Выбрать главу

Je regrette de n’avoir pas pu te voir davantage cet été. Critiquer nos parents me chagrine profondément, mais j’ai bien peur qu’il me soit impossible de vivre plus longtemps sous leur toit tant qu’ils continueront à fréquenter la redoutable bande qui tourne autour de Dumbledore. (Si tu écris à maman, tu peux lui dire qu’un certain Sturgis Podmore, qui est un grand ami de Dumbledore, a été récemment envoyé à Azkaban pour avoir tenté de cambrioler le ministère. Voilà qui l’aidera peut-être à ouvrir les yeux sur le genre de délinquants qu’ils côtoient.) Je m’estime pour ma part très heureux d’avoir échappé à la honte d’être associé à de tels personnages – le ministre ne saurait être plus aimable avec moi – et j’espère vraiment, Ron, que tu ne laisseras pas les liens familiaux te dissimuler la nature erronée des croyances et des actions de nos parents. Je souhaite sincèrement qu’avec le temps, ils comprennent à quel point ils se sont trompés et je serai bien entendu tout disposé à accepter leurs excuses lorsque ce jour viendra.

Réfléchis très attentivement, s’il te plaît, à ce que je t’ai dit, particulièrement en ce qui concerne Harry Potter, et reçois à nouveau mes très sincères félicitations pour ta nomination au poste de préfet.

Ton frère,

Percy

Harry leva les yeux vers Ron.

– Bon, eh bien, dit-il en s’efforçant d’adopter le ton de la plaisanterie, si tu veux… heu… comment dit-il déjà ? – Il regarda la lettre de Percy. – Ah oui, c’est ça… « rompre les liens » avec moi, je te promets que je ne deviendrai pas violent.

– Rends-moi ça, demanda Ron, la main tendue. C’est vraiment – dit-il d’une voix saccadée tandis qu’il déchirait en deux la lettre de Percy – le plus grand – il la déchira en quatre – crétin – il la déchira en huit – du monde.

Puis il jeta les morceaux de parchemin dans le feu.

– Allez, viens, il faut finir ça avant l’aube, dit-il vivement à Harry en reprenant le devoir destiné au professeur Sinistra.

Hermione regarda Ron avec une étrange expression.

– Allez, donne, dit-elle soudain.

– Quoi ? s’étonna Ron.

– Donnez-moi vos devoirs, je vais les regarder et les corriger, dit-elle.

– Tu parles sérieusement ? Ah, Hermione, tu nous sauves la vie, dit Ron. Qu’est-ce que je pourrais…

– Tu pourrais dire par exemple : « Nous promettons de ne plus jamais accumuler un tel retard dans nos devoirs », répondit-elle en tendant les deux mains pour prendre leurs copies.

Mais en même temps, son expression était légèrement amusée.

– Merci mille fois, Hermione, dit Harry d’une petite voix.

Il lui donna son devoir et retomba dans son fauteuil en se frottant les yeux.

Il était maintenant plus de minuit et ils étaient seuls dans la salle commune. On n’entendait que le crissement de la plume d’Hermione qui raturait des phrases ici ou là et le bruissement des pages qu’elle tournait en vérifiant certaines données dans les livres étalés sur la table. Harry était épuisé. Il ressentait également un étrange sentiment de vide, un peu nauséeux, qui n’avait rien à voir avec la fatigue mais plutôt avec la lettre dont les morceaux noircis se consumaient à présent au milieu des flammes.

Il savait que la moitié des élèves de Poudlard le trouvaient bizarre, et même fou. Il savait que La Gazette du sorcier avait fait pendant des mois des allusions narquoises à son sujet. Mais le voir écrit ainsi de la main de Percy, savoir que Percy conseillait à Ron de le laisser tomber et même d’aller raconter des histoires sur lui à Ombrage, rendait la situation beaucoup plus réelle à ses yeux que n’importe quoi d’autre. Il connaissait Percy depuis quatre ans, il avait passé des vacances d’été dans sa maison, partagé avec lui une tente pendant la Coupe du Monde de Quidditch, et Percy lui avait même donné la note maximum à l’issue de la deuxième tâche du Tournoi des Trois Sorciers, l’année précédente. Pourtant, aujourd’hui, Percy pensait qu’il était un déséquilibré et pouvait même se montrer violent.

Avec un élan d’affection pour son parrain, il songea que Sirius était la seule personne qui pouvait vraiment comprendre ce qu’il ressentait en cet instant, car il se trouvait dans une situation semblable. Presque tout le monde chez les sorciers le considérait comme un redoutable assassin et l’un des plus fidèles partisans de Voldemort. Et depuis quatorze ans, il devait vivre en sachant cela…

Harry cligna des yeux. Il venait de voir dans le feu quelque chose qui n’aurait pas dû y être. Une image lui était apparue comme dans un éclair puis s’était aussitôt volatilisée. Non… Ce ne pouvait être… Son imagination l’avait abusé parce qu’il pensait à Sirius…

– Bon, alors, écris ça, dit Hermione à Ron.

Elle lui donna son devoir et une feuille recouverte de sa propre écriture.

– Ensuite, tu ajouteras la conclusion que j’ai rédigée pour toi.

– Hermione, tu es vraiment la personne la plus extraordinaire que j’aie jamais rencontrée, dit Ron d’une voix faible. Et si jamais je me montrais à nouveau grossier avec toi…

– … je saurais que tu as retrouvé ton état normal, acheva Hermione. Harry, ce que tu as écrit est très bien à part la fin. Tu as sans doute mal entendu ce que disait le professeur Sinistra, le satellite de Jupiter qu’on appelle Europe est recouvert de glace, pas de garces… Harry ?

Harry avait glissé de son fauteuil et s’était agenouillé sur le vieux tapis brûlé, le regard fixé sur les flammes.

– Heu… Harry ? dit Ron d’une voix hésitante. Qu’est-ce que tu fais par terre ?

– Je viens de voir la tête de Sirius dans le feu.

Harry avait dit cela d’une voix très calme. Après tout, il avait déjà vu la tête de Sirius dans cette même cheminée l’année précédente et il lui avait parlé. Mais, cette fois, il n’en était pas absolument sûr… Elle avait disparu si vite…

– La tête de Sirius ? répéta Hermione. Tu veux dire comme le jour où il a voulu te parler pendant le Tournoi des Trois Sorciers ? Mais il ne pourrait plus faire ça maintenant, ce serait trop… Sirius !

Elle sursauta en regardant le feu. Ron laissa tomber sa plume. Sous leurs yeux, au beau milieu des flammes qui dansaient dans l’âtre, la tête de Sirius venait d’apparaître avec ses longs cheveux noirs qui encadraient son visage souriant.

– Je commençais à craindre que vous n’alliez vous coucher avant que les autres soient partis, dit-il. J’ai vérifié toutes les heures…

– Tu veux dire que, toutes les heures, tu as passé la tête dans le feu ? s’étonna Harry en riant à moitié.

– Juste quelques secondes pour voir si la voie était libre.

– Et si on vous avait surpris ? dit Hermione d’une voix angoissée.

– Je crois qu’il y a une fille – de première année, d’après sa tête – qui a dû m’apercevoir tout à l’heure, mais ne t’inquiète pas, dit Sirius précipitamment en voyant Hermione plaquer une main contre sa bouche. J’étais déjà parti quand elle a voulu regarder de plus près. Elle a sans doute pensé que j’étais une bûche avec une drôle de forme ou quelque chose comme ça.