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l’entièreté de la création, aussi bien les êtres spirituels que les créatures inanimées. Le P. Henri de Lubac a pu écrire : « L’Église était déjà catholique au matin de la Pentecôte alors que tous downloadModeText.vue.download 474 sur 573

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 4

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ses membres tenaient dans une petite salle. »

La formule de saint Cyprien « hors de l’Église point de salut » a trop souvent été déformée et mal comprise.

L’affirmation que la non-appartenance à l’Église visible, sans aucune faute personnelle, entraîne la damnation éternelle est une croyance contraire à l’enseignement de l’Église. En fait sont sauvés non seulement les justes qui appartiennent à l’Église officielle, mais ceux qui, en dehors d’elle aussi bien dans l’espace que dans le temps, ont su être justes. Les écrits de saint Paul sont formels à cet égard : « Dieu nous a révélé le mystère de sa volonté que, dans sa bienveillance, il avait dès longtemps arrêté en lui-même, pour le réaliser une fois les temps révolus, à savoir : réunir toutes les choses dans le Christ [et] aucune génération humaine n’a été délaissée par la grâce dont les flots refoulent sur les siècles antérieurs. »

De tout temps, l’Église a cru que le seul désir du baptême suffisait à assurer le salut. Mais même ce désir du baptême ne doit pas être nécessairement explicite. Il suffit qu’il le soit implicitement, c’est-à-dire indirectement, que dans ce désir en soit inclus un autre, comme l’aspiration générale d’être sauvé quelle que soit l’idée que l’on se fait de la manière de l’être.

Ainsi les infidèles et les païens peuvent être sauvés s’ils se conduisent selon les exigences de leur raison et les aspirations de leur coeur. Pour le catholicisme, les uns parviennent au salut à l’intérieur de l’Église visible, d’autres en dehors d’elle mais comme membres de l’Église invisible.

Dieu, dit l’Église, doit être connu

par la foi, à travers la Révélation. Dès le seuil, nous trouvons le mystère chré-

tien. Il faut remarquer qu’il se différencie de celui des religions ésotériques de l’Antiquité, qui n’était révélé qu’à quelques initiés. Le mystère chrétien est bien quelque chose de caché, mais qui a déjà été révélé et qui doit l’être à tous les hommes sans exception ; au dire de saint Paul, « ce mystère qui est resté longtemps caché pendant de longs siècles mais qui vient d’être manifesté, et selon l’ordre du Dieu éternel, porté par les écrits des prophètes, à la connaissance de tous les hommes ».

Ainsi donc, il est accessible à l’intelligence, puisque manifesté. Mais l’intelligence humaine, à cause de ses limites en tant que créature, ne peut comprendre parfaitement les mystères. Les mystères de la foi, enseigne l’Église, sont au-dessus de la raison mais ne sont pas contraires à la raison.

Le mystère chrétien est une vérité qui a été longtemps cachée aux yeux humains, puis révélée « en partie » à une époque donnée, celle qui a vu la venue du Christ sur la terre à un moment pré-

cis de son histoire.

La Révélation, la

Tradition et l’Écriture

La Révélation, enseigne l’Église, s’est faite dans le déroulement concret du temps, dans l’histoire et en plusieurs fois « à bien des reprises, dit saint Paul, et de bien des manières en parlant autrefois à nos pères par les prophètes et en nous parlant dernièrement par son Fils ».

Révélation donc progressive et livresque avec la Bible : Ancien (les prophètes) et Nouveau (le Fils) Testament.

Manifestation d’abord voilée et limitée, dans l’Ancien Testament au peuple juif, puis dévoilée et universelle, livrée au monde entier dans les écrits du Nouveau Testament. Mais aussi Révélation par la Tradition. On touche ici ce qui différencie essentiellement le catholicisme des autres doctrines chrétiennes.

Au moment de la Réforme, les protestants ont voulu ramener toute la pensée chrétienne sur le terrain de l’Écriture et soustraire la foi des fidèles à toute intervention extérieure.

Devant la Tradition, Calvin s’écrie :

« C’est une grande iniquité si on se laisse contraindre par la coutume. »

Pour lui, il ne faut pas soumettre sa foi au jugement de l’Église, au collectif social et sacral de celle-ci. L’Écriture seule et exclusivement fonde la foi du chrétien. Le catholicisme admet qu’il n’y a plus de Révélation publique après la mort du dernier des apôtres.

Tout ce qui sera ensuite exprimé dans l’Église ne sera que l’épanouissement, l’explicitation de ce qui se trouvait déjà contenu dans l’enseignement du Christ et des apôtres. Enseignement qui s’est transmis d’abord oralement, puis par écrit dans l’Église, qui en est à la fois le dépositaire et l’interprète.

La Tradition se trouve dans le symbole de la foi, la catéchèse, les liturgies de la messe, les actes des martyrs, dans les décrets des conciles et des papes qui se sont succédé à travers les âges, dans les règles et les croyances que l’Église a adoptées depuis ses origines, enfin dans les écrits des Pères de l’Église ; ceux-ci, étant les représentants les plus autorisés des premières communautés chrétiennes, ont transmis aux fidèles l’enseignement qu’ils tenaient eux-mêmes des apôtres ou de leurs immé-

diats successeurs, soit par tradition orale, soit par tradition écrite.

Ainsi, pour le catholicisme, les croyances sont des vérités chrétiennes données dès les temps apostoliques, mais explicitées peu à peu au cours des âges. Vérités vivantes, donc susceptibles de progrès et de développements ultérieurs. Les dogmes évoluent sans changer et demeurent identiques en eux-mêmes tout en se développant.

Si l’Église en propose de nouveaux, tels ceux de l’Immaculée Conception (1854), de l’infaillibilité pontificale (1870), de l’Assomption (1950), il s’agit non de vérités qu’elle aurait elle-même découvertes, mais de véri-tés contenues déjà dans l’Écriture ou la Tradition implicitement ou explicitement et dont sous l’influence du Saint-Esprit elle prend une plus claire conscience au cours des temps, et qu’elle propose à la foi de ses fidèles dans de solennelles définitions.

Cependant, la Tradition est aussi autre chose que l’ensemble des véri-tés exprimées ou implicites. C’est une réalité vivante dans laquelle la foi et la vie s’expriment et se propagent. Ainsi la vie sacramentelle n’est pas en dehors d’elle, mais elle la prépare, l’entretient ou la prolonge. De même les saints, qui manifestent Dieu par leur vie.

Mais l’Écriture aussi a été, comme la Tradition, confiée à l’Église et non à chacun des fidèles. Les rapports entre Écriture, Tradition et Église comportent plusieurs aspects. La Tradition précède l’Écriture aussi bien dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament ; le premier dépôt a été oral (pré-

dication du Christ) et a été confié aux familles patriarcales ou aux apôtres, l’écrit n’est venu qu’ensuite. Ancien et Nouveau Testament ne sont d’abord que le reflet d’une vie religieuse de la communauté, que ce soit celle des patriarches ou celle des apôtres. Il y a un Évangile vivant avant qu’il ne soit question d’Évangile écrit. De plus c’est la Tradition qui a fixé de sa propre autorité le canon des Écritures.

Le concile de Vatican I, reprenant celui de Trente, prescrivait : « Doit être cru de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la Parole de Dieu écrite ou transmise par la Tradition et que l’Église, soit par un jugement solennel, soit par son magistère ordinaire et universel propose à la foi comme divinement révélé. » Ainsi Écriture et Tradition ne s’opposent pas, mais se complètent. On pourrait même dire qu’il y a une source unique de la Ré-

vélation, qui serait la Tradition, dont l’Écriture ne serait qu’un moment et qu’un aspect privilégié et particulier.