Harry se détourna des yeux bleus et posa son regard sur le noir métal du sol. Il était clair que le directeur essayait de lui dire quelque chose d'important, et ce n'était pas non plus quelque chose que Harry trouvait idiot.
"Il y avait un Moldu nommé Mohandas Gandhi," dit Harry à l'attention du plancher. "Il pensait que le gouvernement d'Angleterre moldu ne devait pas diriger son pays. Et il refusait de se battre. Il a convaincu son pays entier de ne pas se battre. Au lieu de cela, il a dit aux gens de marcher vers les soldats anglais et de se laisser battre sans résister, et lorsque l'Angleterre n'a plus pu supporter de faire ça, nous avons libéré son pays. J'ai trouvé que c'était très beau lorsque je l'ai lu, que c'était plus digne que toutes les guerres à avoir jamais été menées au canon ou à l'épée. Qu'ils l'aient vraiment fait et que ça ait vraiment marché." Harry inspira à nouveau. "Sauf que j'ai alors découvert que pendant la seconde guerre mondiale, Gandhi avait dit à son peuple que si les Nazis envahissaient l'Inde, ils devraient aussi utiliser la résistance non-violente contre eux. Mais les Nazis auraient juste tiré à vue. Et peut-être Winston Churchill s'est-il toujours dit qu'il aurait dû y avoir un meilleur moyen, un moyen intelligent de gagner sans avoir à faire de mal à que que ce soit, mais il ne l'a jamais trouvé et il a donc dû se battre." Harry releva les yeux vers le directeur, qui le regardait. "Winston Churchill est celui qui a essayé de convaincre le gouvernement d'Angleterre de ne pas donner la Tchécoslovaquie à Hitler en échange d'un traité de paix, qui a essayé de les convaincre de se battre tout de suite -"
"Je reconnais le nom, Harry," dit Dumbledore. Les lèvres du vieux sorcier s'élevèrent brièvement. "Même si l'honnêteté me force à dire que ce bon vieux Winston n'a jamais été prompt aux remords, même après une douzaine de shots de Whisky Pur Feu."
"L'idée étant," dit Harry après une brève pause lors de laquelle il se rappela à qui exactement il était en train de parler et combattit le sentiment, revenu une fois de plus, qu'il était un enfant ignorant devenu fou d'audace qui n'avait aucun droit d'être dans cette pièce et aucun droit de remettre en question Albus Dumbledore sur quoi que ce soit, "l'idée étant que ce n'est pas une réponse de dire que la violence, c'est le mal. Ça ne dit pas quand se battre et quand ne pas se battre. C'est une question difficile, Gandhi a refusé de s'y confronter, et c'est pour ça que j'ai perdu une partie de mon respect pour lui."
"Et ta propre réponse, Harry ?" dit doucement Dumbledore.
"Une réponse est qu'on ne devrait jamais utiliser la violence, sauf pour arrêter la violence," dit Harry. "On ne devrait jamais risquer la vie de quelqu'un, sauf pour sauver encore plus de vies. Ça sonne bien quand on le dit comme ça. Sauf que le problème, c'est que si un policier voit un voleur cambrioler une maison, il devrait essayer d'arrêter le voleur même si celui-ci risque de se défendre et que quelqu'un risque de souffrir ou même d'être tuer. Même si le voleur n'essaie de prendre que des bijoux, qui ne sont que des objets. Parce que si personne n'est là pour ne serait-ce qu'incommoder les voleurs, il va y avoir encore et toujours plus de voleurs. Et même s'ils ne faisaient que voler des choses à chaque fois, ça... le tissu social..." Harry s'interrompit. Dans cette pièce, ses pensées n'étaient pas aussi ordonnées qu'il avait l'habitude de le prétendre. Il aurait dû être capable de fournir une explication parfaitement logique en termes de théorie des jeux, il aurait au moins dû être capable de voir les choses sous cet angle, mais cela lui échappait. Ceux qui coopèrent et les traîtres... "Vous ne voyez pas que si les gens méchants sont prêts à prendre le risque d'être violents pour obtenir ce qu'ils veulent et que les bons cèdent toujours parce que la violence est trop terrible, c'est... ce n'est pas une société où il fait bon vivre, M. le directeur ! Vous ne vous rendez pas compte de ce que toutes ces brutalisations font à Poudlard, et à Serpentard encore plus ?"
"La guerre est trop terrible", dit le vieux sorcier. "Et pourtant elle viendra. Voldemort revient. Les pièces noires se rassemblent. Dans cette guerre, Severus est l'une des pièces les plus importantes de notre camp. Mais notre mauvais maître des potions doit sauver les apparences, comme on dit. Si Severus peut payer ce tribu en faisant de la peine à des enfants, seulement de la peine, Harry," la voix du vieux sorcier était très douce, "il faudrait que tu sois terriblement innocent en matière de guerre pour penser que tu as fait une mauvaise affaire. Les décisions difficiles ne ressemblent pas à ça, Harry. Elles ressemblent... à ça." Le vieux sorcier ne bougea pas. Il resta simplement là, entre les piédestaux.
"Vous ne devriez pas être directeur", dit Harry, une sensation de brûlure dans sa gorge. "Je suis désolé, je suis tellement désolé mais vous ne devriez pas essayer d'être un directeur d'école et de mener une guerre en même temps. Poudlard ne devrait pas être impliquée."
"Les enfants survivront," dit le vieux sorcier aux yeux fatigués. "Ils ne survivraient pas à Voldemort. T'es-tu déjà demandé pourquoi les enfants de Poudlard ne parlent pas beaucoup de leurs parents, Harry ? C'est parce qu'il y a toujours, à portée d'oreille, quelqu'un qui a perdu son père, sa mère ou les deux. C'est ce que Voldemort a laissé derrière lui la dernière fois qu'il est venu. Rien ne mérite que cette guerre recommence ne serait-ce qu'un jour avant qu'il ne puisse en être autrement ni qu'elle dure un jour de plus que nécessaire." Le vieux sorcier fit alors un geste, comme pour montrer toutes les baguettes fracassées. "Nous ne nous battions pas parce que nous voulions être vertueux ! Nous nous battions parce que nous y étions obligés, parce qu'il n'y avait aucun autre moyen. C'était notre réponse."
"Est-ce pour cela que vous avez attendu si longtemps avant de vous confronter à Grindelwald ?"
Harry avait posé la question sans vraiment réfléchir -
Le temps s'écoula lentement pendant que les yeux bleus le scrutaient.
"À qui as-tu été parler, Harry ?" dit le vieux sorcier. "Non, ne réponds pas. Je sais déjà." Dumbledore soupira. "Nombre d'entre eux m'ont posé cette question et j'ai toujours évité de leur répondre. Pourtant, tu devras un jour apprendre toute la vérité sur cette affaire. Promettras-tu de ne jamais en parler à un autre avant que je ne te le permette ?"
Harry aurait aimé pouvoir le dire à Draco mais - "Je promets," dit-il.
"Grindelwald possédait un objet terrible et ancien," dit Dumbledore. "Tant qu'il l'avait en sa possession, je ne pouvais briser ses défenses. Je ne pouvais gagner notre duel, seulement le combattre pendant de longues heures jusqu'à ce qu'il tombe d'épuisement ; et j'en serais ensuite mort sans Fumseck. Mais tant que ses alliés Moldus continuaient de faire des sacrifices de sang pour le maintenir, il ne serait pas tombé. À cette époque, il était véritablement invincible. De ce sombre objet que possédait Grindelwald, personne ne doit rien savoir, ne doit rien soupçonner, il ne doit pas y avoir un seul indice. Et tu n'en parleras donc pas, et je n'en dirai pas plus pour le moment. C'est tout Harry. Il n'y a pas de morale, pas de sagesse à cette histoire. C'est tout ce qu'il y a."
Harry hocha lentement la tête. Étant donné ce qu'il avait vu de la magie, ce n'était pas entièrement impensable...