digé en 1294 sous le règne de Jean II et dans lequel sont mentionnés les devoirs et services militaires dus au duc de Bretagne par ses principaux feu-dataires répartis dans les huit baillies qui partagent toute la Bretagne. Ces obligations militaires ne pèsent point exclusivement sur les nobles, mais aussi, sous certaines réserves, sur les roturiers et sur les seigneurs ecclé-
siastiques. La nécessité d’accroître la défense oblige, au XVe s., à compléter cette milice féodale par des troupes soldées qui préfigurent l’armée véritable. En 1425, Jean V crée la milice des francs-archers. François II complète en 1480 cette organisation, devenue insuffisante, par les « bons corps », composés de tous les hommes
« les plus forts et propres à porter les armes pour la défense du pays ». L’architecture militaire n’est pas négligée.
Les forteresses s’édifient ou se renforcent partout.
La vie économique
y Au XVe s. sont signés de nombreux traités de commerce avec la Hanse teutonique, la Hollande, l’Angleterre, l’Espagne, etc. La marine marchande est en pleine prospérité ; les foires se multiplient ; l’industrie de la toile connaît une renommée bien établie, comme celle des draps de Rennes
et des canevas de Vitré. Les marais salants contribuent à la richesse du pays, à laquelle les potiers de terre et d’étain apportent leur part.
Deux grands saints
Deux grands saints illuminent la vie spirituelle de la Bretagne : saint Yves et saint Vincent Ferrier. Yves Hélori de Kermartin (1253-1303) étudie d’abord aux universités de Paris et d’Orléans avant d’exercer les fonctions d’official de Tréguier ; il est nommé ensuite recteur de Trédrez, puis de Louannec. Son esprit de justice, sa sainteté lui attirent une vénération générale.
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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 4
1788
Les prodiges opérés sur son tombeau en la cathédrale de Tréguier le font canoniser et choisir comme patron de la Bretagne après sainte Anne.
Appelé par Jean V en 1418, Vincent Ferrier (en esp. Vicente Ferrer [v. 1355-1419]), dominicain, vint prêcher une mission. Sa parole ardente remue les foules, sa sainteté accomplit des miracles, les conversions se comptent par milliers. Quoique sa mission ne durât qu’un an, elle eut une influence profonde à un moment où la moralité subissait un net fléchissement.
La province de Bretagne
Trois semaines après le traité du Verger, le duc François II meurt, laissant le duché à sa fille aînée, Anne (née en 1477). En violation du traité, la régente, Anne de Beaujeu, reprend la guerre, et l’armée française occupe rapidement le nord de la Bretagne jusqu’à Brest, prend Concarneau le 15 février 1489 et Vannes le 19. La duchesse Anne s’enfuit à Rennes, où elle se fait couronner, et appelle les Anglais à son secours. À
cette annonce, toute la basse Bretagne se soulève pour repousser les Français, qui ne gardent plus, en juillet, que Fougères, Saint-Aubin-du-Cormier, Dinan et Brest. Charles VIII juge prudent d’arrêter les hostilités ; il signe avec Maximilien d’Autriche le traité de Francfort (juill. 1489), dont une clause l’oblige à remettre Brest aux Bretons et à neutraliser les autres places qu’il occupe. Il n’en fait rien.
Alors, Anne forme en octobre 1490
une ligue contre la France avec l’Espagne, l’Angleterre et Maximilien d’Autriche, qu’elle épouse par procuration le 19 décembre. Mais Alain d’Albret, gouverneur de Nantes, livre la ville à Charles VIII, qui y fait, le 4 avril 1491, sa « traîtreuse, desloyale et lâche entrée ». Le roi tient dès lors toute la Bretagne « hors Rennes et la ville qui estoit dedans ». Il met le siège devant la ville, la bloque si étroitement que la famine bientôt venue incline à un accommodement. C’est alors qu’il propose à Anne de l’épouser ; elle s’y refuse, puis cède aux instances de ses conseillers dans l’intérêt du duché.
Elle reçoit donc Charles VIII à Rennes et l’épouse au château de Langeais le 6 décembre 1491, après la signature
d’un contrat de mariage par lequel chacun des époux se fait réciproquement cession et donation de ses droits sur la Bretagne. Le 7 juillet de l’année suivante, le roi reconnaît au duché le droit de ne payer que les impôts consentis par ses états.
À la mort de Charles VIII, en avril 1498, Anne redevient duchesse de Bretagne. Le nouveau roi de France Louis XII demande l’annulation de son mariage avec Jeanne de France, auquel l’avait contraint Louis XI, et, le 8 janvier 1499, au château de Nantes, il épouse Anne de Bretagne, reine de France pour la seconde fois. La veille, il a signé une convention promettant de respecter « les libertés, franchises, usages et coutumes pays ». Anne, après un « règne » qui marqua pour la Bretagne une période particulièrement brillante, meurt à Blois le 9 janvier 1514, un an avant Louis XII (1er janv.
1515), qui avait eu le temps de marier sa fille aînée, Claude, à François d’Angoulême, lequel lui succède sous le nom de François Ier.
L’union de la Bretagne à la France n’est encore que personnelle ; le contrat de mariage de la reine Anne avec Louis XII lui assure même son indépendance. François Ier décide de l’incorporer au royaume. Un magistrat breton, Louis des Déserts, donne la main à ce dessein en suggérant de faire demander l’union définitive par les états eux-mêmes, qui sont convoqués à Vannes en août 1532. Les députés, quelques-uns stipendiés, d’autres abusés, finissent par admettre qu’il vaut mieux solliciter avec de bonnes conditions ce qui sera plus tard imposé sans contrepartie, et, le 13 août, le roi fait publier à Nantes l’édit d’Union, jurant de garder inviolablement les droits et privilèges de la Bretagne. Une charte, signée le 3 septembre au Plessis-Macé, précise et confirme ces privilèges.
Mis à part la Ligue, qui ouvre en 1589 une période de guerre civile et de brigandages, close par l’édit de pacification signé à Nantes le 13 avril 1598, l’histoire ne retient que la révolte du papier timbré en 1675. Pour satisfaire aux dépenses de la guerre de Hollande, Colbert met un impôt sur le papier tim-
bré, le tabac et la vaisselle d’étain ; cette violation, s’ajoutant à beaucoup d’autres, des privilèges de la Bretagne suscite une effervescence qui tourne bientôt à la révolution sociale. Les paysans se soulèvent, rédigent et tentent d’imposer un « Code paysan », pillent, incendient, commettent des meurtres.
Le duc de Chaulnes (1625-1698),
gouverneur de la province, réprime la révolte sans pitié, exile à Vannes, où il restera jusqu’en 1690, le parlement qui s’est élevé contre les taxes. Les mêmes causes — charges fiscales exagérées, contraintes abusives imposées aux états au mépris des libertés bretonnes
— provoquent en 1719 la conspiration du marquis de Pontcallec pour le respect du contrat d’Union de 1532. Une chambre de justice établie à Nantes condamne à mort le 26 mars 1720
les conjurés et fait exécuter ceux qui n’ont pas pu fuir. Mais à travers tout le XVIIIe s., la noblesse bretonne est au premier rang de l’opposition politique française.
Les institutions
Celles du duché sont maintenues dans leur ensemble par la monarchie, qui n’opère pas une assimilation brutale.
Les états conservent leurs droits ; ils demeurent les défenseurs des libertés et des franchises en face du gouverneur, représentant de l’autorité royale dans la province. On peut dire que la Bretagne, nonobstant les empiétements successifs du pouvoir central, jouit, jusqu’à la Révolution, de la plus large autonomie, comparativement aux autres provinces, même le Languedoc.
L’oeuvre d’unification poursui-
vie par la royauté rend nécessaire la création des intendants dans les pays d’états ; la Bretagne en reçoit un en 1688. Toute l’histoire de la Bretagne au XVIIIe s. est marquée par l’opposition parlementaire à la monarchie représentée par l’intendant ; l’épisode le plus célèbre reste la lutte menée entre 1760