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— Je sais. »

Hodges se représente à nouveau une toile d’araignée avec une belle grosse araignée en son centre, une grosse araignée bien venimeuse. Sauf que l’araignée est morte.

Et on crie tous hourra, pense-t-il.

« Holly, est-ce que tu pourrais être à l’hôpital quand les Robinson iront chercher Barbara ?

— Oui, je peux faire ça. » Après une pause, elle reprend : « Je serai heureuse de le faire. Je vais appeler Tanya, voir si ça ne les dérange pas, mais je suis sûre que non. Pourquoi ?

— Je veux que tu montres à Barb un tapissage photographique de six. Cinq vieux mecs blancs en costume, plus le Dr Felix Babineau.

— Tu penses que Myron Zakim était le médecin de Hartsfield ? Que c’est lui qui aurait donné leurs Zappit à Barbara et Hilda ?

— Pour l’instant, c’est juste une intuition. »

L’affirmation est modeste. C’est un peu plus que ça, en fait. Babineau a foutu un bobard à Hodges pour l’empêcher d’entrer dans la chambre de Brady, puis il a failli péter les plombs quand Hodges lui a demandé s’il se sentait bien. Et puis Norma Wilmer prétend qu’il conduisait des expériences non autorisées sur Brady. Enquêtez sur Babineau, elle a dit au Bar-Bar. Coincez-le. Je vous mets au défi. À un homme qui n’a probablement plus que quelques mois à vivre, ça ne semble pas un bien grand défi.

« OK, Bill. Je respecte tes intuitions. Et je dois pouvoir trouver une photo du Dr Babineau dans les pages mondaines d’une de ces soirées de bienfaisance qu’ils organisent toujours pour l’hôpital.

— Bien. Rappelle-moi le nom de ce fiduciaire, déjà ?

— Todd Schneider. Tu dois l’appeler à huit heures et demie. Si je suis avec les Robinson, j’arriverai plus tard. Je viendrai avec Jerome.

— Oui, bien. Tu as le numéro de Schneider ?

— Je te l’ai envoyé par e-mail. Tu n’as pas oublié comment ouvrir tes e-mails ?

— J’ai le cancer, Holly, pas la maladie d’Alzheimer.

— Dernier jour avant le traitement. N’oublie pas, non plus. »

Comment peut-il oublier ? Ils vont l’hospitaliser dans l’établissement où Brady est mort, et le tour sera joué, la dernière affaire de Hodges restera non résolue. Il déteste cette idée mais il n’y a aucun moyen de la contourner. Les choses vont trop vite.

« Fais-toi un bon petit-déjeuner.

— C’est ce que je vais faire. »

Il coupe la communication et jette un regard nostalgique à la verseuse remplie de café tout chaud. L’odeur est divine. Il la vide dans l’évier et va s’habiller. Il se passera de petit-déjeuner.

13

Finder Keepers semble bien vide sans Holly, mais au moins, le septième étage du Turner Building est silencieux ; la bruyante équipe de l’agence de voyages au bout du couloir n’arrivera pas avant au moins une heure.

Hodges réfléchit mieux avec un bloc à feuilles jaunes devant lui, notant les idées comme elles viennent, cherchant à débrouiller les connexions afin d’obtenir une image cohérente. C’était sa façon de bosser quand il était flic, et il était capable d’établir ces connexions plus souvent qu’à son tour. Il a reçu un grand nombre de décorations au fil des années mais elles sont rangées en vrac sur une étagère de son placard plutôt qu’accrochées au mur. Les décorations n’ont jamais compté pour lui. La récompense, c’était l’éclair de lumière quand la connexion se faisait. Il s’était découvert incapable d’y renoncer. D’où Finders Keepers plutôt que la retraite.

Ce matin, aucune note, seulement des gribouillis de bonshommes-allumettes grimpant une colline, de tornades et de soucoupes volantes. Il est quasi certain que la majorité des pièces du puzzle sont maintenant sur la table, tout ce qu’il a à faire, c’est trouver comment les ajuster, mais la mort de Brady Hartsfield lui fait l’effet d’un carambolage bloquant tout le trafic au beau milieu de son autoroute d’informations personnelles. Chaque fois qu’il jette un œil à sa montre, cinq minutes de plus se sont écoulées. Il devra bientôt appeler Schneider. Le temps qu’il ait terminé son entretien téléphonique avec lui, la bruyante équipe de l’agence de voyages sera là. Après eux, Holly et Jerome. Toute chance de réfléchir dans le calme sera envolée.

Réfléchis aux connexions, a suggéré Holly. Toutes les pistes mènent à lui. Et au concert où il a essayé de se faire sauter.

Oui. Oui, c’est vrai. Les seules personnes éligibles à recevoir des Zappit via le site internet étaient celles — petites filles à l’époque, adolescentes aujourd’hui — pouvant prouver qu’elles étaient au concert, et le site internet est maintenant défunt. Comme Brady, mauvaisconcert.com a déposé le bilan, lâché la rampe, fermé le parapluie, et on crie tous hourra.

Enfin, il écrit deux mots au milieu des gribouillis et les entoure. L’un est concert. L’autre résidu.

Il appelle Kiner Memorial et on lui passe le Bocal. Oui, lui apprend-on, Norma Wilmer est de garde, mais elle est occupée et ne peut répondre au téléphone. Hodges la devine très occupée ce matin, et il espère qu’elle n’a pas trop la gueule de bois. Il laisse un message demandant qu’elle le rappelle dès qu’elle pourra, et ajoute que c’est urgent.

Il continue de gribouiller jusqu’à huit heures vingt-cinq (maintenant c’est des Zappit qu’il dessine, peut-être bien parce qu’il a celui de Dinah dans la poche), puis il appelle Todd Schneider, qui décroche en personne.

Hodges se présente en tant qu’avocat à la consommation pro bono pour le Better Business Bureau[29] et explique qu’il a reçu mission d’enquêter sur certaines consoles Zappit ayant récemment fait leur apparition en ville. Il adopte un ton naturel, presque décontracté :

« Ce n’est pas d’une extrême gravité, d’autant plus que ces Zappit ont été remis gracieusement, mais il semblerait que certains bénéficiaires téléchargent des livres à partir d’une plateforme nommée Cercle des Lecteurs Sunrise et que les contenus arrivent corrompus.

— Le Cercle des Lecteurs Sunrise ? »

Ça a l’air de surprendre Schneider, qui ne brandit cependant aucun bouclier de jargon juridique, et c’est exactement le but recherché par Hodges.

« Comme dans Sunrise Solutions ?

— Eh bien oui, d’où mon appel. D’après ce que je sais, Sunrise Solutions a racheté Zappit, Inc. avant leur faillite.

— C’est exact, mais j’ai épluché des tonnes de documents Sunrise et je n’ai aucun souvenir d’un Cercle des Lecteurs. Et ça m’aurait sauté aux yeux. La vocation de Sunrise étant essentiellement d’avaler des compagnies électroniques plus petites dans l’espoir de tomber sur le coup du siècle. Ce qui malheureusement n’est jamais arrivé.

— Et un Club Zappit ? Ça vous dit quelque chose ?

— Jamais entendu parler.

— Ou alors un site internet appelé Z-End.com ? »

En même temps qu’il pose la question, Hodges se frappe le front. Il aurait dû vérifier ce site lui-même au lieu de remplir une page de gribouillis stupides.

« Non, jamais entendu non plus. » Et voilà que discrètement tinte l’airain du fameux bouclier de jargon juridique. « Parlons-nous d’une fraude à la consommation ? Parce que la législation sur la faillite est très claire à ce sujet et…

— Non, rien de tel, intervient Hodges, calmant le jeu. La seule raison pour laquelle nous avons été saisis est cette histoire de téléchargements corrompus. Et un Zappit au moins était déjà mort à l’arrivée. La personne qui l’a reçu souhaite le renvoyer et peut-être en recevoir un autre.

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29

Littéralement : Bureau pour de Meilleures Affaires. Organisation non gouvernementale dont le but est de favoriser la confiance entre acheteurs et vendeurs.