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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17

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bitants en 1711 à 46 000 habitants en 1788 (dont 35 000 étaient des esclaves malgaches, cafres ou indiens, importés pour la culture du caféier). L’accroissement récent est important : 301 335 hab. en 1956, 402 666 hab.

en 1965, 476 675 hab. en 1975 ; on estime que le chiffre de la population approchera 550 000 hab. en 1980. Il s’agit d’une population très hétéro-gène : un cinquième est constitué par

une paysannerie blanche très pauvre vivant dans les « Hauts », et un autre cinquième par les Indiens ; il y a 5 000 Chinois et environ 11 000 Fran-

çais de la métropole, surtout fonctionnaires ; le reste est constitué par des descendants de Cafres ou de Malgaches plus ou moins métissés ; 55 p. 100 de la population ont moins de 20 ans. La densité moyenne pour l’ensemble de l’île approche 200 hab. au km 2, mais sur les basses pentes le long du littoral et au fond des cirques la densité est supérieure à 500 hab. au km 2.

Les principales aggloméra-

tions sont le chef-lieu, Saint-Denis (104 603 hab.), Saint-Paul (52 781), Saint-Pierre (46 752), Le Tampon

(37 596) et Saint-Louis (30 473).

L’économie est fondée sur la monoculture de la canne à sucre, pratiquée sur les basses pentes des planèzes (40 000 ha, soit 66 p. 100 des terres cultivées). La production sucrière oscille actuellement entre 180 000 et 250 000 tonnes. Il y a de très grosses exploitations, mais aussi environ 20 000 petits exploitants agricoles.

Une surface de 8 000 hectares

est consacrée, surtout dans la plaine des Cafres en altitude, au géranium (7 000 exploitants ; production de 155 t d’essence faisant de la Réunion le premier producteur mondial). La production d’essence de vétiver oscille autour de 40 t. La Réunion produit enfin un peu de vanille (entre 45 et 60 t par an), de thé (25 t) et de tabac (300 t en 1954, mais seulement 25 t en 1965 et une centaine en 1973).

Les seules industries sont l’industrie sucrière (qui comptait treize usines en 1965 et huit en 1972) et, à Saint-Denis, la petite industrie mécanique et électrique.

La Réunion possède un bon réseau

routier bitumé, dont une route faisant le tour de l’île. Le Port, près de la Pointe-des-Galets, permet le déchargement à quai des cargos (trafic de 820 000 t en 1972, dont 60 p. 100 aux entrées). Aux importations figurent principalement le riz, les produits pétroliers, le ciment et des articles manufacturés. Aux ex-

portations, le sucre domine (près de 80 p. 100).

Le principal problème est démographique. En tenant compte du fort pourcentage des terres non cultivables, l’île est déjà surpeuplée. Une grande partie de la nourriture doit être importée.

L’économie, fondée essentiellement sur le sucre, est extrêmement fragile.

Le développement important, ces dernières années, de l’infrastructure routière, scolaire, hospitalière n’a été possible que grâce à une aide considérable de la métropole.

R. B.

L’histoire

L’île, découverte par les Portugais au début du XVIe s., successivement dé-

nommée Santa Appolonia Diva Mor-

gabin, puis Mascarin ou Mascareigne (du nom du navigateur Pedro de Mas-carenhas, v. 1512), fut abandonnée jusqu’en 1642, date à laquelle la Compagnie française de l’Orient, fondée par Richelieu, en prit (théoriquement) possession. En fait, quand, en 1646, J. Pronis, le gouverneur de Fort-Dauphin (Madagascar*), y envoya en exil douze colons mutinés, ceux-ci crurent avoir retrouvé le paradis dans cette île déserte à la végétation luxuriante.

Enfin, en 1664, la Compagnie des Indes orientales décida d’y créer une escale.

Dès lors, l’histoire de l’« isle Bourbon », dont le climat, troublé par de fré-

quents cyclones, et les cotes basses, dé-

pourvues d’abris naturels, rendaient le séjour moins agréable qu’on ne l’avait espéré, s’explique par sa situation géographique et par son peuplement. La géographie incitait à créer une escale française sur la route des Indes. L’évolution démographique ne se poursuivit pas selon un rythme naturel, mais selon les besoins de la colonisation française.

Les deux vocations, politique et économique, furent déçues à long terme.

Dès le XVIIIe s., le développement des caféières s’accomplit aux dépens des cultures alimentaires. Les vivres durent être importés en même temps que les esclaves. Il y avait, en 1713, 538 colons et 633 esclaves ; en 1779, 6 464 Blancs et 22 611 esclaves adultes ; en 1848,

50 000 créoles et 60 000 esclaves.

La culture du café fut encouragée par François Mahé de La Bourdonnais (1699-1753), le plus prestigieux des gouverneurs (1735-1746). Surtout préoccupé par la rivalité franco-britannique, ce dernier encouragea la colonisation de l’île voisine, Maurice*, abandonnée par les Hollandais en 1710 et devenue l’île de France, avec sa belle rade de Port-Louis. Au lendemain de la guerre de Sept Ans, Choiseul racheta les Mascareignes à la Compagnie des Indes et en réorganisa l’administration.

Conscient des dangers de la monoculture, Pierre Poivre (1719-1786), intendant de 1767 à 1773, fit développer les cultures vivrières pour les bateaux de passage, et celles des épices (girofle, muscade).

La Révolution suscita des troubles divers dans l’île, appelée la Réunion après la chute des Bourbons. Le décret de la Convention, qui abolit l’esclavage le 4 février 1794, attisa les rivalités locales. Sous l’Empire, le général Decaen (1769-1832) fit des Mascareignes la base de la guerre de course contre les Anglais. Mais l’« île Bonaparte » fut complètement dévastée par trois cyclones et par les inondations qui, en 1806-07, mirent définitivement fin à la culture du café. Les Anglais, après avoir occupé l’île de France, redevenue Maurice, s’emparèrent de l’île Bonaparte en 1810 ; ils ne la rendirent à la France qu’en 1815, mais conservèrent Maurice, conformément aux

conditions du premier traité de Paris (30 mai 1814).

« Privée, par la perte à jamais regrettable de l’île de France, du seul port qu’elle possédait au-delà du Cap... »

(amiral Victor Guy Duperré), la marine réussit à affirmer la présence de la France dans l’océan Indien en l’installant à Nossi-Bé, à Mayotte et aux Comores, sous l’impulsion de l’amiral de Hell, gouverneur de 1837 à 1841. Les plantations de canne à sucre remplacèrent à Bourbon celles de café, et la production culmina, malgré la concurrence des Antilles et du sucre de betterave, à 73 000 t sur 100 000 ha en 1860. L’abolition de l’esclavage, en 1848, fit recourir à une main-d’oeuvre

d’« engagés », notamment les Mala-bars (Indiens venus de la côte de Ma-labar), puis à une immigration libre de Chinois, qui accrurent la poussée démographique et le métissage. Cette poussée démographique ne s’accompagna pas d’investissements propres à moderniser l’infrastructure et les outillages. La Réunion connut jusqu’à la Seconde Guerre mondiale une longue période de stagnation relative. La loi du 19 mars 1946, qui en fit un département français, lui insuffla une vie nouvelle. On construisit ou restaura les réseaux routiers et ferrés, Le Port, près de la Pointe-des-Galets, l’aéroport. La Sécurité sociale améliora l’état sanitaire d’une population en majorité misérable ; le contrôle des naissances ramena, entre 1951 et 1971, la natalité de 52 à 30,5 p. 1 000 et la mortalité de 22 à 10,2 p. 1 000. La population n’en passa pas moins de 227 000 habitants en 1946 à 455 000 en 1971, et les mêmes problèmes continuent à se poser. L’indispensable diversification des cultures, dans l’île où la canne à sucre — et le rhum — dominent toujours, ne suffirait sans doute pas à la subsistance de la population ; l’industrialisation n’offre pas de vastes perspectives ; le tourisme ne peut se développer que lentement, en liaison avec Maurice et, sans doute, Madagascar ; l’émigration dirigée est coûteuse et peu populaire. La revendication de l’autonomie par le « Parti communiste réunionnais », constitué en 1959, témoigne d’une incontestable vitalité politique, mais il reste à offrir des solutions aux problèmes économiques qui accablent l’île.