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Dans un coin de son champ de vision, Harry put voir une Mme Pomfresh a l'air surprise se tourner vers eux. Dumbledore sembla ne prêter aucune attention à la guérisseuse en chef alors qu'il allongeait précautionneusement Hermione sur un lit blanc vide.

Dans un coin lointain il y eut un flash vert et d'un feu émergea le professeur McGonagall qui s'époussetait un peu des cendres de Cheminette.

Le vieux sorcier se détourna du lit, tendit un de ses bras pour entourer de nouveau Harry et le Survivant et son sorcier disparurent dans un autre embrasement.

Lorsque Harry se fut entièrement rallumé, il se tenait dans le bureau du directeur, entre les bruits d'une dizaine de dizaines de gadgets inexplicables.

Le jeune garçon fit un pas pour s'écarter du vieux sorcier puis se retourna vers lui, croisant les yeux de saphir de son regard d'émeraude.

Ils ne parlèrent pas pendant un moment et se regardèrent, comme si tout ce qu'ils avaient à se dire pouvait seulement être communiqué par des regards et d'aucune autre façon.

Le garçon finit par énoncer ces mots, lentement et précisément :

"Je ne peux pas croire qu'un phénix se trouve encore sur votre épaule."

"Les phénix ne choisissent qu'une fois," dit le vieux sorcier. "Ils peuvent peut-être quitter un maître qui choisit le mal plutôt que le bien ; mais ils ne choisiront pas un maître forcé de choisir entre un bien et un autre. Les phénix ne sont pas arrogants. Ils connaissent les limites de leur propre sagesse." Son regard ancien était des plus sévères "Contrairement à toi, Harry."

"Choisir entre un bien et un autre," dit Harry en écho, sans timbre. "Comme la vie de Hermione Granger contre cent mille Gallions." La rage et l'indignation que Harry avait voulu mettre dans sa voix n'était pas tout à fait présente, peut-être parce que...

"Tu es loin d'être bien placé pour me parler de cela, Harry Potter." La voix du directeur était trompeusement douce. "Ou qu'était cet air récalcitrant que j'ai vu sur ton visage, là-bas, dans la Très Ancienne Chambre ?"

La sensation qu'il avait d'être creux empira. "Je cherchais des alternatives," mordit-il. "Un moyen de la sauver qui ne me fasse pas perdre d'argent."

Waoh, dit Serdaigle. Tu viens de proférer un mensonge pur et simple. Non seulement ça mais en plus je crois que tu y a vraiment cru pendant les secondes que tu as mises à le prononcer. Ça fait plutôt peur.

"Est-ce ce à quoi tu pensais, Harry ?" Les yeux bleus étaient comme acérés et Harry vécut un instant terrifiant pendant lequel il se demanda si le sorcier le plus puissant du monde pouvait parfaitement voir à travers ses barrières occlumantiques.

"Oui," dit Harry, "j'ai reculé face à la douleur de me défaire de tout l'argent de ma chambre forte. Mais je l'ai quand même fait ! C'est ça qui compte ! Et vous..." l'indignation qui avait quitté la voix de Harry revint. "Vous avez vraiment mis un prix sur la vie de Hermione Granger et vous l'avez mis en-dessous de cent mille Gallions !"

"Oh ?" dit doucement le vieux sorcier. "Et quel prix mettrais-tu sur sa vie, alors ? Un million de Gallions ?"

"Êtes-vous familier du concept économique de 'coût de remplacement' ? Les mots jaillissaient des lèvres de Harry trop vite pour qu'il puisse les examiner. "Le coût de remplacement de Hermione est infini ! Je ne peux m'en racheter une autre nulle part !"

Maintenant tu profères juste des non-sens mathématiques, dit Serpentard. Serdaigle, tu peux me soutenir sur ce coup ?

"La vie de Minerva a-t-elle aussi une valeur infinie ?" dit le vieux sorcier d'un ton brusque. "Sacrifierais-tu Minerva pour sauver Hermione ?"

"Oui et oui," lâcha Harry. "Ça fait partie du travail du professeur McGonagall et elle le sait."

"Alors la valeur de Minerva n'est pas infinie," dit le vieux sorcier, "malgré tout l'amour qu'on peut lui porter. Il ne peut y avoir qu'un seul roi sur l'échiquier, Harry Potter, une seule pièce pour laquelle tu sacrifierais n'importe quelle autre pièce afin de la sauver. Et Hermione Granger n'est pas cette pièce. Ne t'y trompes pas, Harry Potter, aujourd'hui est peut-être le jour où tu as perdu notre guerre."

Et si les mots du vieux sorcier ne l'avaient pas touché si durement, n'avaient pas été aussi proches de la vérité, Harry n'aurait peut-être pas dit ce qu'il dit alors.

"Lucius avait raison," grinça Harry. "Vous n'avez jamais eu de femme, vous n'avez jamais eu de fille, vous n'avez jamais eu que la guerre..."

La main gauche du vieux sorcier se referma avec force autour du poignet de Harry, les doigts osseux s'enfoncèrent dans les muscles encore en développement du bras de ce dernier, et l'espace d'un instant Harry fut paralysée par le choc ; il avait oublié les conséquences que pouvait avoir la force supérieure des adultes.

Albus Dumbledore ne sembla pas le remarquer. Il se contenta de pivoter en traînant Harry derrière lui et s'avança d'un pas dur vers le mur de la pièce.

"Prix du phénix ."

Harry fut tiré le long des escaliers noirs.

"Destin du phénix."

La pièce aux piédestaux noirs et à la lumière d'argent tombant sur des baguettes fracassées.

"Vous pensez," cria Harry après que ses lèvres se furent débloquées, "que vous pouvez gagner n'importe quel débat juste en allant ici ?"

Le vieux sorcier l'ignora et traîna Harry à travers la pièce. Sa main droite ne tenait plus sa baguette et saisit une fiole d'un fluide argenté...

Harry cligna des yeux, stupéfié : la fiole au fluide argenté avait été placée à côté d'une image de Dumbledore, ou du moins c'est ainsi que Harry l'avait vu pendant le bref moment où il s'était fait traîner devant l'image.

Derrière tous les piédestaux, dans la partie la plus éloignée de la pièce, s'élevait un grand bassin de pierre gravé de runes que Harry ne reconnut pas. Son centre était peu profond et rempli d'un liquide transparent. Le vieux sorcier y déversa le fluide argenté qui commença immédiatement à se répandre, à tourbillonner, et à illuminer le bassin entier d'un blanc surnaturel.

La main du vieux sorcier relâcha le bras de Harry et fit un geste en direction du bassin lumineux, ordonnant d'un ton brusque : "Regarde !"

Comme on le lui avait demandé, Harry regarda l'eau lumineuse.

"Mets ta tête dans la Pensine, Harry Potter." La voix du vieux sorcier était sévère.

Harry avait déjà entendu ce mot mais il n'arrivait plus à se souvenir du contexte. "Qu'est-ce... que ça fait..."

"Souvenirs," dit le vieux sorcier. "Tu verras mon souvenir. C'est sans danger, je t'en fais le serment. Maintenant regarde dans la Pensine, Serdaigle, si tu te soucies encore de ta précieuse vérité !"

C'était une demande que Harry ne pouvait pas rejeter, aussi il s'avança et plongea sa tête dans l'eau lumineuse.

Harry était assis derrière le bureau du directeur de Poudlard et les mains ridées agrippées à sa tête étaient marquées par l'âge et parsemées de poils blancs.

"Il est tout ce que j'ai !" pleura une voix, l'étrange voix de Dumbledore telle que lui s'en souvenait ; de l'intérieur elle semblait bien moins sévère et bien moins sage. "Le dernier membre de ma famille ! Tout ce qui me reste !"

On n'avait laissé aucun émotion traverser la Pensine, seulement la sensation physique de sembler prononcer ces mots. Harry entendit la profonde désolation dans les mots de Dumbledore, dans les sons qui semblaient venir de la gorge de Harry lui-même, mais il ne ressentit rien d'autre que ce son.