même président de la nouvelle Assemblée. Élu président de la République le 21 décembre avec 78,5 p. 100 des suffrages exprimés par le collège prévu par la nouvelle Constitution, le général de Gaulle choisit Michel Debré comme Premier ministre le 8 janvier 1959. Son premier objectif, la réforme des institutions, étant atteint, il s’attache dès lors à résoudre le problème algérien, qui domine l’histoire de la Ve République jusqu’en 1962.
Le ministère Michel Debré (8 janv. 1959 -
14 avr. 1962)
Pulvérisée en novembre, divisée
en nombreux groupes ou tendances
(10 communistes, 44 S. F. I. O., 4 élus du Centre républicain et 56 députés M. R. P. ou apparentés), l’opposition tente de se regrouper à la faveur des élections municipales des 8 et 15 mars 1959 ; elle utilise contre les candidats de la majorité le mécontentement qu’ont suscité dans l’opinion publique les mesures prises en décembre 1958
par Antoine Pinay. Le 26 avril 1959, les élections sénatoriales témoignent de la force persistante des anciens partis de la IVe République, majoritaires dans la nouvelle Assemblée ; le Sénat, présidé par Gaston Monnerville, apparaît désormais comme une chambre
d’opposition.
André Boulloche, ministre de l’Éducation nationale, préfère démissionner (23 déc.) avant même l’ouverture du débat scolaire à l’Assemblée (loi d’aide à l’enseignement privé adoptée le 30 décembre). Le 13 janvier 1960, Antoine Pinay doit abandonner le ministère des Finances, car il désapprouve notamment les projets de Jean-Marcel Jeanneney qui lui semblent porter atteinte à la liberté du commerce et de l’industrie. Il est remplacé par Wilfrid Baumgartner. Enfin, déçus par les derniers discours du général, 75 p. 100 des membres du C. N. I. (Centre national des indépendants) ainsi que les partisans de l’Algérie française se séparent alors de la majorité et s’opposent aux mesures du gouvernement : réforme constitutionnelle autorisant l’accès à l’indépendance des pays de la Communauté (J. O. du 8 juillet 1960) ; projet de loi sur la constitution d’une « force de frappe atomique française » le 18 juillet ; loi d’orientation agricole...
Mais les motions de censure sont
toutes rejetées, les gaullistes conservant la majorité à l’Assemblée nationale. L’audience du général de Gaulle dans le pays est, d’ailleurs, confirmée par les résultats du référendum du 8 janvier 1961, qui reconnaît à l’Al-gérie le droit à l’autodétermination ; 15 200 073 électeurs métropolitains
(75,26 p. 100 des suffrages exprimés) approuvent, en effet, la politique du chef de l’État, contre laquelle se prononcent seulement 4 996 474 électeurs (24,74 p. 100 des suffrages exprimés).
Mais on compte 6 393 162 absten-
tionnistes, représentant 23,51 p. 100
du corps électoral. Un an plus tard, le succès sans précédent du référendum du 8 avril 1962, portant ratification des accords d’Évian, renforce encore l’autorité du président de la République, puisque 17 508 607 électeurs métropolitains lui apportent 90,70 p. 100 des suffrages exprimés, alors que 1 795 061 ne lui en refusent que 9,30 p. 100, les abstentionnistes restant, par contre, aussi nombreux que l’année précédente : 6 580 772, repré-
sentant 24,4 p. 100 du corps électoral.
Le problème algérien réglé, le général de Gaulle décide, alors, d’accepter le 14 avril la démission du Premier ministre, Michel Debré, qui aurait préféré dissoudre l’Assemblée nationale afin de renforcer la majorité parlementaire dans la foulée du référendum et d’inaugurer avec cette majorité une politique nouvelle, consacrée enfin aux problèmes « normaux » de la République.
Faisant partie, au même titre que les Affaires étrangères et la Défense, du domaine réservé au chef de l’État, le problème algérien a donc finalement contribué à renforcer le pouvoir de ce dernier. En votant les 2 et 3 février 1960 la loi autorisant le gouvernement à faire des ordonnances sous la signature du président de la République et non sous celle du seul Premier ministre, les députés avaient bien montré quel était pour eux le réel détenteur du pouvoir exécutif.
Les deux premiers
ministères Georges
Pompidou (14 avr. 1962 -
8 janv. 1966)
En choisissant son ancien directeur de cabinet Georges Pompidou* comme
Premier ministre le 14 avril 1962, le général de Gaulle renforce le caractère présidentiel du régime. En contrepartie, il tente de faire entrer dans le nouveau gouvernement des personnalités politiques de premier plan : Edgar Faure, qui refuse en raison de l’oppo-
sition du parti radical-socialiste ; Pierre Pflimlin et Maurice Schumann, membres du M. R. P., qui acceptent, puis démissionnent au lendemain de la conférence de presse du chef de l’État du 15 mai au cours de laquelle celui-ci déclare que la seule Europe possible est celle des États. L’opposition parlementaire, renonçant à renverser le gouvernement le 16 juillet, se constitue en « cartel des non » lorsque le général de Gaulle décide, le 12 septembre, de soumettre à référendum l’élection du président de la République au suffrage universel, afin de se doter et surtout de doter son successeur de l’appui populaire nécessaire à l’exercice de ses responsabilités dans le cas où lui même serait victime d’un attentat analogue à ceux auxquels il a échappé à Pont-sur-Seine le 8 septembre 1961 et au Petit-Clamart le 22 août 1962. Après avoir voté le 5 octobre une motion de downloadModeText.vue.download 54 sur 621
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17
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censure qui renverse le premier gouvernement de Georges Pompidou,
le « cartel des non » subit un double échec : le 28 octobre, 12 809 363 électeurs métropolitains (61,70 p. 100 des suffrages exprimés) approuvent en effet le recours au suffrage universel pour désigner le chef de l’État, alors que l’opposition ne rassemble que 7 932 695 non (38,2 p. 100 des suffrages exprimés), le nombre des abstentionnistes restant stable (6 280 297, soit 22,70 p. 100 du corps électoral) ; les 18 et 25 novembre, la majorité gouvernementale sort renforcée des élections législatives grâce au succès remporté par l’U. N. R. - U. D. T. (Union démocratique du travail) [233 élus], soutenue par les Républicains indépendants de Valéry Giscard d’Estaing dé-
tachés du C. N. I. entre les deux tours (35 élus). Ces élections donnent au général de Gaulle les moyens d’appliquer son programme sans l’opposition des partis politiques. Elles contribuent, par ailleurs, à faire sortir le P. C. F.
(41 élus) de l’isolement dans lequel il était plongé depuis 1947 ; en effet, le 12 novembre, le socialiste Guy Mollet a invité à voter au second tour en faveur
des candidats communistes s’ils restent seuls en présence de l’U. N. R. Appelé à reconstituer son gouvernement dès le 28 novembre, Georges Pompidou met en chantier des réformes de structure : remodelage administratif de la Région parisienne, création de l’O. R. T. F., etc.
Mais il ne peut empêcher une certaine surchauffe de l’économie française, qui déclenche un processus inflationniste.
Pour l’enrayer, le gouvernement met en oeuvre le « plan de stabilisation », élaboré par le ministre des Finances Valéry Giscard d’Estaing, mais qui, maintenu trop longtemps en application, freine l’expansion économique.
Le mécontentement qui en résulte est exploité naturellement par les oppositions, qui, à partir de 1963, tentent de se regrouper en vue de l’élection présidentielle de 1965. Soutenu par les clubs de gauche, le socialiste Gaston Defferre pose sa candidature dès le 18 décembre. Mais il ne peut faire entériner son projet de « Fédération dé-
mocrate socialiste », qui échoue, dans la nuit du 17 au 18 juin 1965, du fait de l’opposition profonde de la S. F. I. O.