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Fleur de cactus (1964).

Le Boulevard a toujours attiré dans ses environs de bons auteurs désireux de concilier la qualité et le succès commercial : Marcel Aymé (Clérambard, 1950) ; Françoise Sagan, qui y fit des débuts plus tardifs, mais aussi éclatants qu’au roman (Un château en Suède, 1960) ; Félicien Marceau, qui, dans l’OEuf, a mis Sartre à la sauce boulevardière (1956). Le plus grand succès commercial de J.-P. Sartre, les Mains sales (1948), n’était d’ailleurs pas étranger à un certain Boulevard engagé qui a toujours existé. Ainsi se crée une confusion.

Le Boulevard va-t-il perdre son

âme ? Il s’est vu enfermé dans un ghetto de plus en plus étouffant par les deux entreprises qui ont marqué les vingt dernières années : recherche d’un théâtre populaire (T. N. P. et centres dramatiques) et avant-garde des an-nées 50 (Ionesco, Beckett, Genet). Les premières comédies d’Ionesco, avec leur humour noir et leur philosophie de l’absurde, ont mis en évidence le vide de la comédie boulevardière. Contre le théâtre engagé, contre le théâtre de l’absurde, contre la poésie, le sérieux, la contestation, un certain public va chercher un remède sûr du côté de Boeing-Boeing et de Fleur de cactus.

Le Boulevard fut à sa naissance le grand lieu du divertissement populaire, héritier des foires Saint-Germain et Saint-Laurent. Le mélodrame de Pixerécourt et le vaudeville de Labiche avaient gardé un peu de ce caractère originel. Mais tout ce qui s’est fait de grand au théâtre depuis Antoine s’est fait contre l’esprit du Boulevard.

A. S.

Boulez (Pierre)

Compositeur français (Montbrison 1925).

Il travaille au conservatoire de Paris, notamment dans la classe d’O. Messiaen, puis s’initie au dodécapho-nisme classique chez R. Leibowitz.

Cependant, il étudie les hautes mathé-

matiques, ce qui le marquera d’une empreinte profonde et fécondera un

tempérament gouverné par une lucidité et une puissance organisatrice exceptionnelles.

En 1946, avec la Sonatine pour

flûte et piano, la Première Sonate pour piano et la cantate Visage nuptial (René Char), il prend une position post-webernienne, mais déborde totalement le sérialisme classique, tendance que poursuivra la Deuxième Sonate pour piano (1948-49), où se manifeste une sauvagerie raffinée doublée de la rigueur d’une frénésie maîtrisée, déjà toute la dualité boulézienne. Le Livre pour quatuor (1948-1950) vient montrer, avec un lyrisme subtil, une tendresse altière et une poésie intense, que Boulez se situe aussi dans la lumière du génie debussyste. Sous l’influence du Mode de valeurs et d’intensités de Messiaen, c’est ensuite la dure ascèse du sérialisme intégral avec la cantate le Soleil des eaux (René Char) et Polyphonie X (1951). La détente se produira aussitôt avec le Premier Livre de

« Structures » pour deux pianos (1952) et surtout avec le Marteau sans maître pour voix d’alto et six instruments (1955) [René Char], oeuvre où se transcende le « debussysme » et le « we-bernisme » de Boulez, et où s’incorporent quelques conceptions auditives venues du gamelan indonésien et de la musique du théâtre nō. Cette partition donnera lieu à un nombre incalculable d’imitations plus ou moins heureuses, notamment dans la crise de « poin-tillisme » qui sévira dès lors jusqu’au maniérisme dans la jeune musique de l’époque.

En 1954, Boulez crée les concerts du Domaine musical (qu’il dirigera jusqu’en 1967), abandonne les fonctions de directeur musical et chef d’orchestre de la Compagnie Madeleine Renaud - Jean - Louis Barrault, qu’il occupait depuis huit ans, et se fixe en Allemagne, où il est pris en charge par Heinrich Strobel, directeur musical de la radio de Baden-Baden.

La Troisième Sonate pour piano

(1956) inaugure chez lui la technique de « l’oeuvre ouverte », en devenir, et fait intervenir certaines éventualités aléatoires. Poésie pour pouvoir (1958), d’après Henri Michaux, combine deux orchestres et des bandes magnétiques

en une impressionnante sculpture sonore et stéréophonique. Le Deuxième Livre de « Structures » pour piano (1961) explore le domaine des résonances harmoniques. Pli selon pli pour voix et grand orchestre (1958-1962), sorte de portrait sonore de Stéphane Mallarmé, est, sur soixante minutes, l’oeuvre symphonique la plus étendue et la plus poussée de son auteur. Cette expérience orchestrale raffinée se poursuit avec Figures, Doubles, Prismes (1958-1966), dont la richesse souligne l’ampleur de l’évolution réalisée depuis la synthèse décantée du Marteau sans maître. Cette évolution et ces acquisitions devaient ensuite se poursuivre avec Éclat (1965), brève pièce pour orchestre, et Domaines pour cla-rinette solo et vingt et un instruments (1968).

Ainsi Boulez s’affirme et se

confirme le créateur le plus important de la jeune musique : nul compositeur français, depuis Debussy, n’avait eu une influence aussi décisive. Mais, indépendamment de cette fonction historique et dialectique (voir ses livres théoriques et polémiques : Penser la musique aujourd’hui, Relevés d’apprenti, Par volonté et par hasard), sa musique exprime liberté et maîtrise dans un univers poétique.

Boulez a fait soudainement une fulgurante carrière de chef d’orchestre : création du Wozzeck de Berg à l’Opéra de Paris (1963), cours de direction d’orchestre et analyse musicale de Bâle (depuis 1960), régénération de l’oeuvre de Wagner à Bayreuth (depuis 1966) et nomination comme chef des Phil-harmonies de New York et de Londres (depuis 1969-70). Il est directeur de l’I. R. C. A. M. (Institut de recherche et de coordination acoustique-musique) au centre Georges-Pompidou (1975).

C. R.

Boulgakov

(Mikhaïl

Afanassievitch)

Romancier et dramaturge russe (Kiev 1891 - Moscou 1940).

Fils d’un professeur de théologie,

Mikhaïl Boulgakov, d’abord médecin de campagne, s’installe en 1918 dans sa ville natale, dont il est chassé en 1919 par la guerre civile. Attiré par la littérature, il abandonne la médecine pour travailler à Vladikavkaz (1919-1921), puis à Moscou, dans les services culturels locaux ou gouvernementaux, tout en publiant, sous des pseudonymes divers, reportages et feuilletons dans différents journaux.

Il débute par des récits humoristiques, dans lesquels un sujet fantastique, source de situations cocasses ou tragi-comiques (Diavoliada [la Diaboliade], 1924), souvent bâti sur l’hypothèse d’une découverte scientifique sensationnelle (Rokovyïe Iaïtsa

[les OEufs fatals] ; Sobatchie serdtse

[Coeur de chien], 1925), sert à mettre en relief, sous leurs formes et leurs dénominations nouvelles, les tares d’une société arriérée, traditionnellement dénoncées par la satire russe de Gogol à Saltykov-Chtchedrine (dont il se réclame) : tyrannie et formalisme bureaucratiques, ignorance et grossiè-

reté des moeurs. Une fantaisie débridée dans l’invention des sujets s’allie à la justesse de l’observation satirique et à la froide ironie d’un style sobre et précis. Traité sur le mode satirique, le thème de la révolution et de la culture est abordé en même temps sur le mode épique dans le roman Bielaïa Gvardia (la Garde blanche, 1923-24 ; publié partiellement en 1925), qui décrit la débâcle des armées blanches telle que Boulgakov l’a vue à Kiev en 1918. Sans indulgence pour ses chefs, il peint au contraire avec sympathie les deux frères Tourbine, jeunes intellectuels persuadés de défendre contre les démons du chaos et de la destruction les valeurs de culture incarnées par leur univers familial.

Jouée avec un immense succès en