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sous le nom d’Action libérale populaire, ne permettra pas de remonter un courant irréversible.

D’ailleurs, « le règne du soupçon », au cours du pontificat de Pie X (1903-1914), la force de l’intégrisme conservateur et de l’école de l’Action* fran-

çaise saperont les dernières positions du libéralisme catholique traditionnel.

Il n’est pas jusqu’au Sillon* qui ne se méfie de l’Action libérale, jugée trop bourgeoise et trop peu ouverte aux problèmes de l’heure. La démocratie*

chrétienne, qui se développe alors, se situe sur un tout autre plan que Piou et le vieux Correspondant : la revue abandonne le terrain politique en 1929

et disparaît sans bruit en 1932, l’année même où paraît le premier numéro de la revue Esprit, témoin d’une prise de conscience toute moderne des

catholiques.

P. P.

F Catholicisme social / Église catholique / Lacordaire / La Mennais / Montalembert.

A. Leroy-Beaulieu, les Catholiques libé-

raux ; l’Église et le libéralisme de 1830 à nos jours (Plon, 1885). / J. Fèvre, Histoire critique du catholicisme libéral en France jusqu’au pontificat de Léon XIII (Impr. Thévenot, Soint-Dizier, 1897). / G. Weill, Histoire du catholicisme libéral en France, 1828-1908 (Alcan, 1909). /

H. Haag, les Origines du catholicisme libéral en Belgique, 1789-1839 (Nauwelaerts, Louvain, 1950). / A. C. Jemolo, Chiesa e Stato in Italia dal Risorgimento ad oggi (Turin, 1955 ; trad. fr.

l’Église et l’État en Italie du Risorgimento à nos jours, Ed. du Seuil, 1960). / J. R. Palanque, Catholiques libéraux et gallicans en France face au concile du Vatican, 1867-1870 (Ophrys, Gap, 1964). / M. Prélot et F. Genuys Gallouédec, le Li-

béralisme catholique (A. Colin, coll. « U », 1969).

/ J. Delumeau, le Catholicisme entre Luther et Voltaire (P. U. F., coll. « Nouvelle Clio », 1971).

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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 4

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catholicisme

social

Mouvement de pensée et d’action

animé par la morale chrétienne et par l’esprit évangélique, qui est de justice et de charité.

Son but, qui fut d’abord l’amélioration des conditions de vie des classes laborieuses, s’est peu à peu élargi en une révision des structures sociales et économiques, des institutions et des moeurs. Il se distingue du socialisme non chrétien et particulièrement du marxisme par une recherche de l’expansion du royaume de Dieu. L’expression catholicisme social date des dernières années du XIXe s. Jusque-là, on employait des expressions diverses : les catholiques conservateurs parlaient volontiers d’économie chrétienne ou d’économie charitable ; le petit groupe des démocrates préférait parler de socialisme chrétien.

Les pionniers

(avant 1848)

La naissance du catholicisme social est liée à l’épanouissement du capitalisme industriel et au développement du prolétariat ouvrier au XIXe s. L’Église a toujours eu une doctrine sociale, en ce sens qu’elle s’est toujours préoccupée des rapports entre riches et pauvres ; mais le propre du catholicisme social est de s’intéresser au sort des masses populaires livrées à la révolution industrielle du XIXe s. et écrasées par l’application implacable de la doctrine du libéralisme économique.

En fait, durant longtemps, l’Église officielle, occupée à lutter contre l’Université et le voltairianisme, négligea presque totalement les problèmes

sociaux ; cependant, des catholiques, en petit nombre il est vrai, se soucièrent d’y apporter une solution.

Ce mouvement social au sein du

catholicisme — et plus particuliè-

rement du catholicisme français qui, en ce domaine, servit de modèle et d’animateur — naquit avant 1848 de deux sources indépendantes l’une de l’autre : dans les milieux démocrates dits « socialistes chrétiens » ; dans les milieux conservateurs et légitimistes.

Philippe Buchez, médecin saint-simonien converti au catholicisme en 1829, fut le chef du socialisme chré-

tien ; ses amis furent comme lui des républicains avancés qui prétendirent réconcilier la Révolution et le catholicisme, voyant même dans les principes de 1789 le triomphe des idées chrétiennes.

Pour Buchez, le christianisme permet à l’humanité de se réaliser dans le

« désintéressement », dont l’association ouvrière est l’instrument adéquat.

Des disciples de Buchez publièrent, de 1840 à 1850, le journal l’Atelier, véritable organe du « spiritualisme démocratique » et tentative unique, avant 1870, de créer un mouvement spécifiquement ouvrier d’inspiration chrétienne.

Il y eut une école sociale légitimiste.

Son véritable fondateur fut le vicomte Alban de Villeneuve-Bargemont

(1784-1850), auteur notamment d’une Économie politique chrétienne (1834) : le premier, il propose un système positif pour soulager la misère ouvrière ; il distingue deux notions trop souvent confondues à l’époque : pauvreté et paupérisme. Un autre gentilhomme, Armand de Melun, fut attiré à partir de 1838 par les problèmes sociaux ; jusqu’à la fondation des cercles catholiques d’ouvriers en 1871, il fut le chef du mouvement catholique social dans les milieux conservateurs ; membre de nombreuses oeuvres charitables, il fonda, en 1845, les Annales de la charité, organe de la Société d’économie charitable. On le voit : les préoccupations charitables et paternalistes dominaient dans ces milieux.

En marge de ces deux mouvements s’est développé, dans le sillage de Félicité de La Mennais, de l’Avenir (1830-1831) et du catholicisme libéral, un autre foyer de catholicisme social : Charles de Coux, Philippe Olympe Gerbet et surtout Frédéric Ozanam, fondateur, en 1833, de la Société de Saint-Vincent-de-Paul, en furent les plus brillants animateurs.

Les années tournantes

(1848-1871)

L’influence de ces pionniers, et particulièrement celle de Buchez et d’Ozanam, avait rapproché les ouvriers de l’Église au point que l’on se demanda, au lendemain de la chute de Louis-Philippe (févr.-avr. 1848), si tout un pan du socialisme n’allait pas devenir chrétien. L’Ère nouvelle (1848-1849), le journal de Lacordaire puis de l’abbé Henri Maret, donna corps durant

quelques semaines à cet espoir. Mais les événements de juin 1848, en rejetant la masse des catholiques (Montalembert et Falloux en tête) vers la réaction antirévolutionnaire, donnèrent un coup fatal au socialisme chrétien. Sous la IIe République et le second Empire, le catholicisme social se mua en un catholicisme charitable et paternaliste, auquel la masse des ouvriers échappa.

Armand de Melun et Augustin Cochin s’efforcèrent, par le développement des sociétés catholiques de secours mutuels et des patronages et par le vote (1850-1851) d’une législation charitable, de limiter la paupérisation de la classe ouvrière et de conjurer le péril que faisait courir à l’Église la rapide déchristianisation de cette classe. En fait, le catholicisme français se trouva complètement démuni devant l’insurrection de la Commune, en 1871.

Durant ces vingt années, l’étranger prit le relais de la France, qui, jusqu’alors, avait véritablement incarné le catholicisme social. En Belgique, Charles Périn (1815-1905), professeur d’économie politique à Louvain, prôna dans son livre De la richesse dans les sociétés chrétiennes (1861) l’association ouvrière, le retour aux corporations et un régime du travail plus humain ; cependant, Périn restait partisan du libéralisme économique.

Au Congrès de Malines de 1867, où fut fondée une fédération des sociétés ouvrières catholiques, cette tendance conservatrice fut préférée à celle, plus démocratique, d’Édouard Ducpétiaux (1804-1868), partisan d’une législation ouvrière spécifique.

En Italie, un penseur solitaire, le jé-

suite Luigi Taparelli d’Azeglio (1793-1862), inspira à son confrère Matteo Liberatore (1810-1892) et au dominicain Tommaso Maria Zigliaria (1833-1893) un grand goût pour les questions sociales, auxquelles s’intéressa aussi le futur Léon XIII, Gioacchino Pecci, alors archevêque de Pérouse.