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ORGANISATION DE

LA RÉSISTANCE

En métropole, les premiers résistants de l’été 1940, « une poignée d’isolés »

sans contact avec le peuple français, collent des papillons sur les murs, impriment avec des moyens artisanaux des tracts et des appels, qu’ils diffusent autour d’eux, et surtout contactent des amis. On entre parfois dans la Résistance sans le vouloir : des prisonniers évadés à cacher, des armes à cacher, des tracts à distribuer, et l’on est engagé dans l’action... Des officiers dé-

mobilisés se retrouvent, échafaudent des plans pour la reprise des combats et, en attendant, recueillent des renseignements au profit des Anglais. Ainsi naît au sein d’une population frappée de stupeur par l’ampleur du désastre, en un sourd frémissement patriotique,

« la flamme de la Résistance qui ne s’éteindra pas ». Il faudra cependant deux longues années pour que s’implantent solidement des « mouve-

ments », qui se rallieront au général de Gaulle et recevront armes et subsides de Londres.

Les grands mouvements

de résistance

En 1940, les partis politiques, les syndicats, les loges de la maçonnerie ont disparu : les cadres de la vie nationale

traditionnelle laissent la place à des organismes neufs, qui, à côté des « ré-

seaux » en liaison avec le B. C. R. A.

(Bureau central de renseignements et d’action), seront les « mouvements de résistance ». Ceux-ci sont souvent formés d’hommes nouveaux, dont la pré-

occupation majeure est la lutte contre les Allemands et le gouvernement de Vichy.

Au début, ce sont des groupuscules spontanés, peu solides, peu étoffés, inexpérimentés, sans argent et presque sans moyen d’action, si ce n’est la propagande. La diffusion d’un journal clandestin est souvent la seule activité, mais combien efficace, d’un groupe de patriotes, presse clandestine qui brasse l’opinion et l’oblige à reprendre espoir : Valmy, Université libre, la Voix du Nord, les Cahiers du témoignage chrétien, Défense de la France (qui s’adjoindra aussi un important service de faux papiers et d’évasion), etc. À la fin de 1941, au moment où de Gaulle est reconnu unanimement comme

le chef de la Résistance, huit grands mouvements rassemblent 90 p. 100

des patriotes. Leur recrutement est très éclectique : avant d’être d’un mouvement, on est résistant, c’est-à-dire un hors-la-loi, un « terroriste », comme dit l’adversaire. La clandestinité interdit les écrits, les listes de noms, les cartes de groupes, les cotisations. Entre les individus, le cloisonnement est impé-

rieux : on se connaît peu et l’on obéit à des consignes parfois obscures.

Les divergences idéologiques et plus encore l’intransigeance des « chefs »

multiplient les groupements, que, tardivement et difficilement, Jean Moulin parviendra à unifier.

En zone sud

Au sud de la ligne de démarcation, en raison de l’absence des Allemands et de la présence du gouvernement de Vichy*, la Résistance prend un aspect politique à l’origine : la sécurité relative donne davantage de champ pour évoluer au début dans une semi-clandestinité. Jusqu’en 1942, il faudra tenir compte de l’opinion publique, plus ou moins favorable au maréchal Pétain*, au double jeu duquel on croit ferme.

Du fait de sa situation et de la facilité

que présente sa topographie pour la vie secrète, Lyon sera pendant quatre ans la véritable capitale de la Résistance.

y C’est à Lyon qu’à la fin de 1941

naît l’un des plus importants mouvements de résistance, le mouvement Combat. Le capitaine Henri Frenay (né en 1905), officier des services d’espionnage, a recruté parmi ses camarades de l’armée et des catholiques de gauche (Claude Bourdet, né en

1909) un premier noyau de patriotes le Mouvement de libération nationale, qui publie les Petites Ailes de France.

Conjointement, à Annecy, le pro-

fesseur François de Menthon (né en 1900) fait sienne la parole de Foch, à savoir qu’« un peuple n’est vaincu que lorsqu’il a accepté de l’être »

(journal Liberté 25 nov. 1940). Les groupes Liberté recrutent des intellectuels catholiques (Edmond Michelet

[1899-1970], Pierre Henri Teitgen

[né en 1908], Guy de Combault,

etc.). Lors d’une rencontre à Grenoble (nov. 1941), H. Frenay et F. de Menthon fusionnent leurs groupes, qui deviennent le mouvement Combat, dont le journal clandestin du même nom tire à 30 000 exemplaires en 1942. Combat se rattache les

« groupes francs » de Jacques Renou-vin (1905-1944), dont les sabotages, les « kermesses », frappent l’opinion publique, quelque peu assoupie. Malgré le manque d’argent, mais grâce à des effectifs jeunes et sans cesse croissants, il domine vite la Résistance. Fortement structuré, il servira de modèle aux autres. Les militants de base auraient souhaité l’unification de la Résistance par Frenay, mais les chefs des autres mouvements avaient souvent des conceptions différentes, et cela ne se fera pas.

y Avec Libération-Sud, Emmanuel

d’Astier de La Vigerie (1900-1969) veut donner à la Résistance des assises populaires. C’est pourquoi, après l’arrestation du commandant Édouard Corniglion-Molinier (1899-1963), cofondateur, à Clermont-Ferrand, de la Dernière Colonne, il recrute des élé-

ments venus du syndicalisme (Robert Lacoste [né en 1898], Marcel Poim-boeuf) et du socialisme (André Philip

[1902-1970], Pierre Viénot), et, avec

Jean Cavaillès (1903-1944), il crée Libération-Sud.

y Franc-Tireur, implanté dans le

Sud-Est, regroupe autour de Jean-

Pierre Levy (né en 1911) et d’Antoine Avinin (1902-1962) des radicaux.

Dans son journal clandestin, le mouvement est le premier à dénoncer la

« trahison » de Pétain. Franc-Tireur crée aussi les premiers maquis de France (Vercors, Jura, Sud-Ouest).

En zone nord

« Chaque ville importante avait son mouvement de résistance » (Henri Michel). Précaires, face à une répression impitoyable, ces mouvements adoptèrent un caractère militaire.

y Libération-Nord, pendant de Libé-

ration-Sud, dont il restera toujours in-dépendant, diffuse un hebdomadaire rédigé par des socialistes : Christian Pineau (né en 1904), Jean Texcier, etc. Il annexera la Voix du Nord.

y Le mouvement Ceux de la Résis-

tance, parallèle à Combat au dé-

part (Robert Guédon, né en 1902), touche les milieux administratifs (Henry Ingrand [né en 1908], René Parodi [1904-1942], Maurice Bourdet), fusionne avec d’autres mouvements et essaime dans le Nord, l’Est (Dr Jean Quentin) et le Centre (Delage). Orienté sur le renseignement, il est anéanti en février 1942 et doit à Jacques Lecompte-Boinet (1905-1974), gendre du général Mangin, de survivre (Ingrand, Pierre Le Rolland, Paul Arrighi [né en 1895] et son fils Pierre). En 1944, il pourra aligner 70 000 membres des Forces fran-

çaises de l’intérieur (F. F. I.).

y Le mouvement Ceux de la Libé-

ration, de l’ingénieur Ripoche, se rattache aux corps francs du groupe Vengeance, qui agissent en particulier dans la région parisienne. Après avoir organisé de nombreux parachutages, il participe à la libération de Paris, mais, en 1943, ses chefs ont été successivement arrêtés : Ripoche, Roger Coquoin, dit Lenormand, Médéric, le colonel Ginas.

y L’Organisation civile et militaire (O. C. M.) dépasse largement les

deux précédents mouvements. Issue du deuxième bureau de l’armée de

l’armistice (colonel Alfred Heur-

taux [né en 1893], colonel Touny, Jacques Arthuys [1894-1943]), elle est à la fois une amicale d’officiers de réserve, constituant une véritable armée dotée de services de renseignements et qui facilitera le débarquement dans l’Ouest, et un organisme politique : personnel des ministères, Confédération des intellectuels. Fonctionnaires et intellectuels fournissent les cadres du service d’études économiques et politiques (Jacques-Henri Simon, Jacques Rebeyrol, Jacques