Il note une série de rêves et essaie de trouver leurs corrélations avec des faits de la vie éveillée. Cette attention permanente au moindre événement
de la vie diurne ou nocturne permet d’étayer l’existence, soutenue ainsi par une trame permanente où chaque fait trouve sa signification et guide vers un
« point suprême » une vie qui jusque-là se perdait dans la confusion. Cette
« soif d’errer à la rencontre de tout », cette recherche continue des relations qui unissent les objets et les individus les uns aux autres, les prémonitions, l’attention aux coïncidences, cet examen permanent des données du réel pour tenter de l’éclaircir et d’atteindre à une « transparence totale de la réalité » se manifestent encore sous forme de récits dans l’Immaculée Conception (1930), l’Amour fou (1937), Arcane 17
(1947).
Mais ce changement de la vie tel que l’entend Breton n’a pas de raison d’être sans la transformation du monde. Cette expérience individuelle doit pouvoir être faite par tous et tous doivent trouver les conditions matérielles qui la rendraient réalisable. C’est pourquoi, dès 1925, Breton et ses amis se joignent au groupe d’intellectuels communistes de la revue Clarté. En 1927, il adhère au parti communiste. Il s’efforce, la
« révolution surréaliste » étant faite, de mettre « le surréalisme au service de la révolution ». Les communistes trouvent suspect ce concours jugé idéaliste, et, après maintes tentatives de conciliation, la rupture est définitive
en 1933. Cependant, jusqu’à sa mort, Breton ne cessera de prendre position sur les problèmes de l’heure (guerres d’Espagne, d’Algérie, du Viêt-nam).
Breton travaille d’ailleurs sans re-lâche à étendre l’audience de l’activité surréaliste : il participe à des manifestations à Prague (1935), à Londres (1936), à Mexico (1938). En 1938 a lieu la première exposition surréaliste à Paris. Mais lorsque éclate la Seconde Guerre mondiale, Breton s’exile aux États-Unis (l’Anthologie de l’humour noir est censurée par le gouvernement de Vichy), où il travaille avec Marcel Duchamp à des expositions d’art surréaliste et à la nouvelle revue VVV.
Après la guerre se reconstitue à Paris un groupe très différent du premier courant surréaliste, mais qui reconnaît toujours un maître à penser en Breton qui signe des tracts, dirige des revues (Néon, le Surréalisme même, la Brèche), dénonce les supercheries litté-
raires (Flagrant Délit, 1949), donne en 1952 des Entretiens à la Radiodiffusion française.
Malgré les attaques dont il fut l’objet, Breton n’a jamais failli à la ligne de conduite qu’il s’était tracée depuis sa rencontre avec Jacques Vaché. On a pu lui reprocher un autoritarisme quasi dictatorial lorsqu’il excluait, selon son bon plaisir, usant du prestige qu’il avait auprès de ses amis, ceux du groupe qui s’étaient écartés de la « voie royale de l’inconscient ». Il ne faisait qu’exercer à leur égard l’intransigeance qu’il exigeait de lui-même, refusant toutes les compromissions, les honneurs, ne ré-
clamant qu’une fidélité sans faille à des principes fondamentaux qu’il maintint avec une constance remarquable, faisant de sa vie et de son oeuvre une ascèse, une purification.
M. B.
F Surréalisme.
J. Gracq, André Breton (J. Corti, 1948). /
C. Mauriac, André Breton (Éd. de Flore, 1949 ; nouv. éd., Grasset, 1970). / J. L. Bédouin, André Breton (Seghers, 1950 ; nouv. éd., 1970). /
V. Crastre, André Breton (Arcanes, 1952). /
S. Alexandrian, André Breton par lui-même (Éd.
du Seuil, coll. « Microcosme », 1971). / G. Duro-zoi et B. Lecherbonnier, André Breton, l’écriture surréaliste (Larousse, 1974). / M. Bonnet, André Breton et les débuts de l’aventure surréaliste (Corti, 1975).
Breuer (Marcel)
Architecte américain d’origine hongroise (Pécs 1902).
Élève puis professeur au Bau-
haus, Breuer ne vient à l’architecture qu’après 1928, et sa carrière se développe hors de l’Allemagne. Chassé par le nazisme, il se rend d’abord en Suisse, où il construit l’une de ses premières oeuvres (immeubles du Dolderthal, Zurich, 1935-1936 — avec Alfred et Emil Roth), puis en Angleterre comme associé de Francis Reginald Stevens Yorke (1906-1962), avant d’aller rejoindre les États-Unis.
Associé de Walter Gropius* et professeur avec lui à l’université Harvard jusqu’en 1946, il édifie des maisons en préfabrication légère, adaptées au marché américain. Gropius et lui subissent fortement l’influence de Frank Lloyd Wright* et de sa prédilection pour les matériaux naturels : après quelque quinze ans de « style international », cette évolution trahit les doutes de toute une génération sur les vertus de l’esthétique « puriste ».
À partir de 1952, Breuer — installé à son compte, à New York, depuis six ans — connaîtra une célébrité internationale : il est appelé, en collaboration avec Bernard Zehrfuss et Pier Luigi Nervi*, à construire le palais de l’Unesco à Paris (1952-1958). Dans cet ouvrage, Breuer exprime clairement sa lassitude pour les formes « classiques » de l’art moderne : le plan en
« Y » avec façades curvilignes, l’utilisation du béton brut, la dramatisation de la structure sont autant d’éléments caractéristiques. Par la suite, Breuer développera ce style conflictuel : à côté d’oeuvres retenues comme le magasin
« De Bijenkorf » à Rotterdam (1955-1957), d’autres, telles que le Centre de recherches de l’I. B. M. à La Gaude (1960-1962), la Saint-John’s Abbey à Collegeville, Minnesota (1953-1961), downloadModeText.vue.download 113 sur 573
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 4
1792
ou le gymnase de la Litchfield High School dans le Connecticut (1954-1956), sont à certains points de vue critiquables. Breuer y subit l’influence de l’école sud-américaine, exploitant le système formel d’un Oscar Niemeyer*
avec la virtuosité d’un ancien « Bau-hauslehrer ». Dans des travaux comme la station de sports d’hiver de Flaine en Haute-Savoie (depuis 1967), ou le projet discuté de building du Grand Central à New York (1968), Breuer se tourne vers l’éclectisme officiel, dont certains de ses anciens élèves américains — Philip Johnson (né en 1906) ou Paul Rudolph (né en 1918) — sont parmi les meilleurs représentants.
Ainsi l’oeuvre de la maturité de Breuer prête à discussion : il a gardé dans l’exercice de l’architecture un certain formalisme non sans rapport avec le didactisme de sa formation. Dans le contexte américain, ses oeuvres, influencées par la mode, sont allées en se dépersonnalisant, tout en gardant le brillant d’exécution, le fini qui leur est propre. Breuer a écrit Sun and Shadow, The Philosophy of an Architect (New York, 1956).
Breuer et le Bauhaus
Étudiant extrêmement brillant du Bauhaus* à partir de 1920, Marcel Breuer sera profondément marqué par l’atmosphère de découverte intellectuelle qui est celle de la nouvelle école. Il ne tardera pas à y devenir professeur : en 1924, âgé de vingt-deux ans, il prend la direction de la section ameublement. L’expérience est d’autant plus intéressante que Gropius est en train de bâtir les locaux de la nouvelle école à Dessau. Pendant quatre ans, Breuer se révélera l’un des plus prestigieux dessinateurs de meubles de son époque. Il invente une série de sièges à partir d’éléments en tubes chromés et coudés, assemblés par soudure. Châssis et remplissages sont totalement dissociés : la structure est en métal, les coussins en toile blanche ou en cuir.
Breuer quittera l’école en même temps que Gropius, en 1928.
F. L.
P. Blake, Marcel Breuer, Architect and Designer (New York, 1949). / G. C. Argan, Marcel Breuer (Milan, 1957).
brevet
F PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE.
Briand (Aristide)
Homme d’État français (Nantes 1862 -