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Un jour de canicule sur un véhicule où je circule, gesticule un funambule au bulbe minuscule, à la mandibule en virgule et au capitule ridicule. Un somnambule l'accule et l'annule, l'autre articule: ÒcrapuleÓ, mais dissimule ses scrupules, recule, capitule et va poser ailleurs son cul.

Une hule aprule, devant la gule Saint-Lazule je l'aperçule qui discule à propos de boutules, de boutules de pardessule.

Lettre officielle

J'ai l'honneur de vous informer des faits suivants dont j'ai pu être le témoin aussi impartial qu'horrifié.

Ce jour même, aux environs de midi, je me trouvais sur la plate-forme d'un autobus qui remontait la rue de Courcelles en direction de la place Champerret. Ledit autobus était complet, plus que complet même, oserai-je dire, car le receveur avait pris en surcharge plusieurs impétrants, sans raison valable et mü par une bonté d'âme exagérée qui le faisait passer outre aux règlements et qui, par suite, frisait l'indulgence. à chaque arrêt, les allées et venues des voyageurs descendants et montants ne manquaient pas de provoquer une certaine bousculade qui incita l'un de ces voyageurs à protester, mais non sans timidité. Je dois dire qu'il alla s'asseoir dès que la chose fut possible.

J'ajouterai à ce bref récit cet addendum: j'eus l'occasion d'apercevoir ce voyageur quelque temps après en compagnie d'un personnage que je n'ai pu identifier. La conversation qu'ils échangeaient avec animation semblait avoir trait à des questions de nature esthétique.

Étant données ces conditions, je vous prie de vouloir bien, monsieur, m'indiquer les conséquences que je dois tirer de ces faits et l'attitude qu'ensuite il vous semblera bon que je prenne dans la conduite de ma vie subséquente.

Dans l'attente de votre réponse, je vous assure, monsieur, de ma parfaite considération empressée au moins.

Prière d'insérer

Dans son nouveau roman, traité avec le brio qui lui est propre, le célèbre romancier X, à qui nous devons déjà tant de chefs-d'oeuvre, s'est appliqué à ne mettre en scène que des personnages bien dessinés et agissant dans une atmosphère compréhensible par tous, grands et petits. L'intrigue tourne donc autour de la rencontre dans un autobus du héros de cette histoire et d'un personnage assez énigmatique qui se querelle avec le premier venu. Dans l'épisode final, on voit ce mystérieux individu écoutant avec la plus grande attention les conseils d'un ami, maître ès dandysme. Le tout donne une impression charmante que le romancier X a burinée avec un rare bonheur.

Onomatopées

Sur la plate-forme, pla pla pla, dun autobus, teuff teuff teuff, de la ligne S (pour qui sont ces serpents qui sifflent sur), il était environ midi, ding din don, ding din don, un ridicule éphèbe, proüt proüt, qui avait un de ces couvre-chefs, phui, se tourna (virevolte, virevolte) soudain vers son voisin d'un air de colère, rreuh, rreuh, et lui dit, hm hm: "vous faites exprès de me bousculer, monsieur." Et toc. Là-dessus, vroutt, il se jette sur une place libre et s'y assoit, boum.

Ce même jour, un peu plus tard, ding din don, ding din don, je le revis en compagnie d'un autre éphèbe, proüt proüt, qui lui causait bouton de pardessus (brr, brr, brr, il ne faisait donc pas si chaud que ça…).

Et toc.

Analyse logique

Autobus.

Plate-forme.

Plate-forme d'autobus. C'est le lieu.

Midi.

Environ.

Environ midi. C'est le temps.

Voyageurs.

Querelle.

Une querelle de voyageurs. C'est l'action.

Homme jeune.

Chapeau. Long cou maigre.

Un jeune homme avec un chapeau et un galon tressé autour. C'est le personnage principal.

Quidam.

Un quidam.

Un quidam. C'est le personnage second.

Moi.

Moi.

Moi. C'est le tiers personnage, narrateur.

Mots.

Mots.

Mots. C'est ce qui fut dit.

Place libre.

Place occupée.

Une place libre ensuite occupée. C'est le résultat.

La gare Saint-Lazare.

Une heure plus tard.

Un ami.

Un bouton.

Autre phrase entendue. C'est la conclusion.

Conclusion logique.

Insistance

Un jour, vers midi, je montai dans un autobus presque complet de la ligne s. Dans un autobus presque complet de la ligne S, il y avait un jeune homme assez ridicule. Je montais dans le même autobus que lui, et ce jeune homme, monté avant moi dans ce même autobus de la ligne S, presque complet, vers midi, portait sur la tête un chapeau que je trouvai bien ridicule, moi qui me trouvais dans le même autobus que lui, sur la ligne S, un jour, vers midi.

Ce chapeau était entouré d'une sorte de galon tressé comme celui d'une fourragère, et le jeune homme qui le portait, ce chapeau – et ce galon – se trouvait dans le même autobus que moi, un autobus presque complet parce qu'il était midi; et sous ce chapeau, dont le galon imitait une fourragère, s'allongeait un visage suivi d'un long cou, d'un long, long cou. Ah! qu'il était long le cou de ce jeune homme qui portait un chapeau entouré d'une fourragère, sur un autobus de la ligne S, un jour vers midi.

La bousculade était grande dans l'autobus qui nous transportait vers le terminus de la ligne S, un jour vers midi, moi et ce jeune homme qui plaçait un long cou sous un chapeau ridicule. Des heurts qui se produisaient résulta soudain une protestation, protestation qui émana de ce jeune homme qui avait un si long cou sur la plate-forme d'un autobus de la ligne S, un jour vers midi.

Il y eut une accusation formulée d'une voix mouillée de dignité blessée, parce que sur la plate-forme d'un autobus S, un jeune homme avait un chapeau muni d'une fourragère tout autour, et un long cou; il y eut aussi une place vide tout à coup dans cet autobus de la ligne S presque complet parce qu'il était midi, place qu'occupa bientôt le jeune homme au long cou et au chapeau ridicule, place qu'il convoitait parce qu'il ne voulait plus se faire bousculer sur cette plate-forme d'autobus, un jour, vers midi.

Deux heures plus tard, je le revis devant la gare Saint-Lazare, ce jeune homme que j'avais remarqué sur la plate-forme d'un autobus de la ligne S, ce jour même, vers midi. Il était avec un compagnon de son acabit qui lui donnait un conseil relatif à certain bouton de son pardessus. L'autre l'écoutait attentivement. L'autre, c'est ce jeune homme qui avait une fourragère autour de son chapeau, et que je vis sur la plate-forme d'un autobus de la ligne S, presque complet, un jour, vers midi.

Ignorance

Moi, je ne sais pas ce qu'on me veut. Oui, j'ai pris l'S vers midi. Il y avait du monde? Bien sür, à cette heure-là. Un jeune homme avec un chapeau mou? C'est bien possible. Moi, je n'examine pas les gens sous le nez. Je m'en fous. Une espèce de galon tressé? Autour du chapeau? Je veux bien que ça soit une curiosité, mais moi, ça ne me frappe pas autrement. Un galon tressé… Il s'aurait querellé avec un autre monsieur? C'est des choses qu'arrivent.

Et ensuite je l'aurais de nouveau revu une heure ou deux plus tard? Pourquoi pas? Il y a des choses encore plus curieuses dans la vie. Ainsi, je me souviens que mon père me racontait souvent que…

Passé indéfini

Je suis monté dans l'autobus de la porte Champerret. Il y avait beaucoup de monde, des jeunes, des vieux, des femmes, des militaires. J'ai payé ma place et puis j'ai regardé autour de moi. Ce n'était pas très intéressant. J'ai quand même fini par remarquer un jeune homme dont j'ai trouvé le cou trop long. J'ai examiné son chapeau et je me suis aperçu qu'au lieu d'un ruban il y avait un galon tressé. Chaque fois qu'un nouveau voyageur montait, ça faisait de la bousculade. Je n'ai rien dit, mais le jeune homme au long cou a tout de même interpellé son voisin. Je n'ai pas entendu ce qu'il lui a dit, mais ils se sont regardés d'un sale oeil. Alors, le jeune homme au long cou est allé s'asseoir précipitamment.