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Le barman le regarda un instant avec des yeux flamboyants puis, jetant le torchon d’un air agacé, comme si on l’avait interrompu dans une tâche importante, il entreprit de passer à Fred des bouteilles poussiéreuses qu’il prenait sous le comptoir.

– Merci, dit Fred en les distribuant. Allongez la monnaie, s’il vous plaît, je n’ai pas assez d’or pour payer tout ça…

Harry regarda d’un air hébété les élèves prendre leurs bières des mains de Fred et fouiller dans leurs robes de sorcier à la recherche de monnaie. Il n’arrivait pas très bien à imaginer pour quelle raison tous ces gens étaient venus ici jusqu’à ce qu’une horrible pensée lui vienne à l’esprit : peut-être s’attendaient-ils à ce qu’il leur fasse un quelconque discours ? Harry se tourna alors vers Hermione.

– Qu’est-ce que tu leur as raconté ? dit-il à voix basse. Qu’est-ce qu’ils veulent de moi ?

– Je te l’ai dit, ils veulent simplement écouter ce que tu as à leur dire, répondit Hermione d’un ton apaisant.

Mais Harry continuait de la regarder avec une telle expression de fureur qu’elle s’empressa d’ajouter :

– Tu n’as pas besoin de faire quoi que ce soit pour l’instant, c’est moi qui leur parlerai d’abord.

– Salut, Harry, dit Neville, le visage rayonnant, en venant s’asseoir face à lui.

Harry s’efforça de lui rendre son sourire mais ne répondit pas un mot. Il avait la bouche extraordinairement sèche. Cho venait de lui sourire et s’était assise à la droite de Ron. Son amie, qui avait des cheveux bouclés d’une couleur blonde tirant sur le roux, ne souriait pas du tout. Elle lança à Harry un regard méfiant qui signifiait clairement qu’elle ne serait pas venue si elle avait eu son mot à dire.

Par groupes de deux ou trois, les nouveaux arrivants s’installèrent autour de Harry, Ron et Hermione. Certains paraissaient surexcités, d’autres simplement curieux. Luna Lovegood, elle, regardait dans le vide d’un air rêveur. Lorsque tout le monde eut pris une chaise, les bavardages s’évanouirent et tous les yeux se fixèrent sur Harry.

– Heu…, dit Hermione d’une voix que la nervosité rendait légèrement plus aiguë qu’à l’ordinaire, eh bien, heu… bonjour.

Le groupe reporta son attention sur elle mais les regards continuaient de se tourner régulièrement vers Harry.

– Alors, heu… bon, vous savez pourquoi vous êtes ici. Heu… donc, Harry a eu l’idée… Je veux dire (Harry venait de la fusiller du regard), j’ai eu l’idée… que ce serait peut-être bien pour les gens qui veulent étudier la défense contre les forces du Mal – et je veux dire étudier vraiment, pas se contenter des idioties que nous fait faire Ombrage (la voix d’Hermione devint soudain beaucoup plus forte et plus assurée), parce qu’on ne peut pas appeler ça des cours de défense contre les forces du Mal…

– Bravo, dit Anthony Goldstein, ce qui donna du courage à Hermione.

– Donc, j’ai pensé que nous devrions peut-être prendre nous-mêmes les choses en main.

Elle marqua une pause, lança un regard en biais à Harry, puis continua :

– J’entends par là apprendre à nous défendre pour de bon, pas seulement en théorie, mais en jetant réellement les sortilèges…

– Tu veux quand même réussir l’épreuve de défense le jour des B.U.S.E., non ? dit Michael Corner.

– Bien entendu, répondit aussitôt Hermione. Mais, plus encore, je veux suivre un véritable entraînement défensif parce que… parce que… – elle prit une profonde inspiration avant d’achever sa phrase – parce que Lord Voldemort est de retour.

La réaction fut immédiate et prévisible. L’amie de Cho poussa un hurlement aigu et renversa de la Bièraubeurre sur sa robe. Terry Boot eut une sorte de spasme. Padma Patil frissonna des pieds à la tête et Neville laissa échapper un étrange glapissement qu’il parvint à transformer en toux. Tout le monde, cependant, regarda fixement Harry, avec même une certaine avidité.

– Enfin… c’est notre projet, en tout cas, reprit Hermione. Si vous décidez de vous joindre à nous, il faudra voir comment nous ferons pour…

– Où est la preuve que Tu-Sais-Qui est de retour ? demanda d’un ton assez agressif le garçon blond qui jouait dans l’équipe de Poufsouffle.

– Eh bien, Dumbledore le croit…, commença Hermione.

– Tu veux plutôt dire que Dumbledore le croit, lui, dit le garçon blond, en désignant Harry d’un signe de tête.

– Et toi, tu es qui ? demanda Ron d’un ton assez grossier.

– Zacharias Smith, répondit le garçon, et j’estime que nous avons le droit de savoir exactement ce qui lui fait dire que Tu-Sais-Qui est de retour.

– Écoute, reprit aussitôt Hermione, ce n’est vraiment pas l’objet de cette réunion…

– Laisse, Hermione, dit Harry.

Il venait de comprendre pourquoi tant de gens étaient venus jusqu’ici. Hermione aurait dû s’en douter. Certains d’entre eux – peut-être même la plupart – espéraient entendre Harry leur faire un récit de première main de ce qui lui était arrivé.

– Ce qui me fait dire que Vous-Savez-Qui est de retour ? demanda-t-il en regardant Zacharias droit dans les yeux. C’est que je l’ai vu. Mais Dumbledore a déjà raconté l’année dernière à toute l’école ce qui s’était passé et si vous ne l’avez pas cru, lui, alors vous ne me croirez pas, moi, et je n’ai pas du tout l’intention de perdre l’après-midi à essayer de convaincre qui que ce soit.

Tout le monde semblait retenir son souffle pendant que Harry parlait. Il avait l’impression que même le barman l’écoutait. Il le voyait essuyer le même verre avec son torchon crasseux, en le salissant un peu plus à chaque geste.

– Tout ce que Dumbledore nous a dit l’année dernière, répliqua Zacharias avec dédain, c’est que Cedric Diggory a été tué par Tu-Sais-Qui et que tu as ramené son corps à Poudlard. Il ne nous a donné aucun détail, il ne nous a pas expliqué comment Diggory avait été tué et je pense que nous aimerions tous savoir…

– Si tu es venu pour entendre raconter ce qui se passe exactement quand Voldemort assassine quelqu’un, je ne peux rien pour toi, l’interrompit Harry.

Sa colère, toujours prête à exploser ces temps derniers, montait à nouveau en lui. Il ne détacha pas les yeux du visage agressif de Zacharias Smith, bien décidé à ne surtout pas regarder Cho.

– Je ne veux pas parler de Cedric Diggory, d’accord ? Alors, ceux qui sont venus pour ça peuvent repartir tout de suite.

Il lança un regard furieux en direction d’Hermione. Tout cela était de sa faute, pensa-t-il. Elle avait voulu l’exhiber comme une sorte de phénomène de foire et, bien sûr, ils s’étaient tous précipités pour voir s’il avait vraiment des choses si extraordinaires à raconter. Mais personne ne se leva pour partir, pas même Zacharias Smith qui continuait de fixer Harry d’un regard intense.

– Donc, reprit Hermione, la voix à nouveau suraiguë, comme je le disais… si nous voulons apprendre à nous défendre, nous devons nous organiser, décider de la fréquence des cours, de l’endroit où…

– C’est vrai que tu arrives à faire apparaître un Patronus ? demanda à Harry la fille à la longue tresse.

Un murmure intéressé s’éleva du groupe.

– Oui, répondit Harry, un peu sur la défensive.

– Un Patronus corporel ?

L’expression évoqua quelque chose dans la mémoire de Harry.

– Heu… Tu ne connaîtrais pas Mrs Bones, par hasard ? demanda-t-il.

La fille eut un sourire.

– C’est ma tante, dit-elle. Je m’appelle Susan Bones. Elle m’a parlé de ton audience disciplinaire. Alors, c’est vrai ? Tu as fait apparaître un Patronus en forme de cerf ?