1948 - 5 oct. 1949), de l’Assemblée de l’Union française (Albert Sarraut, 5 juill. 1951 - 9 déc. 1958), enfin, du Conseil économique, devenu en 1959
le Conseil économique et social (Émile Roche depuis le 9 mai 1954).
Au temps de la Troisième
Force (1947-1952)
L’impossible majorité
L’éviction des communistes du gouvernement entraîne la constitution d’une coalition du centre, la Troisième Force, qui groupe jusqu’en 1952 les socialistes, le M. R. P., des radicaux et des modérés, et qui s’oppose au P. C. F. et au R. P. F. (hostile au « ré-
gime des partis »). L’existence de deux blocs opposés dans le monde apparaît avec l’annonce du plan Marshall (juin 1947) et le « coup de Prague »
du 24 février 1948. L’anticommu-
nisme devient une constante de la vie politique et explique le raz de marée du R. P. F. aux élections municipales des 19 et 26 octobre 1947. Le président du Conseil, Paul Ramadier, se retire le 19 novembre. Son successeur, Robert Schuman*, constitue alors un gouvernement dominé par le M. R. P.
(24 nov. 1947 - 19 juill. 1948), mais confie le ministère de l’Intérieur à un socialiste, Jules Moch, qui s’oppose aux importantes grèves du 5 novembre au 10 décembre 1947. Ces grèves sont condamnées par un certain nombre de syndicalistes cégétistes qui, le 19 dé-
cembre, constituent la C. G. T.-F. O.
(Force ouvrière). L’impossibilité de constituer une majorité cohérente en raison des divergences existant entre
les socialistes dirigistes, les radicaux et surtout les modérés libéraux a pour conséquence une très grande instabilité gouvernementale.
Les problèmes financiers font tomber le premier gouvernement Robert Schuman (24 nov. 1947 - 19 juill.
1948) [question des crédits mili-
taires], le ministère André Marie (26 juill. - 28 août), où les projets de Paul Reynaud suscitent l’hostilité de Léon Blum, et le second gouvernement Robert Schuman (5-7 sept.), où la présence d’un socialiste rue de Rivoli entraîne l’opposition des libéraux. Le problème de l’équilibre des salaires et des prix entraîne le retrait du premier gouvernement Henry Queuille
(11 sept. 1948 - 5 oct. 1949), auquel le R. P. F. reproche, entre autres, l’ajournement des élections cantonales d’octobre 1948 aux 20 et 27 mars 1949. Le vote de la réforme électorale qui, le 7 mai 1951, institue les apparente-ments a pour objet d’assurer le succès de la majorité sortante aux élections du 17 juin, aux dépens du R. P. F. et surtout du P. C. F. Sa réussite est réelle : les deux tiers des sièges vont aux partis de la Troisième Force, malgré l’échec du M. R. P., qui est le grand vaincu des élections (85 députés au lieu de 143) avec les communistes (99 élus au lieu de 167). Quant au R. P. F., premier groupe de l’Assemblée (121 élus), il ne peut imposer ses vues au gouvernement. Le vote définitif de la loi Marie-Barangé d’aide à l’enseignement privé le 21 septembre entraîne le passage progressif des socialistes à l’opposition et, par contrecoup, la dislocation de la Troisième Force ; les deux premiers gouvernements de la législature (René Pleven, 10 août 1951 - 7 janv. ; Edgar Faure, 20 janv. - 29 févr. 1952) sont constitués avec le soutien des socialistes, mais sans leur participation.
De la reconstruction à
l’expansion
Malgré cette instabilité politique, la période se caractérise tout à la fois par une amélioration de la production, surtout industrielle, et par la persistance de tendances inflationnistes, que les gouvernements tentent, en vain, de maîtri-downloadModeText.vue.download 48 sur 621
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17
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ser. René Mayer, ministre des Finances de Robert Schuman, entreprend, en 1947-48, de les briser par des mesures en grande partie déflationnistes : relè-
vement des prix des produits de base ; dévaluation du franc de 44,44 p. 100
le 25 janvier 1948 (le « franc Mayer est à 4,212 mg d’or fin) ; réductions des subventions, des investissements et même de la consommation par le blocage des billets de 5 000 francs le 29 janvier 1948 ; retour au marché libre de l’or le 2 février 1948. Poursuivie par un modéré, Maurice Petsche, secrétaire d’État au Budget en septembre 1948, puis ministre des Finances en février 1949, cette politique déclenche une seconde dévaluation de 22,27 p. 100
le 19 septembre 1949. Le « franc
Petsche » ne pèse plus que 2,545 mg d’or fin. Les exportations, freinées par l’insuffisante capacité de production de l’économie française, ne tirent pas les bénéfices escomptés de ces opérations monétaires. Certes, le déficit de la balance commerciale est presque annulé (1 451 millions de dollars en 1947 ; 78
en 1950), mais celui de la balance des paiements reste important (1 674 en 1947 ; 237 en 1950).
En fait, ce déficit n’est comblé que par l’aide américaine (accords franco-américains du 28 février 1945 ; accord Blum-Byrnes du 28 mai 1946 pour
l’ouverture d’un crédit de 650 milliards de dollars ; tirages sur le F. M. I.
[Fonds monétaire international] ; octroi de crédits divers et surtout contre-valeur de l’aide Marshall, qui entre en vigueur le 3 avril 1948). Au total, les États-Unis procurent en trois ans 2 118 millions de dollars à la France, remédiant ainsi au « Dollar gap »
(manque de dollars), dont elle souffre, mais Paris est désormais dans la dépendance totale de Washington.
Conditionnée, en effet, par les cré-
dits américains et donc compromise un moment par la récession américaine de 1948-49, l’exécution du premier plan, dit « plan Monnet » (1947-1950), est entravé par les troubles sociaux, par le déficit constant des charges exté-
rieures, par les charges coloniales.
Aussi le Commissariat au plan décide-t-il de faire coïncider son terme avec celui de l’aide Marshall en 1952, ce qui permet d’achever pour l’essentiel la reconstruction et d’amorcer l’expansion de l’économie française, dont l’agriculture a retrouvé, dès 1950, le niveau de production de 1938, tandis que l’industrie le dépassait de 28 p. 100. En fait, cet accroissement s’est fait au profit de l’infrastructure, aux dépens des biens de consommation, et le niveau de vie des Français ne s’est guère amé-
lioré depuis 1938. Certes, la guerre de Corée* (25 juin 1950 - 27 juill. 1953) entraîne bien en France, comme dans le reste du monde, une vive reprise de l’activité économique à la suite des efforts de réarmement. Mais, outre que ces derniers pèsent lourdement sur le budget, ils provoquent en quelques mois une hausse de 40 p. 100 du prix des matières premières, puis une hausse des salaires qui stimulent la production, mais relancent l’inflation, cette fois non plus par la demande, mais par les coûts. La signature de l’armistice américano-nord-coréen de Kaesong
(ou Kä-sŏng) le 10 juillet 1951 renverse alors la tendance. Aussi la baisse mondiale des prix, qui se fait sentir en France à partir de décembre 1951, facilite-t-elle l’exécution du plan Pinay de stabilisation des prix en 1952. Mais ce plan provoque une légère récession, qui fait tomber l’augmentation de l’indice de la production industrielle de 12,5 p. 100 en 1951 à 1 p. 100 en 1952. Ainsi arrivé à son terme, le premier plan ne dépasse ses objectifs qu’en ce qui concerne l’électricité (112 p. 100) ; il les réalise seulement à 91 p. 100 pour l’acier, à 84 p. 100
pour le charbon et même à 66 p. 100
pour le ciment, l’industrie du bâtiment, comme l’industrie textile, étant en crise. Les perspectives à long terme ne sont pourtant pas mauvaises : l’augmentation de la productivité permet à la France d’assumer la lourde charge d’une forte reprise de la natalité, dont le taux se maintient à un niveau élevé (20,5 p. 1 000 en 1950, 19,3 p. 1 000 en 1952, au lieu de 14,5 p. 1 000 en 1938), et de retrouver en 1950 (41 830 000), puis de dépasser en 1952 (42 460 000) le chiffre de population atteint en 1938 (41 960 000). Liée financière-