Выбрать главу

La liste des ressources naturelles évoluait lentement dans les sociétés traditionnelles, dont la démographie était, dans le long terme, généralement assez stable, et dont la technologie demeurait simple. Les besoins essentiels étaient ceux de nourriture, de vêtements, de logement et de protection contre la chaleur ou le froid : la plus grande partie des ressources naturelles d’alors provenait des règnes animal ou végé-

tal. Avec la révolution industrielle*, et avec l’explosion démographique qui l’a accompagnée, la situation s’est transformée profondément : les techniques modernes impliquent un univers instrumental beaucoup plus complexe et l’utilisation de sources d’énergie beaucoup plus puissantes. On a donc fait appel, beaucoup plus que par le passé, aux ressources minérales.

Depuis une vingtaine d’années, on assiste à une transformation d’un autre type : l’augmentation de population, sa concentration dans certaines aires urbaines et l’usage accru des sources d’énergie fossile ont provoqué des pénuries nouvelles ; l’air pur, l’eau*

deviennent des biens rares, des ressources naturelles, même dans les pays où ils avaient toujours paru iné-

puisables. L’eau manque jusque dans les régions les plus arrosées, et l’air pur dans toutes les grandes agglomé-

rations. Du fait de la pollution* et de l’entassement, l’étendue où se promener, se détendre, se distraire devient également rare, cependant que les richesses potentielles des associations naturelles risquent d’être détruites par les agressions dont le milieu est presque partout victime. Les espaces ruraux aménagés, les espaces vierges apparaissent désormais comme des ressources essentielles, dont on ne sait pas encore assurer la gestion de manière satisfaisante pour l’humanité.

Il semblait facile autrefois de dire où cessaient les ressources naturelles ; audelà commençaient les biens libres. Il apparaît désormais qu’un bon nombre downloadModeText.vue.download 98 sur 621

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17

9433

de produits de consommation indispensables à nos sociétés sont des biens fabriqués, mais qu’on ne sait ou ne peut remplacer : un paysage historique n’est pas reproductible à volonté. Il y a donc désormais beaucoup d’analogie entre les problèmes que pose la gestion des ressources en espaces libres ou naturels, et ceux que suscitent la protection et l’entretien de biens qui semblent indispensables aux satisfactions intellectuelles des groupes : les monuments et, plus encore, l’ensemble des espaces marqués par la vie des groupes passés.

Ressources renouvelables

et non renouvelables

L’économiste distingue deux types de ressources naturelles en fonction de données fondamentales de l’écologie.

Pour certains produits, d’année en année, le stock exploitable se reconstitue : on parle de « ressources renouvelables ». Ce sont celles qui naissent de la transformation de l’énergie solaire à travers les pyramides écologiques qui se sont développées naturellement à la surface de la terre, ou que l’homme y a asservies. L’énergie du vent, des marées, des eaux courantes a la même origine : elle est donc inépuisable, tout en étant limitée, à un instant donné, par l’ensemble des mécanismes qui déterminent la transformation de l’énergie solaire à la surface de la Terre.

Aux ressources renouvelables, il

importe d’opposer celles qui ne le sont pas : les richesses minérales, les combustibles fossiles sont prélevés sur des stocks qui ne se sont pas modifiés depuis l’origine de la Terre (pour les minéraux), ou qui ont été déposés depuis plusieurs centaines de millions d’années (pour les combustibles fossiles). Au rythme actuel, les réserves accumulées depuis le début de l’ère primaire risquent d’être totalement utilisées en moins d’un millénaire, c’est-

à-dire 500 000 fois plus vite qu’elles ne se sont constituées.

La distinction entre ressources renouvelables et ressources épuisables n’est pas toujours aussi nette. En ma-tière agricole, les récoltes peuvent se répéter d’année en année à condition qu’on ne détruise pas la fertilité des sols, qu’on ne provoque pas la ruine de

ceux-ci. À la limite, si on laisse se dé-

velopper l’érosion, toute la terre arable est emportée : on a traité la richesse agricole comme un mineur exploite un filon. On en a tiré profit, mais on a sacrifié l’avenir.

Les ressources naturelles renouvelables ont un coût constant. Cependant, lorsque la population augmente, il convient de mettre en valeur de nouvelles terres. Comme on a commencé par les plus fertiles, les produits qu’on arrive à tirer de l’agriculture sont de plus en plus onéreux, car ils proviennent d’une nature de plus en plus avare. Aussi est-on obligé, pour augmenter la production, de laisser monter l’ensemble des prix : c’est celui des exploitations marginales qui sert de référence. Les autres terres rapportent désormais des rentes. Ainsi dans le long terme, et si la technologie ne change pas, on doit voir se manifester une hausse des prix des produits de l’agriculture, de l’exploitation forestière ou de la pêche.

En fait, cette hausse est combattue plus ou moins efficacement par l’invention de nouvelles technologies, qui permettent d’accroître la fertilité des terres (technique d’assolement, amendements ou engrais) ou de diminuer les frais d’exploitation (utilisation de moyens mécaniques qui limitent les dépenses de main-d’oeuvre et multiplient les économies d’échelle).

La situation en ce qui concerne les ressources non renouvelables est apparemment plus critique : il paraît évident que les premières mines ouvertes s’installent là où les conditions sont les plus favorables à une extraction à des coûts très faibles. Au fur et à mesure que les besoins augmentent, on est amené à mettre en exploitation de nouveaux gisements, qui sont moins faciles à mettre en valeur, ou moins bien placés vis-à-vis des utilisateurs. Le prix de revient de la production marginale augmente, et, comme les premiers

sièges s’épuisent, l’augmentation des coûts se développe même si la population n’augmente pas, si ses besoins ne croissent pas, même si, à la limite, on a affaire à une population décroissante aux besoins décroissants.

Lorsqu’on étudie comment ont évo-lué les prix des matières premières depuis un siècle, on constate cependant qu’il y a eu stabilité plutôt qu’augmentation. Dans le domaine des produits agricoles, la hausse est assez compré-

hensible, encore que celle des denrées alimentaires ait été très modérée, eu égard à l’augmentation rapide de la population mondiale. Celle des produits forestiers a été plus rapide, ce qui est assez normal puisque les usages industriels se sont multipliés avec l’essor de la consommation de papier alors que les superficies enforestées diminuaient à la mesure même des progrès de la production agricole.

Mais ce qui est plus paradoxal, c’est de voir que les produits minéraux coû-

taient moins cher en 1970 qu’un siècle auparavant. En prix constants, leur valeur a baissé rapidement jusqu’aux environs de 1900 et, pendant plus d’un demi-siècle, elle a fluctué, avec même, jusqu’à la fin des années 1960, une tendance légère au fléchissement.

Pourquoi cette évolution para-

doxale ? Pourquoi cette longue baisse des prix des produits minéraux, alors qu’ils devraient logiquement avoir toujours tendance à la hausse ? Essentiellement parce que la technologie de l’exploitation et celle du transport ont changé, et que l’exploration géologique a progressé. Bien souvent, les premiers gisements exploités sont les plus proches, les plus faciles à mettre en valeur, parce que superficiels. Ce ne sont pas ceux qui offrent les possibilités réelles les meilleures. Le jeu des économies d’échelle permet de tirer parti de ressources jugées longtemps trop médiocres. Ainsi, les moyens modernes d’extraction à ciel ouvert et les procédés de concentration sur le carreau des exploitations élargissent sans cesse le champ des ressources utilisables à bon compte : on s’est mis ainsi à extraire les taconites du lac Supérieur, longtemps estimées trop pauvres. Pour la production du cuivre, la teneur minimale pour qu’un minerai soit exploitable était de 3 p. 100 en 1880. Elle est aujourd’hui de l’ordre de 0,6 ou de 0,7 p. 100.