nible, dit la Genèse, que tu tireras ta nourriture de la terre, et tu mangeras ton pain à la sueur de ton front. » Pour la femme, il est dit : « Je multiplierai tes souffrances et principalement celles de ta grossesse, tu enfanteras dans la douleur. »
Mort, souffrance, sont donc les
conséquences et les châtiments infligés à l’humanité pour le péché d’Adam.
Mais il est une autre conséquence du péché originel, et non moins importante : la perte de la prise de possession absolue de l’homme sur l’univers tout entier. C’est saint Paul qui l’exprime :
« La création tout entière a été soumise à la crainte, non pas librement mais à cause de celui qui l’y a soumise », c’est-à-dire l’homme pécheur.
La Création a été détournée de sa destination originelle : au lieu de servir la gloire du Créateur, elle a été forcée de servir les ambitions démesurées, les désirs corrompus et les passions désordonnées de l’humanité. L’homme a reçu le pouvoir de dominer tout le créé, d’aménager l’univers, de le parfaire et de l’utiliser pour sa propre perfection.
Mais par sa chute il a dégradé la nature, il s’y est installé en égoïste et l’a fait servir à des buts mauvais.
Ainsi donc le péché a introduit un désordre dans les relations de l’homme avec le Créateur et avec le créé. Il
reste à voir comment la doctrine catholique explique pourquoi Dieu a créé l’homme faillible. La possibilité de pécher donnée à la volonté humaine découle du fait qu’il est de la nature de cette dernière d’être libre, donc de pouvoir choisir. Le premier homme ayant été créé non comme ayant déjà acquis son achèvement parfait mais comme en marche vers lui, il pouvait s’en éloigner et le refuser. La faute d’Adam a consisté dans le rejet de la vision béatifique à laquelle Dieu le destinait, par préférence de la béatitude naturelle considérée comme fin suprême.
Comme les mauvais anges, nos premiers parents ont refusé de croire à la parole de Dieu, ils ont choisi de suivre leur jugement propre.
Un autre mystère reste à élucider : la solidarité de l’humanité avec Adam. La réponse est à chercher dans l’idée de communauté : c’est la famille humaine en tant qu’ensemble qui a été pénalisée plus que chaque homme en particulier.
Le mystère de
l’Incarnation
Mais de même qu’existe cette solidarité dans le péché du premier homme, l’Église croit que la solidarité avec le Christ, le nouvel Adam, répare dans l’humanité les désordres provoqués par le péché originel. Pour l’Église, la figure du Christ, deuxième personne de la Trinité, est légitimement au centre de l’histoire humaine. « Quand vint la plé-
nitude des temps, dit saint Paul, Dieu envoya son Fils né d’une femme afin de nous accorder l’adoption filiale. »
Mais le Christ a été préparé. Tout l’Ancien Testament manifeste cette attente, cet « Avent ». Dieu a préparé l’humanité par une sorte de lente pédagogie à recevoir la Révélation plénière de son dessein par l’intermédiaire de son Fils. De ce point de vue, on peut dire que la sagesse biblique comme la sagesse païenne, la philosophie ont été autant de jalons et d’approches à tâtons de la vérité ultime. Mais toutes ces sagesses, comme la loi naturelle, étaient insuffisantes pour arriver à la véritable connaissance. Il ne fallait rien de moins que la venue du Fils de Dieu
sur la terre ; c’est là tout le mystère qu’on a appelé l’Incarnation.
Mais de même qu’Eve avait refusé son consentement au dessein divin.
Dieu demande à la créature sa coopération volontaire ; c’est tout le sens de la libre acceptation de la Vierge Marie, de son fiat ! à l’Ange lui demandant si elle voulait être la mère du Sauveur.
À propos du mystère de l’Incar-
nation, le Credo enseigne que Jésus-Christ est vraiment le Fils de Dieu, qu’il est Dieu lui-même, qu’il possède pleinement la nature divine. Tout le Nouveau Testament est plein de cette affirmation. « Jésus posa à ses disciples cette question : « Au dire des gens qu’est le Fils de l’homme ? » Ils dirent : « Pour les uns Jean-Baptiste, pour d’autres Elie, pour d’autres encore Jérémie ou quelqu’un des prophètes.
— Mais pour vous, leur dit-il, qui suis-je ? » Prenant alors la parole, Simon-Pierre répondit ; « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » En réponse Jésus lui déclara : « Tu es heureux, Simon, fils de Jonas, car cette révélation t’est venue, non de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux. »
Le Christ, s’il est parfaitement Dieu, est aussi parfaitement homme. C’est l’autre face du mystère dont parle saint Paul : « Il s’est anéanti lui-même en prenant la nature de l’esclave, devenu semblable aux hommes et reconnu pour homme. » Cette doctrine a pris corps peu à peu dans les premiers temps de l’Église et s’est précisée, s’est explicitée sous l’influence de nombreuses hérésies, dont les unes et les autres niaient soit la divinité du Christ, soit son humanité. Il y a donc coexistence dans la deuxième personne de la Trinité de deux natures distinctes, que l’on nomme l’union hypostatique, mais une seule personne, qui est la personne divine.
De cette union découlent plusieurs conséquences qui sont capitales pour la compréhension du dessein de Dieu sur l’humanité. En effet, le Père ne peut aimer que son Fils, seul objet digne de son amour ainsi qu’il est expliqué à propos du mystère de la Trinité, mais
« si le Verbe s’est fait chair, écrit saint Irénée, si le Fils éternel du Dieu vivant est devenu le Fils de l’homme, c’est afin que l’homme entrât en communion avec le Verbe de Dieu et, recevant l’adoption, devînt fils de Dieu. »
Par ce moyen se trouve accomplie l’intention qu’avait Dieu en créant l’homme de le faire à son image et à sa ressemblance, et que l’homme avait bouleversée par sa désobéissance en voulant être non plus son semblable, mais son égal ; et par là se trouve restauré le désir de divinisation que cette première destination avait laissé dans le coeur de l’homme. L’homme, grâce à l’union hypostatique. est réellement rendu participant de la nature divine, mais par grâce et non par nature, ainsi que l’exprime saint Cyrille d’Alexandrie dans son Commentaire sur l’Evangile de Jean. « Devenus participants downloadModeText.vue.download 477 sur 573
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 4
2156
de lui par l’Esprit, nous sommes frappés à sa ressemblance [...] Ainsi nous sommes élevés à la dignité surnaturelle par le Christ, mais ce n’est pas au même titre que lui que nous serons nous aussi fils de Dieu, mais comme a sa ressemblance, par la grâce. » C’est ce que confirme saint Athanase : « Il est manifeste que ce n’est pas nous qui sommes fils par nature, mais bien le Fils qui est en nous, et que de son côté Dieu n’est pas notre Père par nature, mais le Père du Verbe qui est en nous. »
Le mystère de la
Rédemption
Mais le point culminant de l’oeuvre de Dieu sur terre, c’est dans le mystère de la Rédemption que nous le trouvons, parachèvement de l’action entreprise par le Fils pour restaurer l’humanité dans son intégrité et sa béatitude première. Dans ce mystère viennent confluer tous les autres mystères de Dieu et de ses desseins, mystère du mal et du péché, mystère de l’Incarnation, mystère de la justice et mystère de la charité de Dieu.
La Rédemption, c’est-à-dire la mort du Christ sur la croix, prolonge l’Incarnation et l’accomplit, la Résurrection et l’Ascension ne faisant qu’un avec la mort qui est l’acte décisif. Cet acte, c’est le sacrifice du Christ, dont la mort sur la croix suivie de sa Résurrection a constitué une véritable expiation. Mais l’explication du mystère est des plus difficiles, et la théologie, malgré ses efforts, n’a pas réussi encore à en cerner toute la richesse. Sur la croix un Dieu qui est à la fois le prêtre et la victime s’offre en sacrifice et immole en même temps en lui toute l’humanité qui lui était adjointe depuis l’Incarnation.