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La comm cliqueta et Amos déclara :

— Paré à faire mouvement.

Holden hocha la tête, se rappela qu’il était toujours dans sa combinaison pressurisée, et répondit :

— D’accord. On s’attache, tout le monde.

Lui, Alex et Naomi tirèrent les filins de raccordement de leurs combinaisons et les accrochèrent autour de la taille d’Amos, lequel déverrouilla le sas de la soute et ouvrit les portes dans des bouffées de gaz. Ils furent immédiatement arrachés au vaisseau par la rotation de la station, mais le mécanicien reprit très vite le contrôle grâce au propulseur, et se dirigea vers le sas de secours de Thoth.

Tandis qu’ils laissaient le Rossi derrière eux, Holden étudia l’extérieur du vaisseau et essaya de recenser les réparations à effectuer. Il y avait une douzaine d’impacts à la proue et à la poupe, qui correspondaient au nombre total de ceux constatés à l’intérieur. Les projectiles magnétiques tirés par l’intercepteur n’avaient sans doute pas perdu beaucoup de vélocité en transperçant la corvette. Ils avaient simplement de la chance qu’aucun de ces tirs n’ait atteint et perforé le réacteur.

Il y avait également une grosse bosse dans la fausse superstructure qui faisait ressembler la corvette à un transport de gaz comprimé. Holden savait que c’était le décalque inversé d’un creux tout aussi laid dans la coque blindée externe. Les dommages ne s’étaient pas étendus à la coque interne, et c’était heureux car le vaisseau se serait alors brisé en deux.

Avec les dégâts subis par le sas, la perte intégrale de leurs réservoirs d’oxygène et de leurs systèmes de recyclage, il faudrait débourser des millions et laisser le vaisseau en cale sèche pendant des mois, en admettant qu’ils puissent arriver quelque part où il y avait des cales sèches.

Le Molinari accepterait peut-être de les remorquer.

Amos alluma brièvement et à trois reprises les lumières orange d’alerte du propulseur, et le panneau du sas d’urgence de la station s’ouvrit. Ils le franchirent en flottant. À l’intérieur, quatre Ceinturiens en tenue de combat les attendaient.

Dès que le cycle du sas prit fin, Holden ôta son casque et tâta son nez. Il semblait avoir doublé de volume, et il le faisait souffrir à chaque battement de cœur.

Naomi tendit les mains et lui immobilisa la tête. Elle posa ses pouces sur les ailes de son nez, dans un geste d’une douceur surprenante, lui fit pivoter la tête dans un sens, puis dans l’autre, et le relâcha.

— Sans un peu de chirurgie esthétique, il sera de travers, dit-elle. Mais vous étiez trop mignon avant, de toute façon. Ça donnera du caractère à votre visage.

Il sentit un sourire naître lentement sur ses lèvres, mais avant qu’il ait le temps de répondre, un des soldats de l’APE se mit à parler :

— On a vu le combat, hermano. Vous leur avez vraiment bien botté le cul.

— Merci, dit Alex. Comment ça se passe, ici ?

— On a rencontré moins de résistance que prévu, dit le soldat ayant le plus d’étoiles sur son insigne de l’APE, mais les forces de sécurité de Protogène se sont battues pied à pied pour chaque mètre carré. Et même certains des crânes d’œuf nous ont attaqués. Il a fallu en abattre quelques-uns.

Il désigna la porte intérieure du sas.

— Fred se rend aux ops. Il veut que vous le retrouviez là-bas, pronto.

— Nous vous suivons, dit Holden, et à cause de son nez ces paroles sonnèrent à ses oreilles comme s’il avait dit ouvouhuivons.

* * *

— Comment va cette jambe, chef ? demanda Amos alors qu’ils marchaient dans un couloir de la station.

Holden se rendit compte qu’il avait oublié sa démarche claudicante due à sa blessure par balle au mollet.

— Ce n’est pas douloureux, mais le muscle ne fonctionne plus aussi bien. Et la vôtre ?

Amos sourit et baissa les yeux sur sa jambe qu’il traînait toujours un peu après la fracture subie à bord du Donnager.

— Pas de problème. Celles qui ne vous tuent pas ne comptent pas.

Holden allait répondre mais ils firent halte après un tournant qui les laissa devant un abattoir, et il resta sans voix. Ils empruntaient le chemin dégagé par les troupes d’assaut, c’était évident d’après les cadavres gisant sur le sol et les impacts de balles dans les murs. Le Terrien fut soulagé de constater qu’il y avait beaucoup plus de victimes portant l’uniforme de Protogène que la tenue de combat de l’APE. Mais il y avait assez de Ceinturiens parmi les morts pour qu’il en ait l’estomac serré. Quand il enjamba un corps vêtu d’une blouse de laborantin, il dut se retenir pour ne pas cracher sur le sol. Les types de la sécurité avaient peut-être fait le mauvais choix en acceptant de travailler pour le mauvais camp, mais les scientifiques présents dans cette station avaient massacré un million et demi de personnes uniquement pour voir ce qui allait se passer. Pour Holden, ils ne pouvaient pas être assez morts.

Il vit quelque chose qui l’intrigua, et fit halte. Sur le sol près d’un scientifique mort se trouvait ce qui ressemblait beaucoup à un couteau de cuisine.

— Euh… Il ne vous a quand même pas attaqués avec ça ?

— Ouais, c’est dingue, hein ? fit un des membres de leur escorte. J’avais entendu parler de types qui auraient sorti une lame face à un flingue, mais…

— Les ops sont juste devant, dit le soldat le plus gradé. Le colonel vous attend.

* * *

Holden entra dans le centre des opérations de la station et vit Fred, Miller, un groupe de soldats de l’APE et un inconnu vêtu avec élégance. Les poignets entravés, des techniciens et d’autres membres du personnel s’éloignaient à la queue leu leu sous la surveillance de leurs gardes. Du sol au plafond, la salle n’était qu’écrans et moniteurs, dont la majorité faisait défiler des données trop rapidement pour qu’on puisse les lire.

— Soyons clairs, disait Johnson. Vous me donnerez tous les royaumes de la Terre si je m’incline et que j’accomplis un acte de dévotion envers vous ?

— Je ne connais pas ce à quoi vous faites référence.

Ils interrompirent cet échange lorsque Miller remarqua leur arrivée et tapota l’épaule de Johnson. Holden aurait pu jurer que l’ex-inspecteur lui adressait un sourire chaleureux, même si sur un visage aussi renfrogné c’était difficile à définir.

Fred leur fit signe d’approcher. Il examinait une carte de visite d’un noir mat.

— Jim, dit-il, je vous présente Antony Dresden, vice-président du département des recherches biologiques chez Protogène, et principal artisan du projet Éros.

Le salopard bien mis tendit la main, comme s’il s’attendait vraiment à ce qu’Holden la lui serre. Le Terrien resta de marbre.

— Fred, dit-il, des pertes ?

— Scandaleusement limitées.

— La moitié de leurs forces de sécurité était équipée d’armes non létales, expliqua Miller. L’équipement pour contrôler les émeutes. Des balles collantes, ce genre de trucs.

Holden fronça les sourcils.

— J’ai vu beaucoup de cadavres portant l’uniforme de Protogène dans le couloir. Pourquoi avoir autant d’hommes et ne pas leur donner des armes capables de repousser des assaillants ?

— Bonne question, approuva Miller.

Dresden laissa échapper un petit rire bas.

— C’est très exactement ce que je voulais dire, Monsieur Johnson, déclara-t-il avant de se tourner vers Holden. Jim, c’est bien ça ? Eh bien, Jim, le simple fait que vous ne compreniez pas les besoins en sécurité de la station me prouve que vous n’avez aucune idée de ce dans quoi vous vous retrouvez impliqué. Et je pense que vous en êtes aussi conscient que moi. Comme je le disais à Fred ici prés…