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L’interprétation cinétique du mode d’action du catalyseur oblige à distinguer deux sortes de catalyse : homogène, quand le catalyseur forme avec les corps qui réagissent et les produits un mélange homogène, donc monophasé, gazeux ou liquide ; hétérogène, quand le catalyseur, ordinairement solide, forme une phase distincte de celle constituée par le mélange en réaction : la formation d’eau en présence du platine est un exemple de catalyse hétéro-gène, alors que l’action d’un acide sur la vitesse d’inversion du saccharose est un cas de catalyse homogène.

L’action catalytique présente certains caractères généraux dont l’un concerne les réactions limitées : l’ex-périence montre que le catalyseur ne modifie pas, par sa présence, l’équilibre qui s’établirait, plus lentement, en son absence ; la composition du mélange à l’équilibre reste la même ; c’est là d’ailleurs un caractère en accord avec les principes thermodynamiques. Il en résulte que, l’équilibre étant considéré comme la limite commune de deux

réactions inverses, le catalyseur est actif pour l’une comme pour l’autre ; ainsi le fer, catalyseur de la décomposition thermique du gaz ammoniac en ses éléments, est également un catalyseur de la synthèse du gaz ammoniac.

Ainsi le catalyseur, incapable à lui seul de modifier un équilibre, ne crée pas l’affinité ; il « éveille les affinités assoupies » ; il serait vain de vouloir découvrir un catalyseur pour une réaction si celle-ci, dans les conditions où l’on veut la faire, n’est pas thermodynamiquement possible, c’est-à-dire ne correspond pas à une diminution de l’énergie libre.

Un autre caractère important de l’action du catalyseur est la spécificité : un mélange de corps capables de réagir, placé dans des conditions données de température et de pression, peut souvent évoluer de plusieurs façons diffé-

rentes, en d’autres termes être le siège de plusieurs réactions simultanées : un catalyseur donné accélère une seule d’entre elles et oriente ainsi l’évolution du mélange vers des produits déterminés ; ainsi, vers 200 °C, l’acide formique éprouve simultanément les deux

décompositions suivantes : en présence d’alumine, seule la première transformation (déshydratation) est constatée, alors qu’en présence d’oxyde de zinc c’est la seconde (déshydrogénation) qui se produit. Un autre exemple est celui des mélanges de monoxyde de carbone et d’hydrogène (gaz de synthèse), dont les possibilités de réaction sont nombreuses, en particulier suivant la nature du catalyseur utilisé. Signalons enfin la très grande spé-

cificité des catalyseurs biochimiques, ou enzymes.

Catalyse homogène

Le mélange homogène contenant le catalyseur est gazeux, ou plus fréquemment liquide ; le catalyseur peut être une molécule ; il est plus souvent un ion : ainsi les ions iodure I–, les ions Fe3+ catalysent la décomposition de l’eau oxygénée suivant la réaction : les ions H+ catalysent l’inversion du saccharose, l’estérification des alcools, l’hydrolyse des esters ; les ions OH-catalysent aussi l’hydrolyse des esters, etc.

L’interprétation du mode d’action du catalyseur ne pose ici que des problèmes de cinétique chimique et de mécanisme réactionnel : le passage du mélange initial à celui des produits de la réaction s’effectue, à l’échelle moléculaire, par une suite de processus dont certains font intervenir le catalyseur ; schématiquement, un exemple très simple peut se présenter ainsi : soit la réaction A 3 B admettant C pour catalyseur ; A et C réagissent suivant A + C I, I étant un complexe intermédiaire peu stable qui peut se décomposer soit en donnant de nouveau A + C, soit suivant I 3 B + C, processus qui fournit B et régénère le catalyseur. Les lois de la cinétique chimique, appliquées à cet exemple, montrent que la vitesse de la réaction A 3 B est proportionnelle à la concentration du catalyseur dans le mélange, ce qui est souvent observé.

Le catalyseur propose donc, par sa présence, une voie différente de celle empruntée en son absence ; mais aussi

la voie qu’il ouvre est plus facile que l’autre, car le franchissement des étapes exige une énergie d’activation moindre (v. cinétique chimique).

En raison de sa fréquence, la catalyse par les ions H+ ou OH–, dite « catalyse acide-base », joue un rôle très important, surtout en chimie organique ; mais à la suite des travaux de Brönsted et de Lewis, qui ont élargi le concept primitif d’acide et de base d’Arrhenius, un plus grand nombre de cas de catalyse homogène entrent maintenant dans le cadre d’une catalyse acide-base géné-

ralisée ; il en est ainsi par exemple de la réaction de Friedel et Crafts C6H6 + R—Cl 3 C6H5—R + HCl,

dont le catalyseur est le chlorure d’aluminium AlCl3 : celui-ci est un « acide de Lewis » par la lacune électronique existant sur l’atome Al, et il réagit avec R—Cl suivant

c’est le carbocation R+ qui attaque C6H6 suivant

C6H6 + R+ 3 C6H5—R + H+,

et le proton éjecté, réagissant sur régénère AlCl et produit HCl.

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Un cas particulier de catalyse homogène est celui d’autocatalyse, où le catalyseur est l’un des produits de la réaction : c’est le cas de Mn2+ dans la réduction de l’ion permanganate par l’ion oxalate en milieu acide :

si la solution ne renferme pas au départ de sel manganeux, la réaction démarre lentement et s’accélère ensuite.

Catalyse hétérogène

On en rencontre des exemples dans de nombreuses et importantes synthèses industrielles : gaz ammoniac, acide nitrique, acide sulfurique, méthanol, essence, etc. Au contact d’un mélange le plus souvent gazeux se trouve le catalyseur solide, dont l’action est limitée à sa surface en contact avec le gaz ; cela entraîne que pour augmenter l’efficacité du catalyseur il faut accroître sa surface pour un volume donné de

celui-ci : on obtient ce résultat par granulation convenable, ou en distribuant le catalyseur sur un support inerte de grande surface (masse de contact).

L’activité de certains catalyseurs peut encore être accrue par l’addition de quelques pour-cents d’un promoteur tel que l’alumine, promoteur du fer et du nickel dans les hydrogénations.

La durée du catalyseur n’est pas in-définie : il vieillit et son activité baisse, par modification superficielle ou par encrassement ; de plus, il est, comme l’organisme humain et peut-être pour des raisons analogues, sensible à des poisons qui, souvent à l’état de traces, bloquent son activité ; tels sont, à des degrés divers suivant la nature du catalyseur, le monoxyde de carbone CO, l’anhydride arsénieux As2O3, l’hydrogène sulfuré H2S.

L’interprétation du mode d’action du catalyseur repose sur le phénomène de chimisorption, adsorption* sélective par le catalyseur, qui met en jeu des énergies comparables à celles des liaisons chimiques ordinaires. Raison-nons sur l’exemple de la synthèse de l’ammoniac ; les étapes de la réaction sont les suivantes :

a) chimisorption des molécules N2 et H2 : l’établissement de liens chimiques avec les atomes du catalyseur fer s’accompagne d’un affaiblissement des liens entre atomes d’azote et entre atomes d’hydrogène (adsorption dissociante) ;

b) évolution progressive, en phase adsorbée, vers la formation de la molé-

cule NH3, avec comme intermédiaires probables les radicaux NH, puis NH2 ; downloadModeText.vue.download 465 sur 573

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 4

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c) désorption de la molécule d’ammoniac formée.

La chimisorption est proche

d’une réaction chimique ordinaire et doit, comme celle-ci, mettre en jeu l’échange d’électrons (comme dans les réactions d’oxydoréduction) ou de pro-

tons (comme dans les réactions acide-base) ; une différence, importante il est vrai, est que le composé formé, bidimensionnel, n’est ni isolable ni identifiable ; mais les considérations précédentes trouvent une justification dans le fait que, parmi les catalyseurs solides, on rencontre :