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– Sortez ! Sortez, je ne veux plus jamais vous revoir dans ce bureau !

Et tandis que Harry se ruait vers la sortie, un bocal rempli de cafards morts explosa au-dessus de sa tête. Il ouvrit la porte à la volée et fonça dans le couloir. Il ne s’arrêta que lorsqu’il eut mis trois étages entre Rogue et lui. Harry s’appuya alors contre le mur, la respiration haletante, massant son bras meurtri.

Il n’avait pas la moindre envie de retourner de si bonne heure dans la tour de Gryffondor, ni de raconter à Ron et à Hermione la scène à laquelle il venait d’assister. Ce qui horrifiait tant Harry, ce qui le rendait si malheureux, ce n’étaient pas les hurlements de Rogue ou les jets de bocaux. C’était le fait qu’il savait ce que l’on ressent lorsqu’on est humilié au milieu d’un cercle de spectateurs. Il savait exactement ce qu’avait éprouvé Rogue au moment où James Potter l’avait ridiculisé et à en juger par ce qu’il venait de voir, son père était bel et bien le personnage arrogant que Rogue lui avait toujours décrit.

29. CONSEILS D’ORIENTATION

– Mais pourquoi tu n’as plus de cours d’occlumancie ? s’étonna Hermione en fronçant les sourcils.

– Je te l’ai dit, marmonna Harry. Rogue trouve que je peux continuer tout seul, maintenant que j’ai les bases.

– Alors, tu ne fais plus tes drôles de rêves ? demanda Hermione, sceptique.

– Presque plus, répondit Harry en évitant son regard.

– Je ne crois pas que Rogue devrait arrêter ses cours tant que tu n’es pas absolument sûr de pouvoir contrôler tes rêves ! s’indigna Hermione. Harry, je crois que tu devrais aller le voir et lui demander…

– Non, l’interrompit Harry avec force. Laisse tomber, Hermione, d’accord ?

C’était le premier jour des vacances de Pâques et Hermione, comme à son habitude, avait passé une bonne partie de la journée à établir un programme de révisions pour tous les trois. Harry et Ron l’avaient laissée faire : c’était plus facile que de discuter avec elle et d’ailleurs, son tableau pouvait se révéler utile.

Ron avait été abasourdi en découvrant qu’il ne restait plus que six semaines avant leurs examens.

– Je ne vois pas ce qui peut te surprendre là-dedans, commenta Hermione.

Du bout de sa baguette magique, elle tapota les petits carrés du tableau de Ron pour que chaque matière brille d’une couleur différente.

– Je ne sais pas, répondit Ron. Il s’est passé tant de choses.

– Tiens, voilà, dit Hermione en lui tendant le tableau des révisions. Si tu suis ce programme, tout devrait bien se passer.

Ron regarda le tableau d’un air sombre, puis son visage s’éclaira.

– Tu m’as donné une soirée libre par semaine !

– C’est pour l’entraînement de Quidditch, précisa Hermione.

Le sourire de Ron s’effaça.

– À quoi ça sert ? dit-il. On a à peu près autant de chances de gagner la coupe cette année que papa de devenir ministre de la Magie.

Hermione ne répondit rien. Elle regardait Harry qui contemplait d’un regard vide le mur opposé de la salle commune pendant que Pattenrond lui donnait de petits coups de patte sur la main dans l’espoir de se faire gratter les oreilles.

– Qu’est-ce qui ne va pas Harry ?

– Quoi ? dit-il. Oh, rien.

Il prit son exemplaire de la Théorie des stratégies de défense magique et fit semblant de chercher quelque chose dans l’index. Pattenrond abandonna la partie et alla se réfugier sous le fauteuil d’Hermione.

– J’ai vu Cho, tout à l’heure, dit timidement Hermione. Elle n’a pas l’air bien non plus… Vous vous êtes encore disputés ?

– Hein ? Heu… oui, répondit Harry, saisissant cette excuse pour justifier son état.

– À quel sujet ?

– Sa copine Marietta.

– Ça, je te comprends ! dit Ron avec colère en posant son tableau de révisions. Si elle ne nous avait pas dénoncés…

Ron se lança alors dans un discours véhément contre Marietta Edgecombe, ce qui fut très utile à Harry. Il n’avait rien d’autre à faire que de paraître furieux et de hocher la tête en lançant quelques « Ouais » et « Ça, c’est vrai » chaque fois que Ron reprenait son souffle. Il eut ainsi tout le loisir de s’attarder, avec un désarroi grandissant, sur ce qu’il avait vu dans la Pensine.

Ce souvenir semblait le ronger de l’intérieur. À ses yeux, ses parents avaient toujours été tellement merveilleux qu’il n’avait jamais éprouvé la moindre difficulté à repousser les calomnies dont Rogue accablait son père. Des gens comme Hagrid ou Sirius n’avaient-ils pas affirmé à Harry que son père était un homme extraordinaire ? (« Oui, eh bien, regarde donc comment Sirius se conduisait lui-même, dit dans sa tête une petite voix exaspérante… Il était tout aussi horrible, non ? ») Bien sûr, il avait entendu un jour le professeur McGonagall déclarer que son père et Sirius avaient causé bien des ennuis au sein de l’école mais elle les avait plutôt décrits comme des précurseurs des jumeaux Weasley et Harry n’imaginait pas Fred et George suspendant quelqu’un la tête en bas simplement pour s’amuser… à moins qu’ils aient éprouvé pour lui une véritable aversion… Malefoy, peut-être, ou quelqu’un qui le méritait vraiment…

Harry essaya de se persuader que Rogue méritait bel et bien ce que James lui avait infligé. Mais quand Lily avait demandé : « Qu’est-ce qu’il t’a fait ? », James n’avait-il pas simplement répondu : « Le plus gênant, chez lui, c’est le simple fait qu’il existe, si tu vois ce que je veux dire » ? James n’avait-il pas tout déclenché simplement parce que Sirius disait qu’il s’ennuyait ? Harry se souvint qu’au square Grimmaurd, Lupin lui avait raconté que Dumbledore l’avait nommé préfet dans l’espoir qu’il exercerait un certain contrôle sur James et Sirius… Mais dans la Pensine, il était resté assis en laissant faire…

Harry ne cessait de se répéter que Lily, elle, était intervenue. Sa mère s’était conduite avec dignité. Pourtant, le souvenir de son expression lorsqu’elle s’était mise à crier contre James le rendait aussi mal à l’aise que tout le reste. De toute évidence, elle éprouvait du dégoût pour James et Harry ne comprenait pas comment ils avaient pu finir par se marier. Une ou deux fois, il se demanda même si James ne l’y avait pas forcée…

Pendant près de cinq ans, la pensée de son père avait été une source de réconfort, d’inspiration. Chaque fois que quelqu’un lui avait dit qu’il était comme James, il s’était senti rempli de fierté. Et maintenant… Maintenant, il éprouvait une sensation de froid et de détresse quand il pensait à lui.

À mesure que passaient les vacances de Pâques, le temps devenait plus clair et plus chaud, plus venteux aussi, mais Harry, comme les autres élèves de cinquième ou de septième année, restait bouclé à l’intérieur du château, obligé de réviser en faisant des allées et venues à la bibliothèque. Il prétendait que son humeur maussade n’avait pas d’autre cause que l’approche des examens et comme ses condisciples de Gryffondor travaillaient eux aussi jusqu’à la nausée, personne ne mettait son excuse en question.

– Harry, je te parle, tu m’entends ?

– Hein ?

Il se retourna. Ginny Weasley, ébouriffée par le vent, l’avait rejoint à la table de la bibliothèque où il s’était assis tout seul. C’était un dimanche soir, assez tard. Hermione était retournée dans la tour de Gryffondor pour réviser les runes anciennes et Ron avait une séance d’entraînement de Quidditch.

– Oh, salut, dit Harry en rassemblant ses livres. Tu n’es pas à l’entraînement ?

– C’est terminé, répondit Ginny. Ron a dû emmener Jack Sloper à l’infirmerie.