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– Cette vieille harpie ! murmura Ron, révolté.

Ils étaient arrivés devant le portrait de la grosse dame qui somnolait paisiblement, la tête appuyée contre le bord du cadre.

– Elle est complètement malade ! Va voir McGonagall, dis-lui quelque chose !

– Non, répondit aussitôt Harry. Je ne veux pas lui donner la satisfaction d’avoir réussi à m’atteindre.

À t’atteindre ? Tu ne peux pas la laisser s’en tirer comme ça !

– D’ailleurs, je ne sais pas quel pouvoir McGonagall a sur elle, dit Harry.

– Dumbledore, alors, parles-en à Dumbledore !

– Non, répondit Harry d’un ton catégorique.

– Et pourquoi pas ?

– Il a d’autres choses en tête.

Ce n’était cependant pas la véritable raison. Harry ne voulait pas demander d’aide à Dumbledore alors que celui-ci ne lui avait pas adressé une seule fois la parole depuis le mois de juin.

– Moi, je crois que tu devrais…, commença Ron mais il fut interrompu par la grosse dame qui les avait regardés d’un air endormi et se mit soudain en colère :

– Vous allez me le donner ce mot de passe ou faut-il que je reste éveillée toute la nuit à attendre la fin de votre conversation ?

Le vendredi s’annonça aussi maussade et pluvieux que le reste de la semaine. Chaque fois qu’il entrait dans la Grande Salle, Harry jetait un regard machinal vers la table des professeurs, mais il n’avait plus grand espoir d’y voir Hagrid et préféra se concentrer sur des problèmes plus immédiats, tels que la montagne de devoirs qu’il avait à faire et la quatrième retenue qui l’attendait avec Ombrage.

Deux choses aidèrent Harry à mieux supporter la journée. D’une part, le week-end approchait. D’autre part, il avait remarqué que la fenêtre du bureau d’Ombrage permettait d’apercevoir au loin le terrain de Quidditch. Même si, comme il en était certain, sa dernière retenue se révélait particulièrement éprouvante, il pourrait avec un peu de chance assister aux essais de Ron. Certes, il s’agissait de bien modestes lueurs mais Harry accueillait avec gratitude tout ce qui pouvait éclairer si peu que ce soit la noirceur de son quotidien. Jamais il n’avait connu une première semaine aussi pénible à Poudlard.

À cinq heures, ce soir-là, il frappa à la porte du bureau d’Ombrage en espérant qu’il s’agirait bel et bien de sa dernière séance et fut invité à entrer. Le parchemin l’attendait sur la table recouverte de dentelles, la plume noire et pointue posée juste à côté.

– Vous savez ce que vous avez à faire, Mr Potter, lui dit Ombrage avec un sourire mielleux.

Harry prit la plume et jeta un coup d’œil par la fenêtre. S’il arrivait à déplacer sa chaise de quelques centimètres vers la droite… Sous le prétexte de se rapprocher de la table, il y parvint. À présent, il voyait au loin l’équipe de Gryffondor voler de long en large au-dessus du terrain tandis qu’une demi-douzaine de silhouettes noires se tenaient au pied des trois buts, attendant apparemment que vienne leur tour de les garder. À cette distance, il était impossible de savoir laquelle de ces silhouettes était celle de Ron.

« Je ne dois pas dire de mensonges », écrivit Harry. La coupure de sa main droite se rouvrit aussitôt et recommença à saigner.

« Je ne dois pas dire de mensonges. » La blessure devint plus profonde, brûlante, cinglante.

« Je ne dois pas dire de mensonges. » Un filet de sang coula sur son poignet.

Il risqua un autre coup d’œil par la fenêtre. Celui qui défendait les buts à cet instant, quel qu’il fût, n’était vraiment pas doué. Katie Bell marqua deux fois pendant les quelques secondes où Harry osa regarder. Espérant vivement que ce gardien ne soit pas Ron, il baissa à nouveau les yeux sur son parchemin constellé de sang.

« Je ne dois pas dire de mensonges.

Je ne dois pas dire de mensonges. »

Il levait la tête chaque fois qu’il pensait pouvoir le faire sans danger, lorsqu’il entendait le grattement de la plume d’Ombrage ou le bruit d’un tiroir qu’elle ouvrait. Le troisième candidat était assez bon, le quatrième épouvantable, le cinquième évita un Cognard avec une habileté exceptionnelle mais laissa passer un tir qu’il aurait pu facilement bloquer. Le ciel s’assombrissait et Harry songea qu’il ne pourrait sans doute rien voir des sixième et septième candidats.

« Je ne dois pas dire de mensonges.

Je ne dois pas dire de mensonges. »

Le parchemin luisait à présent du sang de sa blessure qui lui brûlait douloureusement la main droite. Lorsqu’il leva à nouveau les yeux, la nuit était tombée et le terrain de Quidditch n’était plus visible.

– Voyons si le message est passé, dit la voix doucereuse d’Ombrage une demi-heure plus tard.

Elle s’approcha de lui et tendit ses doigts courts chargés de bagues. Lorsqu’elle lui prit le bras pour examiner les mots inscrits dans sa chair, il ressentit une douleur cuisante non pas au dos de sa main mais à l’endroit de sa cicatrice. Au même instant, il éprouva une étrange sensation quelque part au niveau de son estomac.

Il dégagea son bras de la main d’Ombrage et se leva d’un bond, les yeux fixés sur elle. Elle soutint son regard, un sourire étirant sa bouche large et molle.

– Ah oui, ça fait mal, n’est-ce pas ? dit-elle doucement.

Il ne répondit pas. Son cœur battait très vite et très fort. Lui parlait-elle de sa main ou savait-elle que c’était sa cicatrice qui lui avait fait mal ?

– Eh bien, je crois que j’ai réussi à me faire comprendre, Mr Potter. Vous pouvez partir.

Il ramassa son sac et quitta la pièce aussi vite qu’il le put.

« Calme-toi, se dit-il tandis qu’il montait les escaliers quatre à quatre. Calme-toi, ça ne signifie pas forcément ce que tu crois… »

Mimbulus Mimbletonia ! lança-t-il d’une voix haletante à la grosse dame qui pivota une nouvelle fois sur ses gonds.

Il fut accueilli par un joyeux vacarme. Ron se précipita sur lui, le visage rayonnant, de la Bièraubeurre dégoulinant de la coupe qu’il tenait à la main.

– Harry, j’ai réussi, c’est moi le nouveau gardien !

– Quoi ? Magnifique ! s’exclama Harry qui s’efforçait de sourire le plus naturellement possible alors que son cœur continuait de battre à tout rompre et qu’il sentait le sang couler de sa main douloureuse.

– Prends donc une Bièraubeurre, dit Ron en lui donnant une canette. Je n’ai pas encore réalisé ! Où est Hermione ?

– Là-bas, dit Fred, occupé lui aussi à vider une bouteille de Bièraubeurre.

Il montra du doigt un fauteuil près de la cheminée. Hermione y était assise et somnolait, sa coupe penchant dangereusement dans sa main.

– Pourtant, elle a dit qu’elle était contente quand je lui ai annoncé la nouvelle, commenta Ron, un peu contrarié.

– Laisse-la dormir, dit précipitamment George.

Quelques instants plus tard, Harry remarqua que plusieurs élèves de première année regroupés autour d’eux semblaient avoir récemment saigné du nez.

– Viens là, Ron, et regarde si ces vieilles robes d’Olivier Dubois peuvent t’aller, lui cria Katie Bell. On n’aura qu’à enlever son nom et mettre le tien à la place…

Ron s’éloigna et Angelina s’avança droit sur Harry.

– Désolée d’avoir été un peu brusque avec toi, Potter, dit-elle d’un ton abrupt. Ça finit par être stressant de diriger l’équipe. Parfois, je me dis que j’étais un peu dure avec Dubois.

Elle regarda Ron par-dessus le bord de sa coupe, les sourcils légèrement froncés.

– Écoute, je sais que c’est ton meilleur copain mais entre nous, il n’est pas vraiment fabuleux, dit-elle sans détour. Enfin, je pense qu’avec un peu d’entraînement, il ne s’en sortira pas trop mal. Il y a de bons joueurs dans sa famille. Pour te parler franchement, j’espère qu’à l’avenir, il aura un peu plus de talent qu’il n’en a montré aujourd’hui. Vicky Frobisher et Geoffrey Hooper ont mieux volé ce soir mais Hooper est un vrai pleurnichard, il n’arrête pas de se plaindre de n’importe quoi et Vicky fait partie de tout un tas d’associations. Elle m’a avoué elle-même que si l’entraînement avait lieu aux mêmes heures que son club de sortilèges, elle ferait passer le club en priorité. En tout cas, on a une séance d’entraînement à deux heures demain après-midi, alors, cette fois, arrange-toi pour y être. Et s’il te plaît, essaye d’aider Ron le plus possible, d’accord ?