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y Deux catégories de personnes sont présumées en faute par le fait d’une troisième. Ce sont les parents et les artisans du fait des enfants dont ils ont la garde. La responsabilité des parents est fondée sur un défaut d’éducation et de surveillance, celle des artisans sur un simple défaut de surveillance, l’artisan n’étant pas chargé à proprement parler d’éduquer l’enfant. Il

s’agit, dans les deux cas, de présomption simple, susceptible de la preuve contraire d’absence de faute.

y La responsabilité qui pèse sur les parents suppose qu’il s’agit d’un enfant mineur non émancipé. L’autorité parentale appartenant depuis 1970

aux deux parents (v. capacité), le père et la mère sont, dans le cas normal d’une famille légitime où les deux époux sont vivants et non séparés, solidairement responsables des dommages causés par l’enfant qui habite avec eux. Si un seul des parents dirige la personne de l’enfant, c’est sur lui seul que pèsera la responsabilité. Le Code n’ayant édicté ici de présomption de faute qu’à l’égard des parents, on admet que, si l’enfant a été confié à la garde d’autres personnes que ses père et mère (tuteurs, grands-parents, institutions, etc.), la responsabilité de ces personnes doit faire l’objet de la preuve de leur faute par la victime.

L’absence de cohabitation d’un enfant avec ses parents ne décharge les parents de leur responsabilité que si elle est légitime (enfant étudiant dans une ville universitaire), mais non si elle est l’indice d’un défaut d’éducation (enfant en fuite ou chassé du domicile familial). La responsabilité des parents est engagée dès lors qu’il y a eu un fait personnel dommageable objectivement illicite de la part de l’enfant, même si ce fait ne peut être qualifié faute parce qu’il n’est pas réellement imputable à l’enfant (enfants trop jeunes qui ne se rendent pas compte de ce qu’ils font).

y La responsabilité qui pèse sur

l’artisan suppose qu’il s’agit de son apprenti, c’est-à-dire d’un enfant auquel il donne un enseignement professionnel en lui faisant exécuter un travail, et que l’accident se soit produit pendant que l’enfant est sous la surveillance de l’artisan (surveillance continue si l’apprenti est logé).

y La responsabilité qui pèse sur les maîtres et commettants du fait de leurs préposés (le commettant étant celui qui a le pouvoir de donner des ordres à son préposé, c’est-à-dire le plus souvent l’employeur par rapport à l’employé) n’est plus fondée sur

une présomption de faute. La preuve en est que le commettant ne pourra pas s’en exonérer en faisant la preuve qu’il n’a pas commis de faute. Il ne semble pas non plus qu’elle soit fondée sur le risque ou le profit (car alors le commettant n’aurait pas de recours contre le préposé, alors qu’en réalité il en a un) : il faut plutôt voir dans cette responsabilité une sorte de garantie spécifique d’indemnisation de la victime, l’employeur étant généralement plus solvable que l’employé. La responsabilité qui pèse sur le commettant suppose que le préposé a commis une faute, faute qui devra être démontrée par la victime. Cette faute doit avoir été commise par le préposé dans le cadre de ses fonctions. Le commettant ne sera donc pas responsable lorsque le fait du préposé n’aura aucun rapport avec ses fonctions, ni avec le but de sa mission, ni avec les moyens mis à sa disposition, et lorsque l’activité aura eu lieu en dehors des lieux et du temps de travail. Il ne sera pas non plus responsable si la victime savait que le préposé agissait en dehors du cadre de sa mission et contrairement aux ordres reçus. Par contre, le commettant est responsable si le préposé a mal exercé sa fonction. Quant au point de savoir si le commettant répond des actes accomplis non dans l’exercice des fonctions mais à l’occasion de ces fonctions et en en abusant, il est l’objet de controverses, la jurisprudence étant divisée, notamment celle de la chambre criminelle et celle des chambres civiles de la Cour de cassation. La chambre criminelle se contente, pour condamner le commettant, de la constatation que le préposé a profité des facilités procurées par ses fonctions, alors que les chambres civiles exigent, pour déclarer le commettant responsable, non seulement que le préposé ait utilisé les moyens mis à sa disposition par le commettant, mais en outre qu’il les ait utilisés dans le but qui lui était fixé.

Responsabilité du fait des

animaux et du fait des choses

Cette forme de responsabilité est l’exemple le plus frappant de la création jurisprudentielle du droit. De même que l’on peut être tenu pour responsable du fait d’autrui, soit sur la

base d’une présomption de faute, soit même en dehors de toute faute (« objectivement »), on peut être tenu pour downloadModeText.vue.download 96 sur 621

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 17

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responsable du fait d’une chose. Héritier de la tradition qui ne connaissait que deux sortes de « choses » dont le propriétaire devait répondre (les animaux et les bâtiments), le Code civil n’envisage que la responsabilité du propriétaire d’un animal (ou de celui qui s’en sert pendant qu’il est à son usage), soit que l’animal soit sous sa garde, soit qu’il ait été égaré ou se soit échappé (art. 1385), et celle du proprié-

taire dont la ruine du bâtiment, résultant d’un défaut d’entretien ou d’un vice de construction, a causé un dommage (art. 1386).

L’article 1385 n’a probablement pas été conçu par les rédacteurs du Code civil pour faciliter l’action de la victime, mais simplement pour préciser

— par rapport au principe général de la responsabilité du fait personnel

— qui devait être considéré comme responsable et pour empêcher que

ce responsable ne puisse invoquer le fait que l’animal s’était échappé ; néanmoins, la jurisprudence a très vite affirmé que l’article 1385 posait une présomption de faute (permettant la preuve contraire), puis, lorsque se multiplièrent les accidents causés par les voitures attelées, une présomption de responsabilité (le gardien d’un animal ne pouvant se dégager que par la preuve d’une cause étrangère).

L’article 1386, lui, dispense formellement la victime de prouver la faute du propriétaire du bâtiment qui lui a causé un dommage par sa ruine, c’est-à-dire la chute de ses éléments, pourvu que la ruine résulte soit d’un défaut d’entretien, soit d’un vice de construction. Le propriétaire ne peut se dégager que par la preuve d’une force étrangère. Les rédacteurs du Code civil avaient voulu de cette manière faire à la victime une situation plus avantageuse qu’aux autres victimes.

La responsabilité du fait des animaux et la responsabilité du fait des bâtiments sont donc les seuls cas de responsabilité du fait des choses pré-

vus par le Code civil, mais, le début du XXe s. ayant vu la multiplication des accidents mécaniques dus à d’autres sortes de choses, le plus souvent anonymes (chaudières, machines industrielles, premières automobiles), la jurisprudence, soucieuse de protéger les victimes (notamment les ouvriers accidentés du travail), a cherché à les dispenser de fournir la preuve de la faute, ce qu’elles auraient dû faire si elles avaient invoqué la responsabilité du fait personnel fondée sur l’article 1382. Dans la mesure du possible, les tribunaux ont commencé par s’appuyer sur l’article 1386 pour rendre responsables les propriétaires des objets qui, de près ou de loin, pouvaient être assimilés à des bâtiments (ainsi pour les ascenseurs), mais le texte visait une espèce trop précise pour être toujours adaptable. C’est alors que la jurisprudence eut recours à une construction hardie édifiée sur l’alinéa premier de l’article 1384. Cet article vise un grand nombre d’hypothèses de responsabilité du fait d’autrui ; comme il est suivi des articles 1385 et 1386 relatifs à la responsabilité du fait des choses, les rédacteurs du Code civil lui avaient donné un chapeau, l’alinéa premier, aux termes duquel « on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ».