Выбрать главу

La loi des débouchés

Lorsque le producteur, remarque

J.-B. Say, a achevé l’élaboration d’un produit, son plus grand désir est de le vendre ; mais, s’il est pressé de voir ce produit vendu, il ne l’est pas moins de réinvestir la valeur du produit (une fois celui-ci monétarisé entre ses mains), pour que l’argent ne chôme point dans son patrimoine. Or, pour ce faire, il doit acheter d’autres produits : la vente d’un produit crée donc, dès l’instant même, un débouché à d’autres produits. Le « circuit » est illustré par J.-B. Say d’une manière séduisante, renforçant d’ailleurs son optimisme, les crises générales de surproduction lui paraissant impossibles.

Mais les « fuites » dans le circuit ne semblent guère perçues, et il faudra J. M. Keynes*, un siècle plus tard, pour les éclairer décisivement. Car l’entrepreneur peut ne pas vouloir réemployer immédiatement l’argent obtenu par l’écoulement de son produit : un filateur peut attendre la baisse du prix du coton brut avant de reconstituer son stock, attendre une occasion meilleure pour acquérir une nouvelle machine. Une épargne*, momentanée ou durable, peut apparaître.

Le problème du « démarrage » ou

celui du « décollage » (take off) ne semble pas davantage correctement perçu par J.-B. Say. Comment certains producteurs vont-ils être amenés à prendre les premiers des décisions de développement de production ?

Ceux-ci n’ont pas, en effet, les « dé-

bouchés » assurés pour écouler ces fabrications accrues, puisque leurs partenaires (acheteurs), pour un temps au moins, n’ont pas accru leurs ventes et ne peuvent, de ce fait, être acquéreurs solvables de productions accrues... Le

« take-off » et, plus généralement, la croissance* ne paraissent pas claire-

ment élucidés dans cette analyse.

J. L.

F Économique (science).

E. Teilhac, l’OEuvre économique de Jean-Baptiste Say (Alcan, 1927). / P. L. Raynaud, Jean-Baptiste Say (Dalloz, 1953). / P. Guillau-mont, la Pensée démo-économique de Jean-Baptiste Say et de Sismondi (Cujas, 1969).

scandinaves

(littératures)

Les littératures scandinaves illustrent la richesse culturelle des pays nordiques, qui, s’ils conservent leurs langues et leurs traditions propres, assimilent en même temps les courants de pensée venus du reste de l’Europe.

Le Danemark, les îles Féroé,

l’Islande, la Norvège et la Suède connaissent des conditions historiques, politiques et sociales parfois fort diffé-

rentes : ils n’en forment pas moins un tout du point de vue littéraire, aux réactions tantôt semblables, tantôt contrastées, mais où il est toujours possible de dégager les traits communs.

Des origines à la fin

du Moyen Âge

L’usage des runes en Scandinavie

remonte au IIIe s., mais c’est entre le IXe et le XIIe s. que s’affirme la valeur littéraire des inscriptions runiques.

Les graveurs de runes mêlent volontiers à leurs textes en prose des vers (dont beaucoup rappellent les chants eddiques), telle la strophe qui figure sur la pierre de Rök en Suède.

Avec la poésie eddique et la poésie scaldique, l’Islande est la première à offrir une véritable production littéraire. L’Edda* est un recueil de poèmes composés entre le IXe et le XIIIe s. et transmis oralement ; certains poèmes évoquent les dieux de la mythologie nordique — c’est ainsi que Völuspá raconte l’histoire du monde à son origine ; d’autres traitent des héros germaniques et se regroupent en plusieurs cycles. Bien différent, le poème intitulé Hávamál est une suite de règles de conduite dont le réalisme surprend.

S’opposant à la simplicité de la poé-

sie eddique, les strophes scaldiques se caractérisent par des formes ornementales souvent hermétiques. Parmi les plus grands scaldes, il faut citer Egill Skallagrímsson (v. 910-983) et Sigvatr Þórðarson (Sigvatr Thórdarson, v. 995-1045). La poésie scaldique touche à sa fin dans le courant du XIIe s.

À cette époque, l’alphabet latin

conquiert le monde scandinave. Les lois, apprises par coeur jusque-là, sont couchées sur le vélin pour décharger les mémoires. La littérature religieuse est aussi très tôt représentée. Mais ce sont les récits à caractère historique qui dominent le Moyen Âge.

L’Islandais Ari Þorgilsson inn Fróði (Ari Thorgilsson, 1067-1148) rédige dans sa langue l’Íslendingabók (le Livre des Islandais) vers 1120. Le moine norvégien Theodricus retrace en latin l’histoire des rois de Norvège jusqu’à Sigurd Jorsalafare († 1130) ; c’est aussi en latin qu’au Danemark Saxo Grammaticus († v. 1216) se

charge d’écrire une histoire de son pays, la monumentale Gesta Danorum, dans les seize livres de laquelle il dé-

gage une image cohérente des anciens Scandinaves. En Islande, enfin, à côté de longues chroniques comme l’Ágrip (v. 1190), sont composés de nombreux récits historiques, parfois légendaires, assez courts et souvent anonymes, les sagas*. Les « sagas des rois » sont des biographies des rois norvégiens que Snorri* Sturluson (v. 1179-1241) porte à leur perfection en écrivant la Heimskringla (v. 1230). Snorri Sturluson est aussi l’auteur d’un traité sur l’art scaldique, l’Edda. Les « sagas des familles » relatent au contraire la vie de héros islandais et de leurs familles, telle la Saga de Njáll (v. 1280).

D’autres sagas prennent leur sujet dans les vieilles légendes nordiques, telle la Völsunga saga (v. 1250), ou encore dans la littérature courtoise, comme la Saga de Perceval (av. 1263). Les sagas sont sur le déclin dès le XIVe s., mais leur influence sur la littérature nordique sera considérable.

De nouveaux genres littéraires se développent alors en Scandinavie. Du XIIe au XVe s. naissent les chansons populaires, qui, à l’origine, sont accompagnées de danses, comme c’est encore

le cas de nos jours aux îles Féroé. Ces ballades, que les frontières n’arrêtent pas, se regroupent par thèmes. On distingue, entre autres, des chansons historiques (en particulier au Danemark), des chansons héroïques et des chansons chevaleresques. L’Islande, elle, adopte une nouvelle forme de poésie épique, les rímur. La Suède, qui connaît également les chansons populaires, est le berceau de quelques chroniques ri-mées, dont la plus connue, Erikskröni-kan, date d’environ 1330. La littérature religieuse suédoise est mise en valeur grâce aux Visions de sainte Brigitte (v. 1303-1373), qui fonde un cloître à downloadModeText.vue.download 567 sur 621

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17

9902

Vadstena et dicte les principes selon lesquels doit vivre la communauté.

Le temps de la Réforme

Au début du XVIe s., le courant humaniste atteint les deux pays qui dominent alors le monde scandinave, le Danemark et la Suède ; il entraîne avec lui la Réforme.

En Suède, Olaus Petri (1493-1552) aide le roi Gustave Vasa, qui, pour des raisons politiques, veut faire entrer la Réforme dans les moeurs. Il écrit une vingtaine d’ouvrages à caractère religieux, souvent polémiques, et une Chronique suédoise non dépourvue

d’impartialité et d’esprit critique.

Au Danemark, la Réforme est introduite en 1536, et le début du XVIe s. est marqué de pamphlets qui défendent ou attaquent le catholicisme. Chris-tiern Pedersen (v. 1480-1554) publie une traduction danoise de la Bible (1550) ; auparavant, il a édité à Paris la Gesta Danorum de Saxo Grammaticus (1514). La langue danoise subit une évolution sans pareille.

Cependant, la Norvège a perdu non seulement son indépendance, mais

aussi sa langue, que remplace peu à peu le danois, seule langue écrite et officielle. C’est en danois que le théologien Absalon Beyer (1528-1575)