"C'est..." dit Rogue. "Ce n'est probablement pas ça, Mlle Felthorne, mais merci d'avoir essayé." Les longs doigts délicats et affûtés par la préparation de potions à des degrés de précision inimaginables s'élevèrent et massèrent les tempes de l'homme. "Le poids de mots si fragiles suffit à me rendre fou. Un pouvoir qu'il ignore... ça doit être plus qu'un sortilège inconnu quelconque. Pas quelque chose qu'il pourrait acquérir par la pratique et l'étude. Quelque talent inné ? Personne ne peut apprendre à être un métamorphomage... et pourtant ce n'est certainement pas là un pouvoir qu'il ignore. Je ne peux pas non plus voir comment les deux pourraient détruire l'autre jusqu'à ce qu'il n'en reste presque rien. Je peux le concevoir dans un sens, mais pas dans l'autre..." Le maître des potions soupira. "Rien de cela n'a de sens pour vous Mlle Felthorne, n'est-ce pas ? Les mots ne sont rien. Ce sont des ombres. C'est l'intonation qu'elle a utilisé qui en portait le sens, et c'est quelque chose que je n'ai jamais pu..."
Le maître des potions laissa sa voix en suspens tandis que Rianne le regardait fixement.
"Une prophétie ?" dit Rianne d'un couinement haut perché. "Vous avez entendu une prophétie ?" Elle avait pris des cours de divination pendant deux mois avant d'abandonner par dégoût et c'est là tout ce qu'elle avait jamais appris sur le fonctionnement de ce domaine.
"J'essaierai une dernière chose," dit Rogue. "Quelque chose que je n'ai pas encore essayé. Mlle Felthorne, écoutez le son de ma voix, la façon dont je le dis, pas les mots eux-mêmes, et dites moi ce vous pensez qu'ils signifient. Pouvez-vous faire cela ? Bien," dit Rogue lorsqu'elle acquiesça docilement, même s'il elle n'était pas du tout sûre de ce qu'elle devait faire.
Et Severus Rogue inspira et entonna : "CAR CES DEUX DIFFERENTS ESFIS NE PEUVENT EXISTER DANS LE MÊME FONGUE."
Son échine en fut parcourue de frissons, et savoir que les mots caverneux avaient été prononcés en imitant une véritable prophétie ne fit qu'aggraver les choses. Sur les nerfs, elle dit la première chose qui lui vint à l'esprit, peut-être influencée par celui avec qui elle se trouvait. "Ces deux différents ingrédients ne peuvent exister dans le même chaudron ?"
"Mais pourquoi pas, Mlle Felthorne ? Quel est le sens d'une telle phrase ? Qu'est-on vraiment en train de nous dire ?"
"Ah..." hasarda-t-elle. "Si les deux ingrédients se mélangent, ils prendront feu et brûleront le chaudron ?"
L'expression de Rogue ne bougea pas d'un millimètre.
"Peut-être," dit-il enfin après qu'ils soient resté assis sur le canapé le temps d'un silence horrible qui sembla durer plusieurs minutes, "cela expliquerait-il le mot devra. Merci, Mlle Felthorne. Vous avez de nouveau été d'une grande aide."
"Je..." dit-elle. "J'ai été heureuse de..." et les mots se bloquèrent dans sa gorge. Le maître des potions l'avait remerciée d'un ton irrévocable et elle savait que le temps de la Rianne Felthorne qui se rappelait ses instants approchait de sa fin. "J'aimerais ne pas avoir à oublier cela, professeur Rogue !"
"J'aimerais," dit Severus Rogue d'un chuchotement si bas qu'elle put à peine l'entendre, "que tout se soit déroulé autrement..."
Le maître des potions se leva du canapé et le poids de sa présence disparut du flanc de Rianne. Il se tourna, sortit sa baguette de ses robes et la dirigea vers elle.
"Attendez..." dit-elle. "Avant cela..."
C'était, de façon curieuse, incroyablement difficile de faire le premier pas pour passer du fantasme à la réalité, de l'imagination à l'action. Même si ce n'était qu'un pas et que cela n'irait jamais plus loin. L'écart à franchir s'allongea, devint la distance séparant deux montagnes.
Le Choixpeau ne lui avait jamais offert Gryffondor...
...était-il juste que la vie d'une femme soit ainsi jugée ?
Si tu ne peux pas le dire maintenant, alors que tu ne t'en souviendras ensuite plus - alors que rien de présent ne se prolongera jamais, comme si tu étais sur le point de mourir - alors quand le feras-tu, quand le diras-tu à qui que ce soit ?
"Pourriez-vous m'embrasser avant ?" dit Rianne Felthorne.
Les yeux noirs de Rogue l'étudièrent si intensément que sa rougeur descendit jusqu'à sa poitrine et elle se demanda s'il savait très bien qu'elle agissait encore en faible, que ce n'était pas un baiser qu'elle avait vraiment voulu.
"Pourquoi pas," dit le maître de potions d'une voix basse, puis il se pencha au-dessus du canapé et l'embrassa.
Ce n'était pas ce qu'elle avait imaginé. Dans ses fantasmes, les baisers de Rogue avaient été fougueux, volés, mais c'était - c'était juste gênant, en fait. Les lèvres de Rogue, pressées contre les siennes, trop fort, les appuyant sur ses dents, sous un mauvais angle, leurs nez plus ou moins tordus, les lèvres de Rogue trop serrées et -
Ce n'est que lorsque le maître des potions se redressa et qu'il recommença à lever sa baguette qu'elle comprit.
"Ce n'était pas..." dit-elle d'une voix curieuse en levant les yeux vers lui ."Ce n'était pas... est-ce que c'était... votre premier..."
Rianne Felthorne cligna des yeux face à la caverne de pierre qu'elle venait de découvrir, avec toujours en main l'extraordinaire rubis qu'elle avait trouvé caché dans la poussière d'un coin. C'était une aubaine incroyable, et elle ne savait pas pourquoi regarder ce rubis la faisait se sentir si triste, comme si elle avait oublié quelque chose, quelque chose qui avait été précieux pour elle.
*Chapter 77*: Épilogues AS : Apparences superficielles
NdT : Waouh ! On arrive vers la fin des épisodes parus en anglais et la longueur des chapitres augmente... Le prochain chapitre sera le plus long de tous, aussi je vous demande pardon d'avance si il y a plus d'erreurs de traduction que d'habitude. J'espère que la fic vous plaît toujours autant !
Après-coup : Albus Dumbledore et...
Le vieux sorcier était assis seul à son bureau dans le non-silence de la pièce, entouré de ses appareils, innombrables et inaperçus ; ses robes étaient d'un jaune et d'un tissu doux, différentes des habits qu'il portait habituellement devant les autres. Sa main ridée tenait une plume et grattait un parchemin d'apparence officielle. Si vous vous étiez débrouillé pour être là, pour regarder son visage ridé, vous n'auriez pas été capable d'en déduire plus au sujet de l'homme que ce que vous auriez compris des appareils énigmatiques qui l'entouraient. Peut-être auriez-vous remarqué que le visage semblait un peu triste et un peu fatigué, mais après tout, Albus Dumbledore avait toujours l'air ainsi lorsqu'il était seul.
Dans le foyer de cheminette ne se trouvaient que des cendres éparpillés et pas une trace de flamme : une porte magique si solidement fermé qu'elle en avait cessé d'exister. Sur le plan matériel, la grande porte de chêne du bureau avait été fermée à double tour ; au-delà, les escaliers infinis demeuraient immobiles ; au pied de ceux-ci, les gargouilles qui bloquaient l'entrée ne coulaient pas, leur pseudo-vie ayant été reprise à la pierre.
Alors, au moment où la plume était au milieu d'un mot, au milieu même d'une lettre -
Le vieux sorcier bondit sur ses pieds à une vitesse qui aurait abasourdi n'importe quel observateur, abandonnant la plume à mi-lettre, la laissant tomber sur le parchemin ; vif comme l'éclair il pivota vers la porte en chêne, ses robes jaunes tournoyant autour de lui et une baguette au pouvoir redouté jaillissant dans sa main -
Et tout aussi abruptement, le vieux sorcier se figea, arrêtant son mouvement au moment même où la baguette touchait sa main.