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d'imagination, de réflexion, libérée du carcan rationnel de la recherche historique. Le Grand Maître du Prieuré avait sûrement détecté ce talent intuitif à la lecture du manuscrit que lui avait envoyé l'éditeur new-yorkais.

Robert avait découvert une vérité sur le Graal dont Saunière redoutait la diffusion. Il avait demandé à le rencontrer pour tenter de l'en dissuader.

Mais le silence n'avait que trop duré !

Teabing avait également compris qu'il lui fallait agir vite.

L'assassinat du conservateur en chef du Louvre, le jour même du rendez-vous, servait deux objectifs à la fois : primo, Teabing empêchait Saunière de parler à Langdon, secundo, il se réservait la possibilité, une fois en possession de la clé de voûte récupérée par Silas, de recourir à l'aide de l'Américain pour un décryptage éventuel. En ce qui concernait ce deuxième volet, il avait été comblé au-delà de toute espérance par l'arrivée impromptue de Langdon au château de Villette.

Obtenir de Saunière qu'il reçoive Silas au musée s'était révélé d'une simplicité enfantine, étant donné ce que Teabing savait des craintes du Grand Maître du Prieuré. L'albinos avait appelé le conservateur du Louvre en se faisant passer pour un prêtre.

— Pardonnez-moi de vous déranger, mais il faut que je vous parle de toute urgence. Je me vois pour la première fois de ma vie dans l'obligation de rompre le secret du confessionnal. Je viens de recevoir un homme qui m'a avoué avoir assassiné certains membres de votre famille.

Saunière s'était montré à la fois surpris et prudent :

— Ma famille a péri dans un accident de voiture. Le rapport de police était absolument formel.

Silas avait habilement ferré sa proie :

— C'est bien cela. Cette personne me dit avoir forcé le véhicule à faire une embardée qui l'a projeté dans le fleuve.

Monsieur le conservateur en chef, je ne me serais jamais permis de vous appeler si mon pénitent n'avait pas mentionné que le même sort menace aujourd'hui votre petite-fille...

Le tour était joué. Saunière avait demandé à son interlocuteur de venir le retrouver immédiatement dans son

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bureau du musée, l'endroit le plus sûr qu'il connaisse. Sur ces entrefaites, il avait téléphoné à Sophie pour l'avertir qu'elle était en danger. Il n'était plus question de rencontre avec Robert Langdon.

Le pistolet toujours braqué sur Sophie, Teabing avait repris confiance en constatant que Langdon s'était éloigné d'elle pour aller s'isoler dans un coin de la pièce. La cohésion du couple commençait à flancher. Langdon était certainement plus conscient que Sophie de la gravité de la situation, et, si la jeune femme restait intraitable, il avait décidé de réfléchir, seul, à la solution de l'énigme. Il comprend l'importance de la découverte du Graal et de sa divulgation.

— Robert n'ouvrira jamais le cryptex pour vous, lança Sophie sur un ton de défi. Même s'il a découvert le mot de passe.

Teabing, son pistolet toujours braqué sur Sophie, ne quittait pas Langdon des yeux. Il sentit qu'il allait devoir se servir de son arme. Une perspective qui le perturbait, mais il savait qu'il n'hésiterait pas. Je lui ai laissé plusieurs occasions de se rallier à la cause du Graal. Tant pis pour elle si elle ne comprend pas que sa personne ne compte guère devant un enjeu pareil.

Au même instant, Robert se retourna vers eux, les yeux brillant d'une fragile lueur d'espoir.

— La tombe... Je sais ce qu'il faut chercher sur la tombe de Newton ! Je crois que j'ai trouvé le mot de passe !

— Quoi ? Où ça, Robert ? Dites-le-moi ! s'exclama Teabing, soudain transporté de joie.

— Non, Robert, non ! s'écria Sophie horrifiée. Vous n'allez tout de même pas aider ce monstre ?

Langdon s'approcha d'elle, tenant le cryptex devant lui.

— Non, tant qu'il ne vous laissera pas partir, dit-il en fixant Teabing, qui se renfrogna :

— Ne jouez pas au plus malin avec moi, Robert ! menaça-t-il. — Il n'est pas question de jouer. Rangez votre arme et laissez partir Mlle Neveu. Ensuite, nous retournerons tous les

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deux sur la tombe de Newton et nous ouvrirons la clé de voûte ensemble.

— Ce cryptex n'est pas à vous ! protesta Sophie, les yeux brillant de fureur. Il m'a été légué par mon grand-père. C'est à moi, et à moi seule, qu'il revient de l'ouvrir.

— Sophie, je vous en prie. Je suis en train d'essayer de vous aider...

— En me privant du secret que mon grand-père a voulu me transmettre ? Il vous a fait confiance, Robert, et moi aussi !

Langdon lui lança un regard angoissé et Teabing ne put s'empêcher de sourire en les voyant se dresser l'un contre l'autre. Les efforts de Langdon pour se montrer galant étaient surtout pathétiques.

Il est sur le point de découvrir l'un des plus grands secrets de l'histoire de l'humanité, et il écoute les caprices d'une petite bonne femme qui s'est montrée indigne de la quête, pensa Teabing avec mépris.

— S'il vous plaît, Sophie, sortez de cette salle et de l'abbaye, supplia Langdon.

Elle secoua la tête.

— A condition que vous me donniez le cryptex ou que vous le fracassiez sur le sol.

— Quoi ? fit l'Américain, le souffle coupé.

— Robert, mon grand-père préférerait que son secret soit perdu plutôt que de le savoir dans les mains de son assassin.

Sophie, les yeux brillants, semblait sur le point d'éclater en sanglots. Elle fixa pourtant Teabing sans faiblir.

— Abattez-moi si vous voulez, mais je ne laisserai jamais l'héritage de mon grand-père entre vos mains.

— Très bien fit Teabing en armant le Médusa.

— Leigh, n'y songez même pas ou je fracasse le cryptex par terre ! cria Langdon.

— Cette menace a peut-être fait son effet sur Rémy, ricana Teabing, mais sachez qu'avec moi elle ne prend pas. Je vous connais trop bien, Robert.

— Vous êtes sûr ?

Plus encore que vous ne le supposez. Votre coup de poker a échoué. J'ai mis quelques secondes à comprendre la ruse. Vous

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n’avez pas la moindre idée qui nous rapprocherait du mot de passe.

— Très franchement, Robert, vous savez vraiment ce qu'il faut aller chercher sur le monument de Newton ?

— Oui.

L'hésitation dans l'œil de Langdon fut imperceptible, mais elle n'échappa pas à Teabing.

Il ment. Tout cela pour voler au secours de cette gamine.

Ce garçon me déçoit profondément. Je suis un chevalier solitaire, entouré d'âmes indignes. Il me faudra décrypter tout seul la clé de voûte.

Langdon et Sophie ne représentaient plus qu'une menace, pour Teabing... comme pour le Graal. Si douloureuse soit la solution, il s'acquitterait de sa tâche la conscience tranquille. Il ne restait plus qu'à obtenir de Langdon qu'il pose le cryptex afin que Teabing puisse résoudre l'énigme.

— Très bien, Robert. Prouvez-moi votre bonne foi, dit Teabing en abaissant son arme. Posez la clé de voûte devant vous et nous pourrons parler.

Langdon comprit que son bluff avait échoué, Teabing avait lu dans son jeu.

Dès que j'aurai posé le cryptex par terre, il nous tuera tous les deux. Même sans regarder Sophie, il l'entendait implorer dans un désespoir muet. Robert, cet homme est indigne du Graal. S'il te plaît, ne lui donne pas. Quel que soit le prix à payer.

Langdon avait pris sa décision quelques minutes auparavant, devant les arbres de Collège Garden qu'il contemplait à travers les carreaux colorés du vitrail.