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Auriez-vous pu lever les yeux vers le ciel, vers l'étincelante lumière solaire, et déduire que l'univers contenait des sources de pouvoir plus fortes qu'un simple feu ? Auriez-vous compris que si les lois fondamentales de la physique le permettaient, un jour les humains puiseraient dans les mêmes énergies que le Soleil ? Même si rien que vous puissiez imaginer faire avec un lance-pierre ou avec une outre tressée – aucun déplacement à travers la savane, aucun gibier que vous puissiez chasser – n'aurait permit de l'accomplir, ne serait-ce qu'en imagination ?

Ce n'était pas comme si les Moldus modernes s'étaient en quoi que ce soit approchés des limites énoncées par la physique moldue. Et pourtant, comme des chasseurs-cueilleurs conceptuellement attachés à leurs lances-pierres, la plupart des Moldus vivaient dans un monde défini par les limites de ce que l'on pouvait faire avec des voitures et des téléphones. Même si les lois de la physique moldue permettaient explicitement des choses telles que la nanotechnologie moléculaire ou le processus de Penrose destiné à extraire de l'énergie de trous noirs, la plupart des gens enregistraient ça là où leur cerveau enregistrait les contes de fées et le contenu des livres d'Histoire, bien loin de leurs réalités personnelle : En un lieu et un temps lointains, si lointains. Ce n'était donc pas surprenant de voir le monde magique vivre dans un univers conceptuellement limité – non pas par les lois fondamentales de la magie que personne ne connaissait de toute façon – mais seulement par les règles superficielles des charmes et sortilèges connus. On ne pouvait pas observer la façon dont la magie était utilisée aujourd'hui et ne pas repenser au musée national d'Australie une fois qu'on se rendait compte de ce que l'on avait sous les yeux. Même si la première idée de Harry avait été fausse, d'une façon ou d'une autre il était toujours inconcevable que les lois fondamentales de l'univers contiennent un cas particulier pour des lèvres humaines formant la phrase 'Wingardium Leviosa'. Et pourtant même cette maîtrise tâtonnante de la magie suffisait à faire des choses qu'un professeur de physique moldu aurait déclaré être pour toujours impossibles : le Retourneur de Temps, de l'eau invoquée à partir de rien par Aguamenti. Quelles étaient les possibilités ultimes si les lois sous-jacentes de l'univers permettaient à un enfant de onze ans armé d'un bâton de transgresser quasiment toutes les contraintes de la version moldue de la physique ?

Comme un chasseur-cueilleur levant les yeux vers le Soleil et devinant que l'univers devait avoir une structure qui donnait naissance à l'énergie nucléaire...

On en venait à se demander si vingt mille millions de millions de millions de mètres n'était pas une distance si longue que ça, après tout.

Il y avait un pas après le Raisonnement Abstrait que Harry pouvait faire avec assez de temps pour préparer son environnement et son esprit ; quelque chose qui dépassait le Harry du Raisonnement Abstrait tout comme ce dernier dépassait le Harry du Moment Présent. En regardant les étoiles, on pouvait essayer d'imaginer ce que les lointains descendants de l'humanité penseraient de son dilemme – dans cent millions d'années, quand les étoiles auraient opérés d'immenses mouvements galactiques, auraient atteint des positions entièrement nouvelles, quand toutes les constellations seraient éparpillées. Un théorème fondamental de la probabilité énonçait que si vous saviez ce que votre réponse serait suite à votre rencontre avec une information encore à venir, vous deviez adopter cette réponse immédiatement. Que si vous connaissiez votre destination, vous y étiez déjà. Et par analogie si ce n'est par théorème, que si vous pouviez deviner ce que les descendants de l'humanité penseraient de quelque chose, vous deviez immédiatement choisir cette opinion comme étant la meilleure actuellement disponible.

Vue d'ici, l'idée de tuer les deux tiers du Magenmagot était bien moins attrayante qu'elle ne l'avait été quelques heures plus tôt. Et même si cela s'avérait nécessaire, même si vous aviez la certitude que c'était le meilleur choix possible pour l'Angleterre magique et que la Trame de l'Histoire en souffrirait si vous ne le faisiez pas... même inévitables, les morts d'êtres sentients demeureraient une tragédie. Un élément de plus parmi les tourments de la Terre ; la Très Ancienne Terre d'où tout était venu, en un lieu et un temps lointains, si lointains.

Il n'est pas comme Grindelwald. Il n'y a plus rien d'humain en lui. Lui, tu dois le détruire. Garde ta furie pour cela, et pour cela seulement -

Harry secoua légèrement la tête, inclinant quelque peu les étoiles qu'il pouvait voir, allongé sur la pierre, les yeux vers le haut, l'extérieur et l'à venir du temps. Même si Dumbledore avait raison, même si le véritable ennemi était absolument fou et maléfique... dans cent million d'années la forme de vie connue sous le nom de Lord Voldemort ne serait probablement pas très différente de tous les autres enfants hagards de l'Ancienne Terre. Quoi qu'il se soit infligé, aussi horriblement irrévocables que ces noirs rituels paraissent à la simple aune humaine, il ne serait pas incurable dans cent millions d'années. Le tuer, même s'il fallait le faire pour sauver d'autres vies, ne serait qu'une mort de plus, une source de tristesse de plus pour les êtres sentients à venir. Comment pouvait-on regarder les étoiles et penser autrement ?

Harry regarda les lumières vacillantes de l'Éternité et se demanda ce que les enfants des enfants de ses enfants penseraient de ce que Dumbledore avait peut-être-fait à Narcissa.

Mais même en essayant de poser la question sous cet angle, de demander ce que les descendants de l'humanité penseraient, on était limité à son propre savoir, pas au leur. La réponse venait toujours de soi, et l'on pouvait toujours se tromper. Si on ne connaissait pas soi-même la centième décimale de pi, alors on ne savait pas comment les enfants de ses enfants de ses enfants la calculeraient, aussi trivial que soit ce fait.

Lentement – il était resté allongé là à regarder les étoiles plus longtemps qu'il ne l'avait prévu – Harry redressa son buste. Puis il poussa sur ses pieds sous les protestations de ses muscles et marcha jusqu'au bord de la plate-forme de pierre située au faîte de la tour de Serdaigle. Les créneaux de pierre qui entouraient le bord n'étaient pas hauts, pas assez hauts pour offrir une sécurité. Ils étaient clairement des marqueurs plutôt que des rambardes. Harry ne s'approcha pas trop près du bord ; il était vain de prendre des risques. En baissant les yeux vers le domaine de Poudlard, il sentit l'étourdissement prévisible, l'affliction chancelante appelée vertige. Il semblait que son cerveau était alarmé parce que le sol plus bas était très distant. Il était peut-être à cinquante mètres de distance.

Il semblait que la leçon à en tirer était que les choses devait être incroyablement proches avant que le cerveau puisse les comprendre suffisamment bien pour produire de la peur.

Rare était le cerveau capable d'éprouver une sensation forte au sujet de quoi que ce soit qui ne fut pas proche dans l'espace, proche dans le temps, proche de soi, à portée de main...

Auparavant, Harry s'était imaginé que se rendre à Azkaban nécessiterait des plans, la coopération d'une confédération d'adultes. Des Portoloins, des balais volants, un sortilège d'invisibilité. Quelque moyen d'atteindre les niveaux inférieurs sans que les Aurors ne le remarquent afin de pouvoir creuser son chemin jusqu'à la fosse centrale où les ombres de la Mort attendaient.

Et cela avait suffit à éloigner l'idée dans le futur, séparée d'un maintenant à l'abri.

Ce n'était pas avant aujourd'hui qu'il s'était rendu compte que ce pourrait être aussi simple que de trouver Fumseck et que de dire au phénix qu'il était temps.