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– En parlant de chien, reprit Rogue de sa voix doucereuse, sais-tu que Lucius Malefoy t’a reconnu la dernière fois que tu as risqué une petite promenade au-dehors ? Très habile, Black, de te montrer sur un quai de gare où tu ne risquais rien… Ça t’a donné une excuse en acier trempé pour ne plus avoir à quitter ta petite cachette à l’avenir, n’est-ce pas ?

Sirius leva sa baguette.

– NON ! hurla Harry en sautant par-dessus la table pour essayer de se placer entre eux. Sirius, arrête !

– Tu me traites de lâche ? rugit Sirius.

Il voulut écarter Harry mais celui-ci refusa de bouger.

– Je pense que c’est ça, en effet, répondit Rogue.

– Harry-va-t’en-de-là ! gronda Sirius en le poussant de sa main libre.

Au même moment, la porte s’ouvrit et la famille Weasley, accompagnée d’Hermione, entra dans la cuisine. Ils paraissaient tous très heureux, Mr Weasley marchant fièrement au milieu du groupe, vêtu d’un pyjama sur lequel il avait passé un imperméable.

– Guéri ! annonça-t-il d’une voix claironnante. Complètement guéri !

Tout le monde resta alors cloué sur place en voyant la scène qui semblait elle-même figée en pleine action. Sirius et Rogue se tournèrent vers la porte, leurs baguettes magiques toujours pointées l’un sur l’autre, Harry immobile au milieu, un bras tendu vers chacun d’eux pour essayer de les séparer.

– Par la barbe de Merlin, dit Mr Weasley, son sourire s’effaçant de son visage, qu’est-ce qui se passe ici ?

Sirius et Rogue abaissèrent leurs baguettes en même temps. Harry les regarda alternativement : tous deux affichaient une expression de profond mépris mais l’irruption inattendue de tant de témoins semblait les avoir ramenés à la raison. Rogue remit sa baguette dans sa poche et traversa la cuisine à grandes enjambées en passant devant les Weasley sans prononcer un mot. Arrivé devant la porte, il lança un coup d’œil derrière lui.

– Lundi soir, six heures, Potter.

Puis il disparut. Sirius continua de fixer la porte d’un regard furieux, sa baguette magique pendant au bout de son bras.

– Qu’est-ce qui s’est passé ? demanda à nouveau Mr Weasley.

– Rien, Arthur, répondit Sirius, la respiration haletante comme s’il venait de parcourir une longue distance au pas de course. Une simple petite conversation amicale entre deux anciens camarades d’école.

Au prix d’un effort qui paraissait considérable, il parvint à sourire.

– Alors… tu es guéri ? Ça, c’est une bonne nouvelle, une très bonne nouvelle.

– N’est-ce pas ? dit Mrs Weasley en faisant asseoir son mari sur une chaise. Le guérisseur Smethwyck a finalement exercé sa magie, il a trouvé un antidote au venin de ce serpent et Arthur a appris qu’il ne fallait pas bricoler avec la médecine moldue, n’est-ce pas, chéri ? ajouta-t-elle d’un ton menaçant.

– Oui, Molly chérie, répondit Mr Weasley d’une voix penaude.

Le dîner aurait pu être plus joyeux, pour saluer le retour de Mr Weasley. Harry voyait Sirius faire des efforts en ce sens : il se forçait à rire bruyamment aux plaisanteries de Fred et de George ou veillait à remplir les assiettes des convives, mais dès qu’il cessait d’être occupé, il redevenait maussade, soucieux. Harry était séparé de lui par Mondingus et Fol Œil qui étaient venus féliciter Mr Weasley de sa guérison. Il aurait voulu parler à Sirius, lui dire qu’il ne devait pas prêter attention aux réflexions de Rogue, que celui-ci cherchait à le provoquer délibérément et que personne ne pensait qu’il était un lâche sous prétexte qu’il restait enfermé square Grimmaurd, conformément aux instructions de Dumbledore. Mais Harry n’eut pas l’occasion de le faire et d’ailleurs, devant le visage menaçant de Sirius, il se demandait s’il aurait osé amener la conversation sur ce sujet. En revanche, il raconta à mi-voix à Ron et à Hermione qu’il devrait désormais prendre des cours d’occlumancie avec Rogue.

– Dumbledore veut t’éviter de rêver à nouveau de Voldemort, dit aussitôt Hermione. J’imagine que ça ne te manquera pas ?

– Des cours particuliers avec Rogue ? J’aimerais encore mieux faire des cauchemars ! commenta Ron, effaré.

Ils devaient retourner à Poudlard le jour suivant par le Magicobus, escortés de Tonks et de Lupin. Ces derniers prenaient leur petit déjeuner lorsque Harry, Ron et Hermione descendirent dans la cuisine le lendemain matin. Les adultes présents semblaient absorbés dans une conversation à voix basse. Dès que Harry eut ouvert la porte, ils se tournèrent brusquement vers lui et se turent aussitôt.

Après avoir avalé un rapide petit déjeuner, ils s’habillèrent de blousons et d’écharpes pour affronter le froid grisâtre de cette matinée de janvier. Harry éprouvait une désagréable sensation d’oppression dans la poitrine. Il ne voulait pas quitter Sirius. Ce départ lui laissait une mauvaise impression. Il ne savait pas quand ils se reverraient et il se sentait obligé de dire quelque chose à son parrain pour le retenir de prendre des initiatives stupides ; il craignait que les accusations de lâcheté lancées par Rogue l’aient si profondément blessé qu’il lui vienne dès maintenant l’idée d’entreprendre une expédition hasardeuse hors du square Grimmaurd. Mais avant qu’il ait eu le temps de songer à ce qu’il allait dire, Sirius lui fit signe d’approcher.

– Tu vas prendre ceci, murmura-t-il en lui mettant dans la main un paquet mal emballé de la taille d’un livre de poche.

– Qu’est-ce que c’est ? demanda Harry.

– Un moyen de me faire savoir si Rogue se montre trop dur avec toi. Non, ne l’ouvre pas ici !

Sirius jeta un coup d’œil méfiant à Mrs Weasley qui essayait de convaincre les jumeaux de mettre des moufles tricotées main.

– Je doute fort que Molly m’approuve mais je veux que tu t’en serves si tu as besoin de moi, d’accord ?

– O.K., répondit Harry en glissant le paquet dans la poche intérieure de son blouson.

Il n’avait aucune idée de ce que c’était mais il savait que, de toute façon, il ne s’en servirait pas. Ce ne serait pas lui, Harry, qui inciterait Sirius à quitter la sécurité de son refuge, quelle que soit la façon dont Rogue le traiterait pendant ses leçons d’occlumancie.

– Bon, allons-y, dit Sirius.

Avec un sombre sourire, il donna une tape sur l’épaule de Harry et, avant que celui-ci ait pu dire quelque chose, ils montèrent les marches qui menaient dans le hall et s’arrêtèrent, entourés par les Weasley, devant la porte d’entrée, chargée de chaînes et de verrous.

– Au revoir, Harry, prends bien soin de toi, dit Mrs Weasley en le serrant contre elle.

– À bientôt, Harry, et continue à surveiller les serpents pour moi ! dit Mr Weasley d’un ton cordial en lui serrant la main.

– Oui, d’accord, répondit Harry, l’air hagard.

C’était sa dernière chance de recommander à Sirius d’être prudent. Il se retourna, regarda son parrain dans les yeux et ouvrit la bouche pour parler mais, avant d’avoir pu prononcer le moindre mot, Sirius le serra brièvement contre lui et lança d’un ton bourru :

– Veille bien sur toi.

Un instant plus tard, Harry se trouva emporté dans l’atmosphère glacée de l’hiver, Tonks (déguisée ce jour-là en une grande femme aux cheveux gris fer, toute vêtue de tweed) le poussant vers les marches du perron.

La porte du numéro 12 claqua derrière eux et ils suivirent Lupin au bas des marches. Quand il eut posé le pied sur le trottoir, Harry regarda par-dessus son épaule. La maison du numéro 12 rétrécissait rapidement tandis que celles qui l’encadraient s’élargissaient en l’écrasant de plus en plus. En un clin d’œil, elle avait disparu.