sœur dans ces conditions c'est aussi plaisant qu'd'déguster un pastis, l'soir sous les platanes d'Provence. Après l'coup de brûlot qu'v'l'avez administreré, Coquette a l'impression d'entrer au Carmel. Elle pavane comm' un' follingue, v'sentez dusèche ? C'est sa récompense après les preuves. Son r'tour aux sources, pour ainsi dire !

« Elle déambule la tête haute ! Retiendez-vous l'plus possibl' d'vous éternuer l'bonheur, ma gosse. Au plus qu'on réprime, au plus c'est super. On fait les montagnes russes av'c nos sens. Un coup près d'la gagne, et fsuiiiit ! on se ravale le foutre et ça repart dans les languisseries. Moi, si j'serais riche, j'ferais que ça ! La mouche écossaise, on appelle ! Ça aiguise la découillade ! Quand le bonheur dégage, alors là, c'est la fusée Ariel ! Faudra qu'on concorde nos violons, Guiguite. Pas qu'en ait un qui rentre en gare d'Lyon quand t'est-ce qu'l'aut' est encore à Fontain'bleau ! On saute en parachute la mano dans la mano. Et faut pas hésiter à annoncer la couleur ! Y a qu'les moudus qui gueulent pas en amour ! Le cri du pied ne choque que ceux qui peuvent pas l'prend'.

« Quoi ? Vous partez déjà, princesse ? C'est plus fort qu'vous ? Freinez, bordel, j'sus pas encore apte ! Laissez-moi faire mes bagages, au moins. Pensez à des choses tristes ! A la mort de vot'mère ! Comment ? E vit toujours ? Ben à celle d'vot'dabe alors. V's'allez pas m'dire qu'il éternise, les mecs clabotent les premiers ! Pensez à vot' mari qui se fait pomper par la bonne ! Hein ? Ça vous excite ? Non, non, changez d'secteur. A Chirac ! Sa défaite aux Présidentieuses, v'v'rapp'lez sa tronche ? Quoi ? Ça, ça vous faire rire. Ben voilà, riez, mais jouissez pas ! Prenez-moi pas en trait', Marguerite ! On s'estime trop pour aller à la décarrade en ord' dispersé.

« Pardon, qu'est-ce que vous dites ? Que mon gros mandrin vous r'mue d'trop l'sensoriel ? Pensez à vos impôts, merde ! A la reine d'Angleterre ! Au s.i.d.a. ! A… Non ! Voilà, j'arrive ! Au débotté ! L'Orient-Express ! Gare aux taches ! Aaaahooooo ! Vrouhaaap ! Bouahou ! Oh ! Yessssss ! Tout pour ta pomme, pétasse ! Charrrrrogne ! Putain, c'dégagement ! Ah ! j'l'ai senti passer ! Quoi ? T'as raté la gagne ! Tu t'es différée d'trop ?

« T'es branque, ou quoi, la mère ? T'as qu'à t'bricoler un solo d'guitare pour t'finir. J'sus pas responsabl' d'la mauvaise gestion d'ton fade, ma poule. J't'ai fourni l'matériel haddock en parfait état d'marche, l'reste, j'sus comme Ponce Pilote : j'm'en lave la bite ! Moi, sitôt qu'j'ai découillé, l'cahier des réclamances est fermaga. Si tu permets, j't'emprunte ta culotte pour mes blablutions d'après fornique. Voilà qu'est fait. Chao, la grande. Si t'auras envie d'l'revoir, l'braque à Béru, au lieu d'ta Normandie, appelle-moi, j'sus dans la nuaire. »

Il vient me rejoindre, content de ses transports et nous descendons poursuivre l'enquête.

M. Blanc est dans une embrasure de fenêtre en compagnie de Francine de Saint-Braque. Ils se tiennent face à face sur deux entablements de pierre garnis de coussins et parlent à voix basse. Le cousin Gonzague s'occupe des deux autres dames patronnesses. Tout le monde devise gravement.

En m'apercevant, Jérémie m'adresse un signe d'extrême intelligence et je les rejoins, Francine et lui.

— Madame m'a mis au courant de tous ces événements, dit le dark pote ; j'ai l'impression que le pauvre Riton a, sans le vouloir, découvert une sale histoire où le sadisme est à l'ordre du jour.

— Possible, acquiescé-je.

Comme saisi d'une idée subite, Béru s'élance hors du salon. La cuisinière, épouse du jardinier chenu, grosse vieillarde informe fagotée de bleu, radine afin de demander à mademoiselle des instructions pour le dîner. Francine nous propose de partager le repas du soir avec elle elle et ses compagnons, mais je décline l'invite. Les garçons en rupture de geôle rôdent devant les portes-fenêtres, mal dans leur peau. Ils aimeraient bien prendre la tangente. La fiesta est finie. Cette partouze géante, prolongée sur plusieurs semaines, ne saurait continuer après ce qui vient de se passer. C'est le grand réveil. Va falloir s'occuper d'ailleurs, trouver un autre gîte, brosser d'autres souris, dénicher de la fraîche pour s'assumer. Une atmosphère désespérante commence de nous malaxer le système à tous.

Dame Marguerite réapparaît, les cannes en cerceau, l'hémisphère sud durement meurtri par les assauts du Gros. Personne ne l'interroge car ses clameurs de liesse organique sont parvenues au rez-de-chaussée, chacun sait ce qu'elle vient de faire ; mais ici, ça ne choque que le cousin Gonzague.