La métropole n’est qu’une sorte d’annexe dont le gouvernement est assumé par William Carr, vicomte Beresford (1768-1854), un général anglais à la poigne rude. En 1820, profitant de son absence, les libéraux réussissent à prendre le pouvoir. Cette première crise politique allait profondément ébranler le régime, comme l’indépendance du Brésil, deux ans plus tard, allait gravement affecter la vie économique.
En 1822, les Cortes votent une
constitution libérale que ratifie Jean VI, enfin revenu. Mais les conservateurs sont encore puissants, surtout dans l’intérieur du pays ; par deux fois, le fils cadet du souverain, Michel, prend la tête de ces révoltes. En 1824, le trône échoit à l’aîné, Pierre IV, depuis deux ans empereur du Brésil. Préférant le Brésil à son royaume portugais, il abdique en faveur de sa fille Marie. La régence est momentanément confiée à son cadet, rappelé d’exil, à charge pour lui d’accepter la charte promulguée en 1826 et d’épouser sa nièce. Schématiquement, on peut dire que, sous des noms divers, les deux partis royalistes qui ont dominé la scène politique au XIXe s. correspondent aux partisans de la Constitution et à ceux de la Charte.
Dès son retour d’exil, fort de l’appui du petit peuple et du clergé, Michel se fait acclamer comme roi absolu. Il faut six années de guerres civiles pour le contraindre à un nouvel exil, et, comme Pierre IV meurt cette même année 1834, Marie peut enfin être couronnée reine de Portugal. Désormais, les souverains, Marie II, montée trop jeune sur le trône, puis Pierre V (1853-1861)
et Louis Ier (1861-1889), un cadet peu préparé à son métier de roi, vont laisser faire les hommes et les partis, ou plutôt les coteries. Seule une infime partie du pays est concernée par ces luttes politiques.
Quand le pouvoir est enfin stabilisé après les guerres entre libéraux et miguelistes, différents problèmes attendent toujours une solution : dette publique, que vont aggraver les emprunts conclus pendant le règne de Louis Ier ; analphabétisme, malgré les efforts de certains pionniers comme Manuel da Silva Passos (1801-18621) ; et enfin industrialisation. L’essor économique accentue le déséquilibre entre la côte et l’intérieur. Au XVIIIe s., même après Pombal, l’industrie restait artisanale et régionale. L’évolution du XXe s., avec les progrès techniques, contribue à vider l’intérieur et à accélérer la fuite des capitaux vers les côtes (v.
Portugal). Mais le Portugal n’a pas les bases suffisantes pour pouvoir se doter d’une grande industrie. C’est donc la terre qui doit fournir un débouché pour une population qui s’accroît à un rythme rapide : 2 900 000 habitants en 1815, 5 500 000 en 1911. La vente des biens ecclésiastiques et l’abolition des majorats nobles en 1835 n’ont suscité aucune transformation profonde dans les structures rurales. Le Portugal a laissé passer la chance d’une révolution agraire, et ces mesures libérales ont abouti en réalité à la concentration de la propriété. Une nouvelle classe de propriétaires a surgi, parfois plus exigeante que l’ancienne ; la masse des paysans sans terres s’est accrue et appauvrie.
La bourgeoisie joue un rôle grandissant au XIXe s., en particulier cette bourgeoisie foncière, principale béné-
ficiaire de la vente des biens nationaux.
Mais la noblesse ne disparaît pas pour autant ; noblesse traditionnelle et aristocratie d’argent, souvent anoblie, se confondent au niveau des classes dirigeantes. Dans les dernières décennies du siècle, cette aristocratie, maîtresse de la vie politique, tient aussi l’industrie, la banque et le grand commerce.
Contre elle, l’opposition ne vient pas des masses paysannes ni même des downloadModeText.vue.download 63 sur 573
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 4
1742
ouvriers, peu nombreux et mal organisés, mais de la petite et moyenne bourgeoisie. C’est dans ce milieu que les idées républicaines trouvent le plus d’audience.
La fin de la royauté
Les événements de France, en 1848, ont eu quelque écho au Portugal ; mais il faut attendre les années 70 pour voir la création d’un parti républicain et l’élection du premier député républicain à Porto. Le mouvement s’accélère dans la décennie suivante : le Brésil devient république (1889), la monarchie se discrédite par sa soumission aux exigences anglaises. L’audience du parti républicain s’accroît ; si l’insurrection de Porto échoue, les députés jouent un rôle grandissant à la Chambre. En 1906, Charles Ier dissout les Cortes et confie les pleins pouvoirs à João Franco (1835-1929). Pendant cette période de dictature (1906-1908), l’opposition se durcit : le 1er février 1908, le roi et le prince héritier sont assassinés. Pendant deux ans, la monarchie se survit avec le jeune roi Manuel II.
Le 4 octobre 1910, le soulèvement de la flotte et d’une partie de la garnison de Lisbonne le contraint à la fuite. La royauté s’effondre dans l’indifférence ; sa cause n’allait guère susciter de dé-
fenseurs dans le pays. Le 5 octobre, la république est proclamée à Lisbonne, tandis que le dernier des Bragance prenait le chemin de l’exil.
J. M.
F Brésil / Lisbonne / Pombal (marquis de) / Portugal.
Brahe (Tycho)
Astronome danois (Knudstrup 1546 -
Prague 1601).
Issu d’une noble et très riche famille danoise, il étudie à l’université de Copenhague, puis successivement à celles de Leipzig, de Rostock et enfin de Bâle.
En 1563, âgé de 17 ans seulement, il observe la conjonction de Saturne et
de Jupiter et relève à cette occasion des inexactitudes importantes dans les tables astronomiques de cette époque.
Plutôt que d’y remédier par de simples corrections, il décide d’en établir de nouvelles et entreprend la fabrication d’instruments d’observation dont les dimensions n’ont encore jamais été atteintes : un grand quadrant mural pour la mesure des hauteurs des astres de 19 pieds de rayon, un sextant de 14 pieds de rayon pour déterminer les distances angulaires et un grand globe de 10 pieds de diamètre pour y reporter le résultat de ses observations. Rentré au Danemark en 1571, il reconnaît et étudie en 1572 l’étoile temporaire qui fait l’objet de son premier ouvrage : De nova stella anni 1572 (1573). Puis il observe la grande comète de 1577, mais ne relate ses conclusions qu’en 1588 dans son ouvrage De mundi
aetherei recentioribus phaenomenis liber secundus.
Entre-temps, Frédéric II, roi de Danemark, lui offre, en 1577, l’île de Hveen, dans le Sund, avec tous les revenus y afférents, une pension ainsi que la prise en charge de toutes les dépenses de construction d’un observatoire et de son équipement.
C’est dans cette île de Hveen que Brahe fait édifier le magnifique châ-
teau d’Uraniborg (« palais d’Uranie ») dans les dépendances duquel se trouvent une imprimerie, une fabrique de papier, etc., et aussi l’observatoire Stelborg (« palais des étoiles »). Il est alors entouré d’étudiants, de savants, de princes même, et, pendant vingt ans, il exécute des observations d’une précision inouïe pour l’époque, déterminant les positions des neuf étoiles principales de sa carte céleste avec une erreur de moins d’une minute, estimant la longueur de l’année tropique avec une erreur de 2″, etc. Pourtant, son indépendance religieuse, son dédain pour les seigneurs, ses dépenses considérables le mettent en butte à toutes sortes de calomnies. À la mort de Fré-
déric II, en 1588, Christian IV, qui lui succède, reprend à Brahe les différents fiefs qui lui avaient été donnés. En 1597, la pension dont il avait été doté lui est retirée. Il quitte alors Uraniborg pour Copenhague, puis pour Rostock
et pour Wandsbek où il fait paraître en 1598 son Astronomiae instauratae mechanica. En 1599, Rodolphe II lui offre un asile à Prague où il commence ses Tabulae Rudolphinae, destinées à remplacer les tables astronomiques existantes, lorsque la mort le surprend le 22 octobre 1601.