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Au moment où certains espéraient une réalisation prochaine de l’unité par la fusion, la participation d’Alexandre Millerand (1859-1943), socialiste indé-

pendant, au cabinet de Waldeck-Rousseau aux côtés de Gallifet — l’un des généraux versaillais qui ont réprimé la Commune — fournit à Jules Guesde un thème d’opposition à Jaurès, qui a cautionné l’expérience. Deux congrès préparatoires à l’unité n’aboutissent qu’à un regroupement partiel. Guesde et Édouard Vaillant (1840-1915) créent le Parti socialiste de France (3 nov.

1901), tandis que Jaurès fonde le Parti socialiste français (2-4 mars 1902).

Sous la pression de l’Internationale socialiste, l’unité se réalise cependant après le Congrès international d’Amsterdam (avr. 1904). Elle se fait sur des positions beaucoup plus proches du guesdisme que du jauressisme, condamnant par exemple le ministérialisme et obligeant les élus socialistes à voter contre le budget de l’État bourgeois. Guesde escomptait peut-être que Jaurès ne se plierait pas à ces obligations et se mettrait en dehors du Parti socialiste unifié. Mais il les accepte au congrès de la salle du Globe, à Paris, en avril 1905, bientôt abandonné par certains de ses lieutenants ; Guesde, à ce moment, paraît avoir gagné la partie contre Jaurès.

De 1905 à 1914

En fait, il va la perdre. Son état de santé lui rend difficile une action continue. Son autoritarisme écarte de lui quelques-uns de ses amis, séduits par le prestige de Jaurès après 1905. Les syndicalistes révolutionnaires, de leur côté, préfèrent Jaurès à Guesde. Si,

aux élections de Roubaix, les majorités rassemblées par Jules Guesde vont en augmentant, ses interventions à la Chambre et dans les congrès sont plus rares et portent moins. Le dernier de ses grands discours au palais Bourbon est prononcé à la suite de la grève des cheminots (oct. 1910), où il attaque Briand*, ancien député socialiste de la tendance de Jaurès devenu président du Conseil, qui a brisé la grève.

De 1914 à 1922

Devant la guerre, l’attitude de Guesde est conforme à ce qu’il avait toujours dit : la grève générale, dans ces circonstances, serait un crime ; elle ne pourrait que profiter à l’ennemi et se retournerait contre le socialisme. Aussi accepte-t-il de devenir ministre d’État dans le cabinet Viviani, et il le demeurera dans les cabinets suivants jusqu’en décembre 1916.

Devant la révolution d’Octobre, son jugement est nuancé : il lui paraît anormal que le socialisme tente de s’instaurer dans un pays de structure arriérée et essaie, cependant, de se subordonner l’ensemble du mouvement ouvrier.

Guesde ne sera donc pas de ceux qui, downloadModeText.vue.download 3 sur 581

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 10

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au congrès de Tours (1920), voteront le ralliement à la IIIe Internationale.

Mais il n’acceptera aucune entreprise contre-révolutionnaire.

Originalité du guesdisme

Le parti ouvrier de France a été le premier parti français de masse (2 000 ad-hérents en 1889 ; 10 000 en 1893 ; 17 000 vers 1898), organisé avec ses sections, ses fédérations, ses congrès départementaux et nationaux, sa discipline. Introducteur en France de la manifestation du 1er mai en 1890, il se heurte, à partir des dernières années du siècle, à la concurrence du syndica-lisme révolutionnaire, qui, lui, considère la prise du pouvoir comme nécessairement décevante. Les jauressiens lui reprochent de vivre replié sur lui-

même, de ne pas avoir accordé à la lutte pour la libération de Dreyfus l’importance qu’elle méritait et d’ajourner au lendemain de la prise du pouvoir tout effort de construction révolutionnaire.

À l’heure de sa plus grande in-

fluence, le guesdisme compte parmi ses adhérents 60 p. 100 de travailleurs de l’industrie (dont 15 p. 100 du textile, 12 p. 100 de métallurgistes), 17 p. 100

de commerçants, 7 p. 100 de paysans, petits propriétaires exploitants, souvent vignerons ou horticulteurs.

Géographiquement, le guesdisme

repose :

1o sur la France du Nord (la conurbation lilloise, le tulle calaisien), le Nord et le Pas-de-Calais représentant la moitié des effectifs du P. O. F. ;

2o sur un certain nombre de foyers du Massif central (Montluçon, Com-mentry, Limoges, Saint-Étienne,

Roanne), où l’industrie est à la fois houillère, métallurgique, textile et diverse, avec des prolongements vers Lyon et l’Isère ;

3o sur la France méditerranéenne (Aude, Hérault, Gard, Bouches-du-Rhône), où, paradoxalement, le guesdisme prolonge la tradition démocrate socialiste de 1848-1851 ;

4o sur un certain nombre d’îlots (Bordeaux, Troyes).

Dans le mouvement syndical, c’est la Fédération du textile qui a été le principal bastion du guesdisme avec Victor Renard.

Parmi les militants connus qui ont subi l’influence de Jules Guesde il faut citer Alexandre Bracke-Desrous-seaux (1861-1955), Marcel Cachin (1869-1958), Adéodat Compère-Morel (1872-1941), Paul Faure (1878-1960), Jean Lebas (1878-1944), personnages qui, face aux événements postérieurs à 1914, devaient adopter des positions très diverses.

G. L.

F Internationales / Jaurès (J.) / Socialisme.

A. Zévaès, Jules Guesde, 1845-1922 (Ri-vière, 1928). / G. Lefranc, le Mouvement socialiste sous la Troisième République, 1875-1940

(Payot, 1963). / C. Willard, le Mouvement socialiste en France (1893-1907). Les guesdistes (Éd.

sociales, 1965).

Les principales oeuvres de

J. Guesde

(avec leur date de

publication)

1871 le Livre rouge de la justice rurale.

1878 Essai de catéchisme socialiste.

1879 la Loi des salaires et ses conséquences ; Collectivisme et Révolution ; le Collectivisme au Collège de France.

1883 le Programme du parti ouvrier.

1885 Services publics et socialisme.

1898 le Socialisme au jour le jour.

1901 Quatre Ans de lutte de classe à la Chambre (1893-1897) ; État politique et morale de classe.

1911 Questions d’hier et d’aujourd’hui ; En garde ! Contre les contrefaçons du socialisme et la fausse monnaie des réformes bourgeoises.

Guevara (Ernesto,

dit Che)

Homme politique argentin (Rosario 1928 - région de Valle Grande, Bolivie, 1967).

Introduction

Son père descendait de notables provinciaux et sa mère de l’aristocratie de Buenos Aires. Après une enfance provinciale, Ernesto Guevara fait des études de médecine à l’université de Buenos Aires et se passionne pour A. Schweitzer et Gāndhī. En 1951-52, il part avec un ami pour étudier les communautés de lépreux de l’Amé-

rique du Sud. En moto, ils traversent le Chili et le Pérou, puis, sur un radeau, ils descendent un affluent de l’Amazone. Guevara rêve alors de devenir un grand médecin pour aider l’humanité.

En 1953, après avoir terminé ses études, il reprend son voyage, interrompu par la guerre civile en Colombie, et rejoint des amis au Guatemala.

C’est là, au milieu de jeunes révolutionnaires venus de tout le continent et attirés par le réformisme du colonel Arbenz, qu’il commence à s’intéresser à la politique. Il reçoit alors le surnom de « Che ». Lorsque les États-Unis provoquent la contre-révolution militaire de juin 1954, il part pour le Mexique, où il va rencontrer les exilés cubains.

La révolution cubaine

Che Guevara fait la connaissance des frères Castro en 1955 et accepte de participer à leur tentative de débarquement en qualité de médecin. Après quelques mois d’entraînement au

Mexique, les révolutionnaires s’embarquent sur le Granma et abordent à Cuba le 2 décembre 1956. L’échec initial permet à Guevara de donner sa mesure ; il écrira : « Ces consultations données aux paysans de la Sierra ont transformé ma résolution spontanée et quelque peu lyrique en une force sereine et de qualité. Il n’y a rien comme vivre une révolution pour faire l’éducation d’un honnête homme [...]. C’est le peuple qui forme ses chefs. » Fidel Castro dira, de son côté, que Guevara était aimé de tous et admiré pour son courage extraordinaire, doublement admiré en tant qu’étranger combattant pour Cuba : « S’il avait son talon d’Achille comme guérillero, c’était par excès de qualité agressive, à cause de son absolu mépris du danger. »