En 1945, il avait donné un recueil
de poèmes, Pisando la dudosa luz del día. Poemas de una adolescencia cruel (l’Aube équivoque ou les Premiers Pas d’une adolescence cruelle). On y retrouve le thème de la pérégrination, de la quête spirituelle et de la nudité —
que l’on voudrait sans fard — du sentiment et de la sensation. Les poèmes ul-térieurs, épars dans des revues et dans des livres de voyage (notamment du voyage en Alcarria), témoignent d’un impressionnisme lyrique où l’objet est tiré de son atmosphère et, ainsi, devenu inutile, est exposé dans son non-sens.
La Ruche (La colmena, 1951)
marque une nouvelle étape dans la conception et l’art du roman. Là, le personnage central, c’est la foule dans toute sa médiocrité : les 346 individus ou imaginaires ou réels qui la composent, et qui se fondent dans l’anonymat d’une vie grise et insipide. De fait, il s’agit de Madrid après la guerre civile, une ville qui ne regarde pas aux moyens pour pouvoir survivre.
Pourtant, l’amour, la tendresse et la naïveté s’insinuent irrépressiblement dans ce concert d’égoïsmes. Il arrive même que la vertu, certes honteuse et timide, tienne tête à la dérobée au vice triomphant. La Ruche peut apparaître comme une concession de C. J. Cela au néo-réalisme, à la mode vers 1950.
Ce romancier de talent ne se laissera pourtant pas prendre au piège de cette école.
Une existence esthétique
La Catira (1955), roman vénézuélien, marque un brusque changement dans les thèmes, l’écriture et les problèmes de l’auteur. Dans cette Amérique primitive, la terre commande, façonne les hommes et les jette les uns contre les autres. L’héroïne voit mourir dans la violence son père et son mari ; elle revendique leur héritage : une plaine immense avec du bétail. Elle tue à son tour pour régner.
L’intérêt de l’ouvrage est double ; ce n’est pas seulement une histoire dramatique, c’est aussi l’occasion pour l’auteur d’exercer son génie verbal sur un des langages possibles du castillan, le parler des vachers américains, avec son vocabulaire, sa syntaxe et son accent particuliers. C. J. Cela s’attaque donc
à ce nouveau problème de l’expression littéraire espagnole (que seul l’Argentin José Hernández avait abordé dans son Martín Fierro [1872-1879], un long poème souvent de mirliton). Il réussit admirablement, quoiqu’en aient dit les tenants des « belles-lettres ».
Car il donne une existence esthétique et verbale à un monde jusque-là volontairement ignoré, où l’homme révèle des ferveurs inconnues et une intensité poignante dans ses rapports violents avec la nature. Sur ce nouveau terrain, il maintient son attitude de toujours. Il continue à démasquer les visages et à dénuder les âmes.
Mais la grande nouveauté, c’est que, avec La Catira, le roman en tant que genre remonte à sa source première, l’épopée. Il en adopte les principaux ressorts, la pitié et son contraire, la cruauté. Il recourt aux mêmes morceaux de bravoure : les longues chevauchées et les combats héroïques. Il déclenche dans l’esprit du lecteur les mêmes sentiments élémentaires, si constamment refoulés chez le lettré d’aujourd’hui, et dévoile sa primitivité incoercible. Et, cependant, le multiple Cela exerçait sa plume dans le conte, à la façon de l’eau-forte (El gallego y su cuadrilla, 1955) ou à la manière de l’illustration de faits divers (El bonito crimen del carabinero y otras inven-ciones [le Joli Crime du douanier...], 1947) ; et il cultivait la nouvelle (Timo-teo el incomprendido [Timothée, cet incompris], 1952 ; Santa Bárbara 37, gas en cada piso [37, rue Santa Barbara, confort à tous les étages], 1952 ; Café de artistas, 1953 ; El molino de viento y otras novelas cortas, 1956 ; Historias de España, los ciegos, los tontos
[Histoires espagnoles, les aveugles, les idiots de village], 1957).
La littérature, c’est à la fois la vocation personnelle de Camilo José et son métier. Mais elle ne le renferme pas sur lui-même. L’écrivain s’est mis au service des lettres espagnoles. Il fut élu à l’Académie espagnole en 1957. Depuis de longues années, de Majorque, où il habite, il dirige l’une des meilleures revues littéraires de l’Espagne, Papeles de Son Armadans, d’où est banni tout esprit exclusiviste d’école.
Par son oeuvre, son influence et son
action, C. J. Cela tient l’une des premières places dans l’histoire des lettres espagnoles et — fait remarquable —
dans l’histoire de l’espagnol écrit.
C. V. A.
O. Prjevalinsky, El sistema estético de Camilo José Cela (Valence, 1960). / Hispanic Institute, Camilo José Cela (New York, 1962).
/ A. Zamora Vicente, Camilo José Cela (Madrid, 1962). / R. Kirsner, The Novels and Travels of Camilo José Cela (Chapel Hill, Caroline du Nord, 1964). / D. W. Forster, The Forms of the Novel in the Work of Camilo José Cela (Columbia, Missouri, 1967).
Célastrales
Ordre de plantes dicotylédones, comprenant notamment des arbustes tels que le Houx et le Fusain.
L’ordre des Célastrales, dans le grand groupe des Dicotylédones dia-lypétales ligneuses, comprend une vingtaine de familles, parmi lesquelles on doit citer celle des Aquifoliacées (4 genres, 300 espèces), où l’on trouve comme plantes principales le Houx et le Maté, et celle des Célastracées, avec le Fusain.
Aquifoliacées
Les Houx (300 espèces ; une seule vit en France) sont des arbres ou des arbustes à feuilles persistantes ; les fleurs, disposées en cymes, sont du type 4, c’est-à-dire 4 sépales, 4 pétales, 4 étamines et 4 carpelles. Ilex aquifolium vit à l’état sauvage dans l’Europe occidentale et est très répandu comme arbuste d’ornement ; de nombreuses variétés sont cultivées, uniquement pour leur feuillage, car les fleurs sont petites et sans intérêt horticole. Les feuilles d’I. aquifolium type sont alternes, persistantes, très coriaces, vert foncé, luisantes, ondulées et dentées-
épineuses ; elles peuvent présenter de nombreuses variations dans la coloration et le nombre d’épines. Avec les feuilles d’une espèce de Houx d’Amé-
rique du Sud (I. paraguayensis), on fait une infusion tonique universellement connue, le maté ou thé du Paraguay.
Célastracées
Dans la famille des Célastracées, où les fleurs sont du type 5 ou 4, le fruit, qui est à 4 carpelles, donne à maturité une capsule en « bonnet d’évêque »
d’où sortent des graines rouges. La plante la plus connue est le Fusain du Japon, Evonymus japonicus, qui est très cultivé dans les jardins ; c’est un grand arbuste à feuilles ovales plus ou moins pointues, vert foncé, luisantes, bordées de petites dents régulières ; ses nombreuses variétés ont leurs feuilles diversement panachées. C’est avec le charbon de bois de Fusain que l’on exécutait les dessins également nommés « fusains ». Deux espèces sont originaires de France, mais ne sont pratiquement pas cultivées dans les jardins.
Deux autres familles voisines pourraient être signalées : ce sont les Cnéoracées (une espèce, Cneorum tricoc-cum, vit sur les coteaux arides de la région méditerranéenne) et les Empé-
tracées. (Empetrum nigrum, arbuste assez décoratif grâce à ses feuilles linéaires et à ses fleurs, ressemble aux Ericacées et vit dans les tourbières et les marécages des hautes montagnes d’Europe, du Japon et d’Amérique du Nord.)
J.-M. T. et F. T.
Célèbes ou
Sulawesi
Île de l’Indonésie.
L’île de Célèbes (aujourd’hui Sulawesi) a 189 000 km 2 et avait 8,5 millions d’habitants en 1971, soit une densité de 45 habitants au kilomètre carré : elle est administrativement divisée en quatre provinces aux densités de population très inégales.
La forme de l’île est extraordinaire :
« une poignée de péninsules liées en leur milieu et jetées dans l’océan ». De ces quatre péninsules, rectangulaires, trois, celles du sud, du sud-est et du nord-est, sont encore assez massives et la quatrième, celle du nord, étire une forme coudée. Ces péninsules sont montagneuses ; l’altitude est le plus souvent supérieure à 1 000 m, voire à 2 000 m ; le point culminant, le Bukit Rantemario, ou Rantekombola, ap-