"Tout à fait, M. Potter," dit Minerva, elle n'y avait même pas réfléchi, les mots semblaient juste sauter hors de ses lèvres. "Albus, qui surveille Mlle Granger en ce moment ?"
"Le professeur Flitwick est allé la voir," dit le directeur.
"Elle a besoin d'un avocat," dit Harry. "Quelqu'un qui se contente de dire 'c'était moi' à la police..."
"Malheureusement," dit Minerva en se rapprochant sans s'en rendre compte du ton sévère du professeur McGonagall, "je doute qu'un avocat serait d'une quelconque utilité à ce Mlle Granger à ce stade, M. Potter. Elle fera face au jugement du Magenmagot et il est hautement improbable qu'il la libèrent à cause d'un vice de procédure."
Harry la regardait avec une expression de plus incrédules, comme si la suggestion que Hermione puisse se passer d'un avocat était analogue à celle qu'il faille l'immoler par le feu.
"Elle a raison, M. Potter," dit doucement Severus. "Peu de procédures judiciaires dans ce pays font appel à des avocats."
Harry souleva ses lunettes et se frotta les yeux. "Très bien. Et comment exactement tire-t-on Hermione d'affaire ? J'imagine que ce serait trop d'espérer qu'une fois tous les avocats partis, les juges comprennent les concepts de 'sens commun' et de 'probabilité à priori' assez bien pour se rendre compte que les filles de douze ans ne commettent essentiellement jamais de meurtre ?"
"C'est au Magenmagot qu'elle fait face," dit Severus. "Les plus anciennes des maisons Nobles, et certains autres sorciers influents." Le visage de Severus se tordit en quelque chose qui s'approchait de son sarcasme habituel. "Quant à ce qu'ils fassent preuve de sens commun... vous pourriez aussi bien vous attendre à ce qu'ils vous fassent un sandwich au bacon, Potter."
Harry hocha la tête, mâchoire serrée. "À quelle peine Hermione fait-elle face, exactement ? Baguette confisquée, expulsion..."
"Non," dit Severus. "Rien d'aussi léger. Faites-vous exprès de ne pas comprendre, Potter ? Elle fait face au Magenmagot. Il n'y a pas de peine préécrite. Il n'y a que le vote."
Harry Potter murmura : "L'autorité de la loi, en ces temps complexes, s'est avérée déficiente. Nous aimons mieux l'autorité des hommes, elle est beaucoup plus efficace... Alors il n'y a aucune contrainte légale ?"
De la lumière miroita sur les lunettes en demi-lune du vieux sorcier ; il parla avec précaution mais pas sans colère. "Légalement, Harry, nous avons affaire à une dette de sang de Hermione Granger envers la maison Malfoy. Le Lord des Malfoy propose un remboursement de cette dette et le Magenmagot vote sur cette proposition. C'est tout."
"Mais..." dit lentement Harry. "Lucius a été réparti à Serpentard, il doit se rendre compte que Hermione n'est qu'un pion. Pas celle à qui il devrait vraiment en vouloir. Pas vrai ?"
"Non, Harry Potter," dit lourdement Albus Dumbledore. "C'est ce que tu souhaites que Lucius Malfoy pense. Lucius Malfoy lui-même... ne partagera pas ton désir de le voir penser ainsi."
Harry regarda le directeur d'un regard qui devint de plus en plus froid tandis qu'au même moment, Minerva dut resserrer sa prise sur ses émotions, arrêter ses déambulations et essayer de respirer. Elle avait essayé de ne pas y penser, de garder ses pensées à l'écart, mais elle le savait. Elle l'avait su depuis l'instant où elle avait entendu la nouvelle. Elle pouvait le voir dans les yeux d'Albus...
"Risque-t-elle la peine capitale ?" dit doucement Harry, et des frissons descendirent le long de la colonne vertébrale de Minerva lorsqu'elle entendit les nuances contenues dans la voix qui avait prononcé ces mots.
"Non," dit Albus. "Non, pas le Baiser, pas Azkaban, pas pour une élève de Poudlard en première année. Notre pays n'est pas perdu à ce point, pas encore."
"Mais Lucius Malfoy", dit Severus d'une voix sans timbre, "ne sera certainement pas satisfait de ne voir que sa baguette confisquée."
"Très bien," dit Harry avec autorité. "Comme je vois les choses, nous avons essentiellement deux plans d'action. Premier plan, trouver le véritable coupable. Second plan, pouvoir influencer Lucius. Le professeur Quirrell a sauvé la vie de Draco, cela créé-t-il une dette de sang de la maison Malfoy envers lui qu'il pourrait racheter pour annuler celle de Hermione ?"
Minerva cilla à nouveau de surprise.
"Non," dit Dumbledore. Le vieux sorcier secoua la tête. "C'était une idée maline, mais non, Harry, j'ai peur que non. Même au cas peu probable où le professeur de Défense s'avérerait appartenir à une maison Noble, il existe une exception lorsque le Magenmagot soupçonne qu'une dette a été créé délibérément et dans ce but précis. Et le professeur de Défense est loin d'être au-dessus de tout soupçon. C'est ce que Lucius soutiendrait."
Harry hocha une fois la tête, le visage serré. "Un roturier peut donc avoir un dette de sang envers une maison Noble, mais pas l'inverse. Je ne sais pas pourquoi mais je ne suis pas surpris. Mais la maison Potter est une maison Noble, à ce que j'ai compris. M. le directeur, je sais que j'ai dit que je ne le ferai pas – mais étant donné les circonstances – cette fois où Draco m'a lancé un sortilège de torture, est-ce une dette suffisante pour..."
"Non," dit le vieux sorcier (au moment même où elle lâchait un "Quoi ?" et où Severus soulevait un sourcil). "Cela n'aurait pas suffit, et ce n'est plus une dette du tout. Tu es un Occlumens et tu ne peux pas témoigner sous Veritaserum. Draco Malfoy pourrait être purgé de son souvenir de l'événement avant de pouvoir témoigner..." Albus hésita. "Harry... quoi que tu aies fait avec Draco, tu dois partir du principe que Lucius Malfoy sera bientôt au courant."
La tête de Harry plongea dans ses mains. "Il va donner du Veritaserum à Draco."
"Oui," dit doucement Albus.
Le Survivant ne dit rien, assit, la tête entre les mains.
Le maître des potions avait l'air sincèrement abasourdi. "Draco essayait vraiment d'aider Mlle Granger," dit-il. "Vous... Potter, vous l'avez vraiment..."
"Fait changer de camp ?" dit Harry entre ses mains. "J'en étais à peu près aux trois quarts. Je lui ai appris le Patronus et tout ça. Mais maintenant, je ne sais pas ce qui va se passer."
"Voldemort nous a sévèrement atteints aujourd'hui," dit Albus. La voix du vieux sorcier rappelait l'apparence du garçon dont la tête était entre ses mains. "Il a pris deux de nos pièces d'un seul... non. J'aurais dû le voir plus tôt. Il a pris deux des pièces de Harry d'un seul coup. Voldemort a recommencé son jeu, pas contre moi mais contre Harry. Voldemort connaît la prophétie, il sait qui sera son dernier ennemi. Il n'attend pas d'avoir à faire face à Hermione Granger et Draco Malfoy aux côtés de Harry lorsqu'ils auront grandi. Il s'en prend à eux maintenant."
"Peut-être est-ce Vous-Savez-Qui, peut-être pas," dit Harry d'une voix légèrement instable. "Ne rétrécissons pas l'espace de nos hypothèses prématurément." Harry inspira et abaissa les mains. "L'autre possibilité est de coincer le véritable coupable avant le procès – ou au moins de trouver de bonnes preuves que quelqu'un d'autre est coupable."
"M. Potter," dit Minerva. "Le professeur Quirrell a parlé aux Aurors d'une personne ayant un motif de faire du mal à Malfoy. Savez-vous de qui il parlait ?"
"Oui," dit Harry après avoir hésité. "Mais je pense que je poursuivrai cette partie de mon enquête avec le professeur de Défense – tout comme je n'aurais pas souhaité avoir le professeur Quirrell dans cette pièce lorsque nous discutions de la façon dont nous allions enquêter sur lui."
"Il me soupçonne ?" dit Severus, puis il eut un rire bref. "Ah, mais évidemment qu'il me soupçonne."