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Il s’interrompit. Il venait d’entendre des bruits de pas lointains.

– C’est Kreattur qui descend ?

– Non, dit Sirius en jetant un coup d’œil derrière lui. Ce doit être quelqu’un de ton côté.

Le cœur de Harry rata quelques battements.

– Je ferais bien d’y aller ! dit-il très vite.

Et il se retira aussitôt de la cheminée du square Grimmaurd. Pendant un bon moment, il lui sembla que sa tête tournoyait sur elle-même. Enfin, elle s’immobilisa à nouveau sur ses épaules et il se retrouva devant l’âtre du bureau d’Ombrage. Les flammes d’émeraude vacillèrent encore quelques instants puis s’éteignirent.

– Vite, vite ! marmonna une voix sifflante derrière la porte du bureau. Ah, elle a laissé ouvert…

Harry plongea sur sa cape d’invisibilité et parvint tout juste à s’en recouvrir avant que Rusard fasse irruption. L’air ravi, le concierge traversa la pièce en parlant tout seul d’un ton fébrile. Puis il ouvrit un tiroir du bureau d’Ombrage et commença à fouiller dans les papiers qu’il contenait.

– Autorisation de donner des coups de fouet… Autorisation de donner des coups de fouet… J’ai enfin le droit de le faire… Ils le méritent depuis tant d’années…

Il retira du tiroir un morceau de parchemin qu’il embrassa avant de retourner précipitamment vers la porte en le serrant contre sa poitrine.

Harry se leva d’un bond, s’assura qu’il n’oubliait pas son sac et que la cape d’invisibilité le recouvrait entièrement puis il ouvrit la porte et se précipita dans le couloir à la suite de Rusard qu’il n’avait jamais vu filer aussi vite de son pas clopinant.

Un étage plus bas, Harry estima qu’il pouvait redevenir visible sans risque. Il ôta sa cape d’invisibilité, la fourra dans son sac et se hâta de poursuivre son chemin. Un grand tumulte monta alors du hall d’entrée. Il dévala l’escalier de marbre et vit une foule qui devait rassembler la quasi-totalité des élèves de l’école.

La scène lui rappelait le soir où Trelawney avait été renvoyée. Les élèves formaient un grand cercle le long des murs (certains d’entre eux, remarqua Harry, étaient couverts d’une substance qui ressemblait à s’y méprendre à de l’Empestine). Les enseignants et les fantômes étaient également présents. Bien visibles dans la foule, on reconnaissait les membres de la brigade inquisitoriale qui affichaient un air satisfait. Peeves voletait au-dessus des têtes en regardant fixement Fred et George. Debout au milieu du cercle, tous deux avaient l’expression caractéristique de quelqu’un qu’on vient de prendre la main dans le sac.

– Bien ! dit Ombrage d’un air triomphant.

Harry s’aperçut qu’elle se tenait devant lui, quelques marches plus bas. Cette fois encore, elle contemplait sa proie avec délectation.

– Alors, vous trouvez amusant de transformer un couloir de l’école en marécage, n’est-ce pas ?

– Très amusant, oui, répondit Fred qui leva le regard vers elle sans manifester le moindre signe de frayeur.

Rusard joua des coudes pour s’approcher d’Ombrage. Il pleurait presque de bonheur.

– J’ai le formulaire, madame la directrice, dit-il d’une voix rauque en brandissant le morceau de parchemin que Harry l’avait vu prendre dans le tiroir du bureau d’Ombrage. J’ai le formulaire et les fouets sont prêts… Oh, s’il vous plaît, donnez-moi l’autorisation de le faire tout de suite…

– Très bien, Argus, dit Ombrage. Vous deux, ajouta-t-elle en regardant Fred et George, vous allez voir ce qui arrive dans mon école aux canailles de votre espèce.

– Eh bien, moi, je crois qu’on ne va rien voir du tout, répliqua Fred.

Il se tourna vers son frère jumeau.

– George, dit-il, je pense que nous n’avons plus l’âge de faire des études à plein temps.

– Oui, c’est bien ce qu’il me semblait, répondit George d’un ton léger.

– Le moment est venu d’exercer nos talents dans le monde réel, tu ne crois pas ? reprit Fred.

– Sans aucun doute, approuva son frère.

Et avant que le professeur Ombrage ait pu dire un mot, ils levèrent leurs baguettes et s’écrièrent d’une même voix :

Accio balais !

Harry entendit un grand bruit quelque part dans le château. Il jeta un coup d’œil sur sa gauche et eut tout juste le temps de se baisser. Les balais de Fred et de George, l’un traînant toujours derrière lui la lourde chaîne et le piton de fer auquel Ombrage les avait attachés, fonçaient dans le couloir en direction de leurs propriétaires légitimes. Ils virèrent sur leur gauche, plongèrent le long de l’escalier et s’arrêtèrent net devant les jumeaux, la chaîne cliquetant bruyamment sur les dalles du sol.

– Au plaisir de ne plus vous revoir, dit Fred au professeur Ombrage en passant une jambe par-dessus le manche de son balai.

– Oui, ne vous donnez pas la peine de prendre de nos nouvelles, ajouta George qui enfourcha également le sien.

Fred jeta un regard circulaire aux élèves rassemblés en une foule attentive et silencieuse.

– Si quelqu’un a envie d’acheter un Marécage Portable semblable à celui dont nous avons fait la démonstration là-haut, rendez-vous au 93, Chemin de Traverse, chez Weasley, Farces pour sorciers facétieux, dit-il d’une voix sonore. Nos nouveaux locaux !

– Réduction spéciale pour les élèves de Poudlard qui jurent d’utiliser nos produits pour se débarrasser de cette vieille grenouille, ajouta George en montrant du doigt le professeur Ombrage.

– ARRÊTEZ-LES ! hurla Ombrage d’une voix suraiguë.

Mais il était trop tard. Tandis que la brigade inquisitoriale s’avançait vers eux, Fred et George décollèrent d’un coup de pied et firent un bond de cinq mètres dans les airs, le piton de fer se balançant dangereusement sous leurs balais. Fred se retourna vers l’esprit frappeur qui voletait à sa hauteur au-dessus de la foule.

– Rends-lui la vie infernale à cette vieille folle, Peeves, lança-t-il.

Et Peeves, que Harry n’avait encore jamais vu obéir à l’ordre d’un élève, ôta de sa tête son chapeau en forme de cloche et se mit au garde-à-vous devant Fred et George qui firent demi-tour sous les applaudissements nourris de la foule avant de s’élancer au-dehors dans le ciel étincelant du crépuscule.

30. GRAUP

L’histoire de la fuite de Fred et de George vers la liberté fut racontée tant de fois dans les jours qui suivirent que Harry était sûr de la voir entrer à l’avenir dans la légende de Poudlard. Au bout d’une semaine, même ceux qui avaient été témoins de la scène furent presque convaincus d’avoir vu les jumeaux fondre en piqué sur Ombrage pour la bombarder de Bombabouses avant de s’envoler au-dehors. Après leur départ, beaucoup parlèrent de les imiter. Harry entendait souvent des propos du genre : « Franchement, certains jours, j’ai envie de sauter sur mon balai et de quitter cet endroit », ou bien : « Encore un cours comme celui-là et je file façon Weasley. »

Fred et George avaient pris les dispositions nécessaires pour qu’on ne les oublie pas de sitôt. Tout d’abord, ils n’avaient laissé aucune instruction sur la façon de faire disparaître le marécage qui occupait le couloir du cinquième étage de l’aile est. On avait vu Ombrage et Rusard essayer divers moyens, mais sans succès. Finalement, le secteur fut interdit d’accès et l’on confia à Rusard, qui grinçait furieusement des dents, la tâche de faire passer les étudiants d’une classe à l’autre en les transportant dans un bac à fond plat. Harry ne doutait pas que des professeurs comme McGonagall ou Flitwick étaient parfaitement capables de débarrasser le couloir de son marécage mais, apparemment, ils préféraient voir Ombrage se débrouiller seule, comme le jour où Fred et George avaient rempli le château de leurs Feuxfous Fuseboum.